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ENA / INDIGNES : Une autre démocratie est possible et nécessaire ! C Delarue

samedi 20 août 2011, par Amitié entre les peuples

INDIGNES : Une autre démocratie est possible et nécessaire !

Christian DELARUE

Membre de la commission « Démocratie » d’ATTAC France

Deux mots de présentation : La démocratie est objet d’études et de débats à plusieurs niveaux dans ATTAC France. Susan Georges est intervenue en plénière au plan mondial ; Robert Joumard sur les institutions européennes ; Jean-Claude Bauduret et moi-même intervenont sur les mécanismes qui favorisent la démocratisation. Nous avons donc participé à l’atelier « La politique sans les politiciens ». En ce moment JCB défend le tirage au sort et moi je m’intéresse à l’usage des catégories politiques par les élus notamment celle de peuple.

ENA / European Network Academy for Social Movements - Freiburg

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 Le peuple indigné !
A ce propos, on assiste à un développement revendicatif qui met le peuple dans un rapport social de refus face à un groupe minoritaire ou une fraction de classe sociale minoritaire.
Les peuples, pas la finance !
Les peuples, pas les marchés !
Les peuples, pas la dette et l’austérité !
Donc, les peuples pour la démocratisation profonde des Etats et des sociétés !
Cette dernière revendication a suscité ici ou là de vives critiques.

 Le « populisme » des indignés ?
On a reproché aux « indignés » de rester dans la critique et la résistance sans proposition d’alternative(s).
On a reproché aux Indignés une énième critique de la démocratie représentative ou d’abonder dans l’antiparlementarisme.
On a aussi reproché aux indignés de ne représenter qu’eux-mêmes !

I - UNE REPONSE FACE A LA « TRAHISON DES ELITES ».

« Nous représentons que nous-mêmes certes mais nos revendications sont populaires » disent les Indignés. Il ne s’agit pas d’être « en soi » contre les élites mais de souligner que les élites ne sont pas des fétiches intouchables au-dessus du ou des peuples. Et ce bien que le mot peuple soit fréquemment mis en rapport conflictuel avec les élites qui ne sont en théorie que « les meilleurs » du peuple tout entier.

Les « grands élus » sont partie prenante de l’élite avec les grands experts, les intellectuels médiatiques, etc... On peut juger sévère l’idée d’une « corruption systématique des élus » (évoquée dans l’atelier « La politique sans les politiciens ») mais pour autant on ne saurait évacuer l’idée qu’elle est très fréquente. Les cas sont nombreux.

La « trahison des élites » est soulignée par des intellectuels altermondialistes engagés contre le néolibéralisme, des intellectuels à côté du peuple-classe et non en surplomb. Il suffit de se reporté au fameux livre du même nom de Raoul Marc Jennar à propos de l’oligarchie néolibérale européenne.

Deux ordres de critiques :

A - Les élites sont globalement mandatées par le peuple pour accomplir une mission. Elles s’en détournent. Laissons de côté la notion de mandat pour se focaliser sur les missions.

 Les élites doivent se mettre au service des peuples-classe au lieu de servir la finance et les firmes transnationales.

 Les élites doivent œuvrer à la satisfaction des besoins sociaux et non au gonflement des profits des grandes firmes.

 Elles doivent aussi accepter d’être contrôlées. Comment se laissent-elles séduire à tel ou tel moment par les lobbies de la finance et autres lobbies. Les élus devraient être filmés constamment comme les premières réunions de Solidarnosc en Pologne.

 Enfin elles ne doivent pas penser avoir toujours raison, y compris contre le peuple. Les exemples ne manquent pas en Europe depuis le 29 mai 2005.

B - Les « élites » forment une oligarchie, une caste.

 Le terme caste renvoie en science politique à la faible circulation des élites. Pour nous à propos des élus le terme de caste renvoie à leur fermeture relative au peuple et à leur forte proximité des puissances d’argent, des firmes, de la finance . D’où le terme de ploutocratie.

 Celui d’oligarchie au pouvoir d’une minorité mais aussi à l’idée d’une certaine fatalité dans le temps du phénomène ou du moins de sa reproduction historique y compris là ou la démocratie délégataire s’est établie.

 Quelques remarques ici sur les élites qui suscitent le débat.
1 - D’une part dans un monde complexe les élites ne sont pas omniscientes. D’autre part des personnes ordinaires durablement détachées des contraintes pesantes du salariat peuvent prendre d’aussi bonnes décisions. Des études de science politique ont pu confirmer cela.
2 - De toute manière, leur savoir n’est pas une justification démocratique ni pour écarter le peuple ni pour décider contre lui.

II - UNE REPONSE INACHEVEE MAIS EN CONSTRUCTION.

Ceci n’est qu’une contribution au débat. Ce n’est qu’une introduction pour l’ouverture de développements plus conséquents.

 La résistance à « désémancipation » est nécessaire.
On assiste à une inversion du processus de démocratisation. Il faut inverser le cours de choses.
Il est possible de réduire le pouvoir oligarchique installé au cœur des démocraties électives.
Les possibilités d’intervention citoyenne des peuples souverains doivent être développées.

 Contre la ploutocratie, l’alterdémocratie !

A) Contre la ploutocratie et la finance

Les taxes sur les transactions financières sont nécessaires mais pas comme alibi pour poursuivre la prédation de la finance (ATTAC).
Il faut s’attaquer au système de la dette (CADTM)
Ce n’est pas l’austérité économico-sociale et avec elle le pouvoir des grands créanciers qu’il faut constitutionnaliser mais l’Etat social.
Les agences de notation soutiennent la spoliation des peuples ! Il est possible de les supprimer ou de les changer radicalement.
Les banques nationales et continentale (BCE) peuvent passer sous appropriation publique et sous contrôle citoyen.
La séparation entre banques de dépôts et banques d’investissement est un des vecteurs de diffusion de la crise financière sur lequel il faut revenir.

B) L’alterdémocratie

Il est possible d’instituer d’autres mécanismes démocratiques qui limitent les phénomènes délégataires et la dépossession citoyenne.
Il est possible de casser la constitution en caste des grands élus face aux citoyens, face au peuple souverain.

1) Un changement global de République est envisagé.

Cela suppose le lancement d’un grand débat avec apport des spécialistes des montages politico-institutionnels (qui sont variables d’un pays à l’autre). Mais ce débat ne doit pas rester entre constitutionnalistes professionnels.

En France le mode d’’élection du Président de la République est critiqué de même que le rôle ou l’existence même de la seconde chambre. On estime aussi que l’intervention populaire doit être mieux favorisée tout en évitant des travers plébiscitaires. Le champ de la citoyenneté doit aussi être élargi. Etc...

Tout cela mérite recherches et débats pour avancer. Ce débat doit être public et long pour être bien pris en charge par toutes les couches de la population. On imagine mal que les partis politiques puissent le porter sans intervention de citoyens indignés, sans intervention d’associations comme ATTAC En effet les partis politiques sont une partie du problème. Ils sont nécessaires mais ils ne sont trop souvent que des machines électorales, des groupes de notables. Ici il convient de vulgariser et diffuser les apports de la sociologie politique. La faire sortir des universités.

2) Changer les rapports élus / peuple souverain

Au-delà des mécanismes institutionnels c’est le rapport démocratique entre les élus et les citoyens qui fait surtout l’objet de critiques.

 Le cumul horizontal (type de mandats) ou vertical (nombre d’années : 2 x 3 ans) des mandats doit être réduit et même interdit pour réduire et même éviter la professionnalisation de la politique.

 Argent  : Si les élus doivent disposer des conditions matérielles nécessaires à leurs missions ils ne doivent pas s’enrichir avec des revenus mensuels à 7000, 9000, 11 000, 13 000, 20 000 euros net par mois . Ces rémunérations sont certes moins élevées que la fortune immense des grands riches mais elles sont nettement au-dessus du lot commun et elles les empêchent souvent de s’intéresser aux réels besoins de ceux d’en-bas, disons tous ceux qui sont à moins de 3000 euros net par mois.

In fine, pour ce changement, le peuple doit être souverain et décider. Sa décision doit être respecté.

Christian DELARUE

ENA Freiburg em brigau 12/08/2011