El Watan : Le voile obscur d’une rappeuse . W Mebarek

El Watan
Mardi 13 octobre 2009

Le voile obscur d’une rappeuse

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Elle qui croquait les tubes à pleines dents sous le si joli nom de Diam’s, que va-t-elle désormais chanter maintenant qu’elle a mis volontairement un voile noir sur ses rimes ?

Lyon

De notre correspondant

On le saura très vite, puisque le nouvel album de la toute nouvelle convertie à l’Islam sortira dans quelques jours, avec un titre dont on aurait pu faire le titre de cet article : SOS, mais qui dit tout le mal-être qu’elle a vécu ces dernières années. Cause et effet, on découvre la jeune rappeuse, Diam’s, voilée de pied en cap, en photo dans le journal du choc des images, Paris-Match. Pas un hidjab tendance mode, ou un voile seyant sur la tête. Non ! Un voile rigoureux. Pour un choc, c’en est un. Pour ses fans, certainement. En premier lieu les filles des banlieues en butte au machisme ambiant, dont elle a été une combattante ardente en ne mâchant pas ses mots. Dans des textes en forme de coups de poing, elle prônait la liberté des individus, hommes et femmes, avec tout ce que cela suppose, loin des règles de la religion musulmane appliquée strictement. Aujourd’hui, rideau ! Après un voyage en Afrique, elle a embrassé l’Islam et se serait mariée, avec un homme que l’hebdomadaire nomme Aziz.

On les voit en tout cas tous les deux sortir, évidemment pas main dans la main, de la mosquée de Gennevilliers. Couverte d’une sombre abaya, elle a le visage sans fard et peu souriante. Elle semble recueillie, ce qui convient parfaitement au lieu de prière d’où elle sort. Elle qui respirait la joie de vivre, il y a peu de temps, portant des tenues in, et les lèvres toujours maquillées dans les teints roses et scintillantes, elle paraît maintenant bien fade. On se demande comment le rigorisme de la foi qu’elle arbore va pouvoir se marier à la fougue du rap qui a fait son succès, et puis, y aura-t-il un autre album ? Ce long voile noir qu’elle porte désormais jure en tout cas dans le paysage français où musulman veut souvent dire arabe, et l’on remarque que depuis quelques années, nombre de personnes, issues d’autres religions, se convertissent à l’Islam.

C’est donc le cas pour Mélanie Georgiades, dite Diam’s, née à Nicosie sur l’île de Chypre, il y a 29 ans, d’un père chypriote et d’une mère française qui l’a « expatriée » en France après un divorce. Son irruption dans l’univers musulman, un choix personnel que personne ne discutera, tombe évidemment à point nommé pour ceux qui, au cours du débat actuel sur le port de la burka, auront le beau rôle pour dire qu’on est bel et bien face à un Islam de France. Et qu’aucune loi ne pourra rien y changer. Sur un autre point de vue, dès lors qu’une femme, en se convertissant, juge obligatoire de changer ostensiblement de vêtements, c’est aussi un coup porté aux femmes qui n’en portent pas, tout en pratiquant tous les préceptes de la religion avec dignité. Le débat va sûrement avoir lieu sur ces points qui touchent à la liberté de chacun et chacune de pouvoir vivre sa foi comme il l’entend. Jusqu’à présent en tout cas.

Par Walid Mebarek