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Reprendre courage, une vertu nécessaire à gauche (II) C Delarue

dimanche 4 novembre 2012, par Amitié entre les peuples

Face aux droites réactionnaires (I), quid des gauches ?

REPRENDRE COURAGE, UNE VERTU NECESSAIRE A GAUCHE ! (II)

 Quelle dynamique promouvoir ?

Le courage, ce serait d’entreprendre, d’entreprendre et de persévérer pour réussir. Mais pour réussir quoi ? Si la gauche est, avec ses pesanteurs et ses contradictions, du côté de l’émancipation, alors elle ne doit pas tout entreprendre. En tout cas, pas à n’importe quelle condition, même pour celle qui accepte de « mettre les mains dans le camboui », et donc de ne pas être pure de toute erreur ou de tout laisser-aller. Entrprendre pour le profit, pour soi n’a rien d’éthique. C’est l’affaire de la droite, du patronat et du MEDEF, si du moins on veut bien mettre à part l’entrepreuriat social dans les sociétés coopératives a-capitaliste (du moins dans ses principes si ce n’est toujours dans ses pratiques).

 Courage, c’est à dire « coeur dur » ?

On ne pourrait pas vivre si on avait tout le coeur qu’il faut. On ne vit que parce qu’on est dur« Parole de Jean Guéhenno, un humaniste dur, bien différente d’un Erich Fromm qui ne cessait lui de préconniser de se garder du »durcissement du coeur". Il ne faut pas confondre le courage et le cynisme. Le courage n’est pas la force des brutes viriles. Le courage humaniste consiste toujours à se restreindre dans sa riposte . Il faut une riposte mais elle doit être mesurée en fonction de la menace et du degré de l’indignité . Le courage de l’humanisme laique serait critique mais dosé. Face aux lampistes notemment, il s’agit d’être assertif dans son expression, c’est à dire non violent, amical et reconnaissant d’autrui mais d’une reconnaissance non falsifiée, ce qui est rare dès que l’on entre en entreprise.

 Le courage déterminé à gauche demande d’aller contre le courant, le courant des puissants.

La gauche en poste de pouvoir devrait penser, et sans doute le fait-elle, qu’il faut aussi du courage pour rester non violent quand les coups ne cessent de pleuvoir. Que ce soit dans les structures productives ou ailleurs en société. Y pense-t-on assez. La non violence est une forme de courage et de sérénité qui ne va pas de soi dans certains contextes sociaux lourds. Ceci est dit sans vouloir déresponsabiliser quiconque . Mais les dominants devraient penser plus souvent à être moins sévère quand des jeunes des quartiers délaissés de la République se laissent aller à de la violence réactionnelle sur des poubelles ou des vitrines. Il y a tant de souffrances accumulées par le cumul des humiliations, des oppressions et des dominations. Le courage n’est pas de resté collé à l’évènement qui sollicite la police mais de voir loin les causes et les réponses politiques immédiates. La gauche sait, elle, que le chômage est une forme de violence subie, le résultat d’une politique anti-sociale.

Lier le courage à la gauche, c’est poser que le courage est le moyen d’une fin spécifique qui serait la justice sociale (1) et même, au-delà, la grande émancipation du peuple-classe de la domination relative de l’oligarchie politico-financière mais aussi d’autres émancipations non moins importantes et à ne pas oublier. Au bout du courage on trouverait simplement plus de liberté, plus d’égalité et plus de fraternité ou pour le dire autrement beaucoup plus de démocratie, beaucoup plus d’Etat social et plus de respect de la nature.

 Une philosophie et une praxis du courage.

Evoquer le courage, c’est sans doute sentir que les temps sont au découragement voire à la capitulation devant les puissances dominantes de la finance et de ses riches et grands serviteurs. Car ce que veut le peuple-classe c’est bien plus de justice sociale. Il y a des recherches qui le démontre (1). Mais les critiques « aiment à dire que c’est bien beau de vouloir le meilleur mais faut-il encore en avoir les moyens » (2). A défaut, il faudrait savoir se contenter de politiques médiocres au plan social, économique, géopolitique, etc... Et toute l’ Europe ne vit-elle pas peu ou prou dans la médiocrité ? C’est peut-être l’autre nom de la crise, de leur crise. La médiocrité est surtout le fait des paranoiaques décomplexés qui se croyant exceptionnels se croient tout permis. Ayant perdu toute tendresse, ils cognent ! Il y en a beaucoup à droite mais on en trouve à gauche.

A la lecture de « La fin du courage » de Cynthia Fleury, philosophe, on apprend que le courage est redevable de deux grands champs d’étude : sa morale et sa politique. Auparavant, en introduction elle signale trois règles : 1 pour reprendre courage il faut cesser de chuter ; 2 retrouver la vitalité de l’organisme, y accorder du temps ; 3 il faut chercher la force là ou elle se trouve, famille ou autre.

Il faut du courage pour résister à la barbarie et à l’absurde. Il en faut à tous les niveaux de la hiérarchie sociale et dans tous les champs de l’activité humaine. Mais le courage se partage. Il n’est pas seulement une culture personnelle, sauf pour les individualistes qui doivent en auto-entrepreneur se lever tôt et se coucher tard pour tout faire, sans rien déléguer.

Il y a le courage pour être, continuer à être ce que l’on est déjà et que l’on veut garder car c’est un point d’appui pour soi et pour d’autres, ses proches, ses enfants, ses collègues. Il faut du courage pour faire, d’autant qu’ il est vrai que l’on croule sous l’ampleur des tâches, celles du travail salarié, celles du travail domestique, celles de l’activité militante ou citoyenne. Certains en font trop et d’autres pas assez. Certains ne cessent de voir ce qui est à faire, d’autres ne voient rien et se reposent. Mais d’une autre manière, se reposer ou ralentir est aussi un acte de courage pour les addictifs du travail.

Mais l’énergie est un moteur du courage. il faut donc doper son énergie. Se bouger, respirer, aimer aussi donne énergie et vie et enclenche un cercle vertueux . Ensuite, il faut choisir ses priorités. Ne pas trop s’éparpiller. Ne pas vouloir tout faire mais ne rien faire de bien. Ne pas non plus être perfectionniste à l’heure du qualitatif imposé.

Le premier acte de courage d’une gauche serait de rendre symboliquement au peuple les surplus de revenus mensuels qu’elle tient du régime ancien, celui de la droite sarkozyste qui à peine arrivée au pouvoir s’octroyait de royales augmentations quand le peuple lui connaissait la modération salariale, la désaffiliation des cadres stables d’emploi . Après le Président des riches la droite propose une reconquête sous la forme tout aussi inique du Président des blancs. La mauvaise pente de la droite est de devoir prendre des voix en se montrant bête et haineuse sans complexe. C’est l’intelligence qui requiert du courage. Elle est de gauche. L’abandonner, c’est se laisser aller vers la droite. Ce qui arrive à tout un chacun. Soyons modeste.

 Une référence de gauche de France.

Militer c’est résister et « résister c’est créer ». C’est aussi dire, soit « être en représentation » (un paradoxe) mais pour un contenu. Son propre contenu ou un contenu collectif. Dans le cadre du débat, « Le courage, c’est de chercher la vérité et de la dire » disait Jaurès.

Voir : « Jaures » - Zebda - 2009 - YouTube
http://www.youtube.com/watch?v=EUoxRR5aRlI

Christian DELARUE

1) Note sur « Inégalités et exigences de justice sociale en France »

http://blogs.mediapart.fr/blog/christian-delarue/101012/note-sur-inegalites-et-exigences-de-justice-sociale-en-france

2) La fin du courage - La reconquête d’une vertu démocratique par Cynthia Fleury Fayard 2010