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Une certaine reconnaissance de la diversité entre assimilation, communautarisme et discrimination positive.

mardi 13 octobre 2009, par Amitié entre les peuples

UNE CERTAINE RECONNAISSANCE DE LA DIVERSITE DANS UN CADRE REPUBLICAIN : LA POSITIONNER ENTRE ASSIMILATION, COMMUNAUTARISME et DISCRIMINATION POSITIVE.

Ecrit en mars 2007 repris en 2008.

Le thème de la diversité a été imposée par une directive européenne sur les discriminations qui comporte un volet sur les représentations de la diversité dans l’audiovisuel . La question s’est posée ensuite dans d’autres champs. Mais la reconnaissance de la diversité est balisé d’écueils – celui de la discrimination positive ou celui du communautarisme. Il reste une place réduite mais réelle pour la reconnaissance de la diversité dans le cadre des politiques d’intégration et de lutte contre les discriminations raciales (1).

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I - LES LIMITES DE LA RECONNAISSANCE RECENTE DE LA DIVERSITE

Le problème est de savoir d’après une rapide évocation de sources sur quelles bases, quels intérêts et dans quel domaine le thème de la diversité est mis en œuvre.

A) La diversité dans le travail.

La diversité dans l’égalité des chances est une approche issue des travaux du très libéral institut Montaigne (qui se présente comme un « think tank indépendant ») à l’attention des chefs d’entreprise. Début 2004, le rapport « Les oubliés de l’égalité des chances » (2) encourageait les entreprises à mieux refléter dans leur effectif la diversité de la population française, et à faire de la non discrimination et de la diversité un axe stratégique.

Le rapport Dominique VERSINI (3) sur la « diversité sociale » dans la Fonction publique prévoit l’extension de la problématique pour les jeunes issus des milieux défavorisés dans un cadre fort différent, celui de la Fonction publique.

Les « chartes de la diversité » préconisées dans ce cadre ont certes permis de sensibiliser certains secteurs de la production à la lutte contre les discriminations racistes. Ces chartes sont non contraignantes, simplement incitatives. Il n’y a pas d’obligation de résultats et encore moins de quotas d’embauches prévus. D’après Claude BEBEAR président de l’Institut 1500 entreprises auraient signé ces chartes fin 2006 (Le Figaro 07.12.06 reproduit sur le site Diversitéplus.fr)

B) La diversité hors du travail

* La diversité en politique. Elle est dès plus réduite. Sur 370 000 communes de France, pas un seul maire est issu de l’immigration des ex colonies. A l’exception de George-Pau Langevin, ancienne Présidente du MRAP, seule députée de la diversité, il n’y a pas un seul député métropolitain issu de la diversité sur 477 élus.

* La diversité dans les quartiers ouvriers. Elle est problématique D’après Jean-Marie DELARUE spécialiste du droit de la ville et auteur d’un ouvrage sur des quartiers en relégation ( ), « les sociétés urbaines ne sont pas des espaces de mixité sociale. Les quartiers sont fortement homogènes socialement et on observe des phénomènes de ségrégation et de relégation ». Le combat à mener (4) relève de la mobilisation citoyenne combinée à une forte politique sociale pas seulement locale mais surtout nationale.

Si la diversité est encore faible dans la société française, c’est que les discriminations racistes sont prégnantes. Lutter pour favoriser la diversité c’est donc lutter contre le racisme. Mais certaines modalités sont à éviter.

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II – LES MODALITES ACCEPTABLES POUR ALLER PLUS LOIN DANS LA PROMOTION DE LA DIVERSITE.

Il s’agira de promouvoir la diversité sans s’inscrire dans un processus de communautarisation, ni à fortiori de communautarisme. Il s’agira aussi de promouvoir la diversité sans recourir à la discrimination positive à l’américaine. Nombre de citoyens et d’associations comme le MRAP ont critiqué par ailleurs les insuffisances de la politique gouvernementale d’égalité des chances au regard du constat de sous représentation de la diversité ethnique . On comprendra que les marges du positionnement politique soient étroites pour qui veut avancer dans cette voie en restant dans un cadre républicain qui depuis une décision du Conseil constitutionnel du 9 mai 1991 relative au statut de la Corse condamne le recours à l’expression de « peuple corse » en tant que « communauté historique et culturelle vivante ».

A) Les balises pour une orientation sur la diversité.

Au sujet de la diversité il faut rejeter sans ambiguïté ceux qui la prônent au nom du communautarisme et ceux qui la construisent sur la base de la discrimination positive. Mais on - le MRAP notamment - peut accepter la diversité qui respecte l’exigence d’égalité républicaine en s’appuyant d’abord et exclusivement sur la compétence. "

 Avancer en évitant LA COMMUNAUTARISATION : promouvoir la réponse sociale.

En plaidant pour la diversité dans la société à tous les niveaux et dans tous les champs sociaux il ne s’agit pas de défendre une minorité visible spécifique ou même plusieurs. Le MRAP n’est pas le CRAN ou le PMF. Dire ceci indique qu’il n’est pas à priori un mouvement communautaire . Il lutte contre toutes les formes de racisme dans la société française et c’est à se titre qu’il se pose la question de la diversité. Soyons plus précis encore : même sous couvert d’universalité il ne cherche pas à favoriser une ethnie ou une communauté victime de racisme. Il plaide pour que les individus exclus pour racisme prennent bien leur place comme les autres dans la société.

Les raisons de cette position sont que la communautarisation sociale est un redoutable poison pour le vivre ensemble. D’abord elle érige des murs, ensuite elle assigne des individus sur le plus petit dénominateur commun d’une société fragmentée (1) en tribus, d’une société cloisonnée en clans. Elle favorise aussi les réponses racistes et ethniques au détriment des réponses sociales.

Le communautarisme est la réponse idéologique ou politique qui défend ces processus d’assignation ethnico-culturelle. Le communautarisme se déploie sur les reculs et renoncements de la politique sociale de la République.

 Avancer en évitant la « DISCRIMINATION POSITIVE » : une balise incertaine.

Le recrutement de la diversité opère, d’après M DOYTCHEVA (5) en usant de deux vecteurs : d’une part l’informel via les associations, d’autre part l’aléatoire via les quartiers. Dans ce dernier cas il s’agit d’une territorialisation de la lutte antidiscriminatoire.

B) Des propositions à la limite du « modèle » républicain .

Dans une société démocratique les statuts et positions sociales sont supposés ne pas se transmettre mais être acquis en fonction des compétences personnelles à la faveur d’un processus de compétition sociale qui (6) s’exerce s’agissant de l’embauche à partir d’un système de qualifications d’abord scolaire puis professionnel.

L’égalité des chances, qui va au-delà de l’égalité juridique, (puisqu’elle admet la possibilité d’un traitement préférentiel) relève plus d’une logique redistributive (comme l’impôt sur le revenu) ou réparatrice que d’une stricte logique d’affirmative action qui déroge fondamentalement à l’idéologie méritocratique pour aller vers une égalité des résultats. La « discrimination positive à la française » n’interviendrait donc, à suivre les lignes de la préface de Dominique SCHNAPPER (6), que comme accommodements ou assouplissements au « modèle républicain ».

Quid des exceptions au modèle ?

« L’universel républicain » ne serait pas figé dans ses déclinaisons concrètes. Au-delà des grands principes fondateurs il évolue en confrontation avec la « subsidiarisation » car les fonctions traditionnelles de l’Etat national ont été rognées par le bas avec l’émergence du local (cf notamment mais pas seulement les deux vecteurs de diversité ci-dessus) et par le haut avec la construction très libérale de l’Europe.

 

Le MRAP est soucieux de promouvoir la diversité en évitant la communautarisation et l’ethnicisation du social que de trancher sur ces questions théoriques. L’orientation est en débat.

Christian DELARUE

Secrétaire national du MRAP

1) Haut Conseil à l’Intégration 1998 :

Lutte contre les discriminations : faire respecter le principe d’égalité : rapport au Premier ministre

2) Yazid Sabeg et Laurence Méhaignerie « Les oubliés de l’égalité des chances » mais aussi Laurent BLIVET « Ni quotas, ni indifférence : l’entreprise et l’égalité positive. » Claude BEBEAR Minorités visibles : relever le défi de l’accès à l’emploi et de l’intégration dans l’entreprise.

Sur les chartes et l’institut Montaigne :

http://www.institutmontaigne.org/charte-de-la-diversite-dans-l-entreprise-2050.html

3) Rapport VERSINI

http://www.ladocumentationfrancaise.fr/brp/notices/054000049.shtml

et l’appréciation d’un syndicat : le SNADGI-CGT (Impôts)

http://www.snadgi.cgt.fr/spip/IMG/pdf/INFO-SNADGI-No100.pdf

4) Réponse sociale dans les quartiers Christian Delarue

http://www.mrap.fr/interventions/confdebquartiers-1.pdf

5) Michel WIEVIORKA (dir) Une société fragmentée, le multiculturalisme en débat. La Découverte 1996.

6) Cf. Une discrimination positive à la française ? Ethnicité et territoire dans les politiques de la ville par Miléna DOYTCHEVA in La Découverte 2007 avec une préface de Dominique SCHNAPPER. Miléna DOYTCHEVA a également publié en 2005 « Le multiculturalisme » en collection Repères ed La Découverte.

7) Cf. sur ce point : La mise en concurrence des compétences ou les dévoiements de la reconnaissance libérale.
http://www.france.attac.org/spip.php?article6574