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A qui fait peur la catégorie de peuple-classe ? C Delarue

dimanche 30 août 2009, par Amitié entre les peuples

A qui fait peur la catégorie de peuple-classe ?

Version réaménagée le 30 aout 2009.

Cette notion de peuple-classe pose un cadre interne d’alliances entre couches sociales et une coupure externe, un dehors (vers le haut) de conflictualité sociale qui peut être potentiellement émancipatrice. Cette catégorie socio-politique semble bousculer certaines visions du monde ou de la société. Qu’en est-il vraiment ?

* Il y a plusieurs objections intellectuelles contre la catégorie de peuple-classe.

1 - Versus marxisme orthodoxe : Il y a d’une part ceux qui s’accrochent à la classe sociale des travailleurs salariés en opposition à la classe capitaliste. C’est pour eux le conflit antagonique majeur des sociétés capitalistes. Sans doute les cadres supérieurs du salariat faisant fonction de capitaliste pose problème mais le rapport social en tant que tel reste pertinent. En conséquence, ils craignent que la notion de peuple-classe viennent amoindrir ou relativiser la portée de cette conflictualité et au-delà, pour certains, sa visée émancipatrice vers le socialisme.

2 - Versus doctrine républicaine classique : Il y a d’autre part ceux qui subsument le peuple sous la nation et celle-ci comme seul cadre possible de la citoyenneté. Peuple et nation sont distingués mais le peuple concret est nécessairement rattaché soit à la nation formée soit à une nation en puissance.

Ceux-là font appel à la nation pour penser le conflit contre les puissances dominantes extérieures, tantôt les USA, tantôt l’Union européenne. Ils craignent que la notion de peuple-classe viennent recentrer le débat sur le conflit de classe intra-national. Dans cette catégorie on peut trouver des politologues et des historiens soucieux de faire vivre les idées-forces de la République mais aussi des économistes keynésiens soucieux de pouvoir ménager un compromis avec les élites liées à la bourgeoisie nationale. En somme la notion reprendrait sous une nouvelle forme le vieux conflit de classe qu’ils jugent dépassé (pour certains d’entre eux).

3 - Il y a aussi l’objection de ceux qui nient l’existence d’un peuple au profit du seul individu, du seul citoyen et qui voient dans le peuple-classe une nouvelle notion totalitaire. Il n’y aurait pas plus de peuple que de société. A la rigueur certains reconnaissent la multitude.

4 - Une variante plus savante et sérieuse pose le peuple comme étant irréductiblement pluriel au travers de multiples conflits sociaux, dont le conflit de genre est le modèle le plus souvent avancé. Hannah Arendt plutôt que Rousseau et Marx. Comme l’unification dans la diversité n’était pas possible.

* Ces arguments ne sont pas dirimants.

La notion de peuple-classe n’efface ni celle de peuple-nation ni la nation comme figure de l’histoire républicaine. Elle n’efface pas non plus le conflit capital-travail. Et Rousseau n’empêche pas d’intégrer H Arendt et la diversité populaire.

Cette catégorie répétons-le n’est pas définie de façon monolithique. Une telle définition homogène a pu surgir jadis dans certaines formation sociale de la périphérie ; mais ce n’est pas celle qui est explicitée ici et maintenant pour renforcer l’unification d’un peuple-classe très divisé et fragmenté . Il ne saurait donc s’agir de poser un peuple-classe d’emblée homogène, se constituant d’emblée en classe pour soi de part son affrontement contre une couche dominante ou des élites (si l’on prends l’exemple du peuple-classe qui refuse les textes européens proposés en 2005).

La notion présuppose donc l’existence d’alliances de classe ainsi qu’une subjectivité de lutte. Cette présupposition est justifiée par l’existence de catégories sociales extérieures aux deux classes fondamentales en opposition sous le capitalisme dominant : le capital surtout et le travail plus difficilement. Du coup les frontière du peuple-classe peuvent être floues ou variables selon les circonstances . Mais il s’agit d’un flou limité, réduit. La frontière existe. Au-dessus du peuple-classe s’impose une classe dominante - la bourgeoisie- qui s’emploie fermement à défendre et accroitre son pouvoir économique et ses autres privilèges de classe.

En réponse à l’objection totalitaire, il faut répondre que cette notion n’annule pas le citoyen mais la conforte. Par ailleurs le peuple-classe s’oppose à toute classe ou couche sociale dominante, y compris à la bureaucratie stalinienne jadis ou aux notables des dictatures semi-capitalistes.

L’objection de la pluralité du peuple tend à adopter la formule de la multitude qui dépend beaucoup de la théorisation de Empire de Négri et Hardt ou d’une version proche qui conçoit ceux d’en-bas de façon floue, plus mobile, transverse à tout pays.

Christian Delarue

Le peuple-classe, une catégorie sociopolitique intermédiaire
http://amitie-entre-les-peuples.org/spip.php?article463

Les «  »citoyens du peuple-classe " ou le réancrage social du citoyen .

http://amitie-entre-les-peuples.org/spip.php?article729