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Relocalisation G Azam

jeudi 26 juin 2008, par Amitié entre les peuples

Azam Geneviève

1-CS-V1-002-24/03/2006

La promotion du libre-échange généralisé et la construction d’un marché mondial, la financiarisation du capitalisme couplée avec les technologies de l’information et de la communication, ont modifié le sens et le rôle des territoires, nationaux ou locaux. En effet, les politiques néo-libérales sont fondées sur la tentative d’affranchissement des activités économiques vis-à-vis des contraintes sociales, politiques ou écologiques. Le territoire, sous la forme des États ou des collectivités territoriales, lieu traditionnel d’exercice du pouvoir politique et de la démocratie, est considéré comme un archaïsme, un obstacle à l’u-topie du Marché, utopie au sens de non-lieu (a-topie), d’absence de lieu de pouvoir identifié.

Voilà pourquoi, dans un premier sens, l’exigence de relocalisation des activités économiques relève d’un choix politique visant à recréer du territoire et réouvrir l’espace du politique, des choix. Cette exigence renvoie à l’idée souvent avancée dans le mouvement altermondialiste d’une économie comme moyen au service des besoins humains et non plus d’une économie obéissant à la seule logique de la rentabilité, considérant le territoire comme simple lieu géographique et support d’activités dont le but est ailleurs.

Plus concrètement la relocalisation répond à trois défis à prendre en compte simultanément :

 L’arrêt de la dévalorisation généralisée du travail humain : le chantage aux délocalisations et les délocalisations effectives participent de la mise en concurrence des systèmes sociaux, fiscaux, écologiques et démocratiques et conduisent à une régression générale des droits collectifs. Même si temporairement les délocalisations peuvent créer des emplois dans certains bagnes capitalistes des pays du Sud, ces derniers sont toujours menacés également de moins-disant social ou fiscal, comme le montrent les délocalisations que subissent à leur tour les zones à bas coût de main d’œuvre lorsque se recréent de nouvelles opportunités.

 Le droit des peuples à la souveraineté alimentaire et à une alimentation saine, suppose la reconquête de l’agriculture vivrière au Sud et de l’agriculture paysanne au Nord et donc la protection vis-à-vis des intérêts des transnationales de l’agro-alimentaire. La relocalisation de l’agriculture et des industries de transformation agro-alimentaires est la première condition de la souveraineté alimentaire.

 La relocalisation de l’économie est une réponse urgente à l’augmentation continue des transports de marchandises, des nuisances environnementales et de la consommation d’énergies, non renouvelables et en voie d’épuisement. La part croissante des échanges croisés de produits similaires, notamment dans des grandes zones régionales comme l’UE, illustre à quel point l’augmentation des transports de marchandises a souvent peu à voir avec l’amélioration du bien-être des populations, comme le laisse entendre l’idéologie libre-échangiste.

La déterritorialisation des activités tend à faire du local une subdivision de l’ordre global, une déclinaison de cet ordre. Pour autant, à travers la relocalisation des activités, le local, quelle que soit sa taille, ne peut être envisagé en soi, comme entité fermée, autonome et auto-suffisante, mais dans son rapport avec le global.

C’est dans ce cadre-là que doivent être pensés les outils politiques de la relocalisation :

 Les politiques douanières : l’abandon du libre-échange comme dogme doit signifier que les politiques douanières, à tous les niveaux où elles sont décidées et où elles s’exercent, sont des moyens modulables devant répondre en même temps aux exigences citées : emploi, impact sur l’environnement, satisfaction des besoins sociaux et redéfinition des rapports Nord-Sud. Cela suppose une réforme radicale de l’OMC et de l’ONU dont la première devrait dépendre, tout comme celle de la politique douanière de L’Union européenne.
 L’harmonisation progressive des systèmes sociaux, fiscaux, environnementaux : elle doit être un préalable à la libéralisation des mouvements des capitaux, des services et des marchandises qui mettent ces systèmes en concurrence et les nivellent par le bas.
 Les services publics : ils ont contribué à nourrir les territoires. Leur affaiblissement et la disparition de services publics de proximité dévitalisent les régions rurales et les périphéries urbaines, renforçant le double mouvement de polarisation des activités dans certaines zones et désertification pour le reste. Reconquérir les services publics et en créer de nouveaux (par exemple un service public du logement), en assurer une véritable gestion démocratique constituent également des préalables pour une relocalisation de l’économie.
 Des expériences de relocalisation de l’économie et de sa démocratisation ont vu le jour depuis une trentaine d’années et sont regroupées en France sous le terme d’économie solidaire ou d’économie alternative. Articulées avec le renforcement des services publics auxquels ces activités ne sauraient se substituer, des aides publiques devraient être dégagées pour soutenir ces initiatives. Le succès des AMAP (Associations pour le Maintien de l’Agriculture Paysanne) témoigne de cette nécessité, tout comme la vitalité de certaines coopératives engagées dans la reconstruction d’un tissu économique local.


Voir en ligne : http://www.france.attac.org/spip.ph...