Renforcer les conflits identitaires permet de renforcer le pouvoir d’un dirigeant. T Brugvin

samedi 16 février 2013
par  Amitié entre les peuples
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Renforcer les conflits identitaires permet de renforcer le pouvoir d’un dirigeant.
Par Thierry Brugvin

La guerre au Mali actuelle, ne peut s’expliquer uniquement par des conflits d’origine identitaire et la volonté d’indépendance de certaines ethnies telles les touaregs, mais elles y contribuent.

En traçant des frontières niant les identités ethniques cela engendre le chaos.
Les puissances occidentales, dont la France, l’Allemagne et la Grande Bretagne, se sont réunies du 15 novembre 1884 au 22 février 1885, durant la Conférence de Berlin, afin de mieux se partager les territoires de l’Afrique subsaharienne. Ils ont ainsi façonné environ 80% du tracé des frontières de ces pays. Foucher, « a calculé que 87% de la longueur de ces frontières, soit 70 000 km sur un total d’environ 80 000 km, étaient directement hérités des partages coloniaux »[1]. Ce découpage a contribué à désarticuler les identités ethniques inscrites dans ces territoires. En effet, lorsque les colonisateurs, tel l’Etat français, ou anglais, ont tracé des frontières, ils ont souvent créer des nations, en scindant des ethnies, ce qui affaiblissaient leur pouvoir au bénéfice de celui des colons. Mais ils ont aussi réunis dans une même nation des ethnies ennemies parfois en conflit et en guerre depuis des siècles. Ainsi, les colonisateurs occidentaux ont appliqué la vielle adage, « diviser pour mieux régner », ce qui a aboutit à créer de nombreuses guerres civiles, telles celles du Congo-Brazzaville ou du Soudan.
Par exemple, en 1985 éclata le conflit frontalier sur la région de l’Agescher entre le Mali et le Burkina-Faso[2]. C’est aussi le cas du Tchad et du Lybie, concernant la région du Tibesti . « C’est indirectement un problème de frontière avec le Burkina Faso et la Côte d’Ivoire, qui a causé dans ce dernier pays « depuis 1999, une grave crise politique intérieure marquée par un coup d’Etat, plusieurs tentatives avortées de renversement du pouvoir en place, et surtout une tension xénophobe dont ce pays ne semblait pourtant pas traditionnellement porteur »[3].
De cette façon même après les indépendances, même après le départ officiel des colons, ces divisions affaiblissent ces pays et favorisent la perpétuation de la domination politique néocolonialiste au service de la prédation des ressources naturelles et de l’exploitation des ressources.

Afin de se maintenir au pouvoir certains chefs d’Etat ou dirigeants politiques,
usent de tous les leviers en leur pouvoir et notamment le levier identitaire.
En Côte d’Ivoire, le chef d’Etat Laurent Gbagbo a aussi mis en avant la défense de l’ivoirité, l’identité ivoirienne, au détriment des personnes, tels les Burkinabés, ayant immigrés en Côte d’Ivoire. En France, Jean Marie Le Pen, puis sa fille Marine et le Front National cherchent à renforcer les tendances nationalistes et racistes chez les Français. Comme Hitler et les nazis avaient exhorté le peuple allemand à chasser les juifs de leur pays. La recherche d’un bouc émissaire explique René Girard[4], permet donc resserrer les rangs autour d’un leader et de rejeter sur le bouc émissaire toutes les fautes qu’on a pu commettre.

[1] FOUCHER Michel, Fronts et frontières. Fayard, Paris, 692 p, .1994, p. 167.
[2] FOUCHER, 1994, p. 176-182.
[3] BOUQUET Christian, 2002 – Côte-d’Ivoire : quatre consultations pour une transition. Afrique Politique, Paris, juin, p. 313-342.
[4] GIRARD René, 1972, La violence et le sacré, Grasset