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Replacer la question de l’intégration scolaire au sein d’une politique nationale et européenne d’ouverture et d’égalité. C Delarue

vendredi 10 décembre 2010, par Amitié entre les peuples

Replacer la question de l’intégration scolaire au sein d’une politique nationale et européenne d’ouverture et d’égalité.

Version du 19 novembre modifiée le 10 décembre 2010.

« Le mot intégration fait des ravages, il convient désormais de le bannir » Mouloud AOUNIT - Marseille 27 novembre 2010.

Note d’introduction pour le MRAP à propos du rapport sur l’intégration scolaire du Haut Conseil à l’Intégration
Intégration école : rapport-hci.pdf (Objet application/pdf)

http://www.lefigaro.fr/assets/pdf/rapport-hci.pdf

Sur le mot et le contexte.

L’intégration est comme Janus, elle a deux faces. D’un côté ce mot peut participer à l’ethnicisation du social, il peut inviter à particulariser des problèmes pour cibler des populations, il peut finir par culpabiliser les individus. De l’autre côté il peut pousser à construire d’une part un Etat social qui résorbe le chômage, donne des logements sociaux et des droits démocratiques, toutes choses qui dessinent un Etat de cohésion sociale et non une société profondément fracturée ( ) et d’autre part un Etat démocratique qui offre la citoyenneté aux résidents qui en sont exclus. L’intégration est instrumentalisée pour l’exclusion mais elle peut servir à l’insertion économique, sociale et politique.

On ne saurait déconnecter la question de l’intégration scolaire de la politique éducative globale et de l’ensemble de la politique de la nation et de l’Union européenne à l’égard de la diversité. Pour aboutir sérieusement à une amélioration notable de l’instruction et de l’éducation des jeunes de toute origine il importe d’inverser radicalement la politique sécuritaire et répressive contre les migrants. Sur ces perspectives nous renvoyons à « Pour une politique ouverte d’immigration » d’ATTAC aux éditions Syllepses.

L’intégration nationale peut être critiquée au titre d’une démarche autoritaire d’assimilation des immigrés et d’un défaut d’ouverture aux cultures différentes. La critique aura été multiforme ces dernières années face à la politique de N Sarkozy et de ses ministres. Il n’en demeure pas moins que le relativisme culturel, plus important dans les sociétés libérales et les Etats de droit, a effectivement des limites variables qui touchent au refus des nuisances sociales avérées des dogmes obscurantistes et des pratiques intégristes.

Une société peut se montrer en matière de mœurs ouvertes et libérales pour sa population adulte en capacité de choisir en connaissance de cause son mode de vie en fonction des droits et obligations en vigueur mais plus exigeante pour sa jeunesse en formation. Des précautions et des protections sont à prendre à l’égard de la jeunesse pour lui éviter les effets des pressions nuisibles et pour l’armer des capacités nécessaires à la vie en commun.

Changer l’école !

L’école a un statut particulier du fait de la rencontre d’un personnel particulier ( du fait de ses qualifications et de ses missions) et d’une population jeune qu’il importe d’une part d’instruire avec l’apport d’un socle de connaissances dépourvues de biais dogmatiques et d’autre part d’éduquer à la vie citoyenne. L’école est un lieu contesté à plus d’un titre. Les entrepreneurs y critiquaient les résistances à l’idéologie de la performance et du marché. A l’opposé, les courants d’émancipation ont critiqués la collusion des représentations nationales avec le colonialisme (cf S Citron). Le mouvement féministe a critiqué le sexisme véhiculé par les livres scolaires et les critères implicites ou explicites d’orientation des élèves. Les théocrates en tout genre ont eux aussi critiqué la raison sans Dieu.

L’école est donc un espace d’intégration sociale et culturelle qui est contesté parfois à raison mais souvent à tort.

Dans les deux cas il y a bien ainsi que le souligne un rapport du Haut Conseil à l’Intégration (HCI) des défis à relever. Le MRAP se doit d’avoir un avis sur ce point.

L’école est valablement critiquée comme espace culturel trop restreint. Au premier abord il semble que l’école a à faire preuve d’ouverture sur les cultures et civilisations éloignées du champ national et européen. Cela vaut pour les nouveaux venus comme pour les familles françaises installées depuis des générations sur le territoire national. Le récent débat sur l’identité nationale ne prête sans doute pas à un tel tournant. Pourtant c’est un thème qui, à mon avis, peut être porté par des enseignants aux options politiques très différentes, de droite comme de gauche pour être clair. L’enjeu source de conflit ici tiendrait dans les modalités : comment combiner une telle ouverture avec le maintien du cadre républicain ?

Les modes de vie différents doivent permettre aussi que les élèves puissent s’alimenter normalement sans avoir à manger des aliments interdits par leur religion. Les repas avec du porc ne sont évidemment pas interdits mais ils ne s’imposent pas comme le seul plat offert. Un choix doit être possible avec des plats de substitution. Si le choix est possible les enfants doivent ensuite pouvoir manger ensemble. Il faut refuser les revendications et divisions communautaristes à la cantine. D’autant qu’il y a parfois une sorte de « racisme inversé » qui consiste par facilité ou bon sentiment à ne ne pas donner du porc à de jeunes arabes ou de jeunes de culture musulmane n’ayant jamais demandé à en être privé.

L’école est aussi contestée à tort. Avec la montée du religieux en France, et plus particulièrement du fondamentalisme les thèses obscurantistes font leur apparition dans les écoles dans divers domaines : l’histoire (les croisades, les religions, l’enseignement de la Shoah,...) les sciences (Darwin), le sport mixte (en piscine notamment). La laïcité est refusée face à l’impératif dogmatique. Mais toute contestation ne relève pas d’un a priori dogmatique. Les débats sont concevables sur la guerre d’ Algérie ou le conflit israelo-arabe. En même temps, un minimum de culture historique doit pouvoir être enseigné sereinement dans les collèges.

Le rapport fait état d’autres problèmes. Il évoque le « principe d’économie linguistique » chez les jeunes qui tiennent à parler partout - pas qu’entre eux - le langage SMS. Qu’a-t-on à dire en tant que MRAP sur ce point qui pose un grave problème social puisqu’il est à l’origine d’une des recrudescences des violences des garçons sur les filles. On peut à l’occasion se montrer solidaire des associations féministes. L’apprentissage de la langue française est essentielle pour le vivre ensemble. Cela ne signifie pas stigmatisation ou interdiction d’apprentissage d’autres langues. Il faut montrer que l’école ne pratique pas « à son corps défendant » la discrimination sociale et raciale ainsi que le remarque Didier Lapeyronie (Libération 16 fev 2010).

L’école libératrice et intégrative doit poursuivre sa mission contre les tabous sur le corps humain, sur l’évolution humaine et la science (Darwin), etc.

Christian Delarue

diaporama « Différences culturelles et intégration »
Université d’été d’attac Poitiers 2006