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Monique DENTAL du Réseau féministe « Ruptures » censurée le 17 octobre...

mardi 27 octobre 2009, par Amitié entre les peuples

Mise au point du Réseau Féministe « Ruptures »

Concernant le déroulement du rassemblement du Collectif Vérité et Justice

pour la commémoration des massacres du « 17 octobre 1961 »

Le Réseau Féministe « Ruptures », signataire de l’Appel du Collectif 17 octobre 1961 Vérité et Justice depuis plusieurs années, a commémoré cette année encore, sur le pont St Michel à Paris, le 17 octobre 2009, l’assassinat par la police française de centaines d’Algériens venus manifester pacifiquement le 17 octobre 1961.

Comme cela était prévu par les organisateurs, Monique Dental, en tant que fondatrice et animatrice de l’association devait intervenir pour rappeler le rôle des femmes algériennes pendant ces terribles heures. Après les trois premières interventions de Mehdi Lallaoui, du MRAP et de la LDH écoutées dans le calme, alors que Monique Dental venait de commencer la lecture de la déclaration, elle a d’abord été brutalement interrompue par les Indigènes de la République et d’autres personnes. Ensuite, sa voix a été entièrement couverte par un chant diffusé par la sono dont cette association s’est emparée.

Cette censure brutale d’une parole de femme militante évoquant d’autres femmes résistantes, cette attitude liberticide, voire terrorisante ont eu pour résultat de saccager la cérémonie et de bafouer les raisons pour lesquelles nous nous réunissons depuis de nombreuses années. Elles nous interrogent sur les motivations réelles de la présence de cette association qui n’était pas signataire de l’Appel du Collectif 17 octobre 1961 Vérité et Justice.

Nous condamnons ces pratiques inquiétantes qui instrumentalisent la mémoire des victimes algériennes du 17 octobre 1961. Depuis de nombreuses années, nous avons su nous rassembler dans l’unité et la dignité et nous entendons continuer dans cet esprit jusqu’à ce que l’Etat français satisfasse nos demandes.

Fait à Paris, le 21 octobre 2009.

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Rassemblement pour la commémoration des massacres

du « 17 octobre 1961 »

Paris, Pont Saint Michel, 17 octobre 2009

Communiqué de presse du Réseau Féministe « Ruptures »

Signataires de l’appel, cette année encore nous participons à ce rassemblement organisé chaque année par le Collectif 17 octobre 1961 Vérité et Justice, afin d’obtenir :

* la reconnaissance officielle du crime commis par l’Etat français les 17 et 18 octobre 1961 ;
* la liberté d’accès effective aux archives pour toutes et tous ;
* le développement de la recherche historique sur ces questions dans un cadre franco algérien et international.

Les membres du réseau féministe « Ruptures » tiennent à témoigner leur soutien parce que la mémoire doit se référer aux plus humbles des dominé-es et des opprimé-es.

Jamais le nom des victimes d’un passé colonial sans gloire n’a eu la reconnaissance publique de voir leur nom inscrit sur la plaque d’une rue, d’un square et si parfois leur disparition est mise en avant, ce n’est que pour en faire des martyrs d’une cause qui en définitive les instrumentalisent car le plus souvent l’oubli leur sert de linceul. C’est pour ne pas oublier que nous sommes aussi ici, ensemble.

Les femmes ont longtemps été colonisées par le système patriarcal. Durant des siècles, elles ont dû lutter pour obtenir une juste égalité qui n’est pas encore totalement acquise.

C’est pourquoi nous avons été solidaires de tous ceux et celles qui ont été colonisé-es, opprimé-es et dominé-es à qui on refuse encore aujourd’hui la reconnaissance de ce passé douloureux.

C’est au grand jour que doit se dire, s’inscrire ces moments noirs d’histoire où des hommes et des femmes ont souffert pour la joie d’autres hommes qui se croyaient leur maître.

Ce n’est pas tant le repentir de ces puissants du temps passé que nous souhaiterions, ce qui est bien plus important c’est la reconnaissance des esclaves, des dominé-es, des colonisé-es dans leur dignité d’hommes et de femmes, c’est-à-dire leur dignité d’êtres humains.

Pour celles et ceux qui, comme moi, ont vécu ces tragiques heures du 17 octobre 1961, résonne encore l’écho de la brutalité intolérante, intolérable et injuste de cette triste journée.

Nus nous sommes construits, et nous avons construit depuis, notre combat militant pour refuser que tout cela se reproduise.

Toutes celles et ceux qui ont eu la dignité de se révolter, de s’insurger à cette époque se sont souvent retrouvés à travers les luttes dans des mouvements différents. Ce souvenir partagé nous a permis de tisser des solidarités. Ces liens qui nous unissent sont porteurs de souvenirs gravés dans nos cœurs. Il est temps que l’action de se soutenir soit aussi inscrite au fronton des lieux publics en l’honneur de ceux et celles qui ont injustement péri et souffert.

Souvenir de toutes les violences commises dans ces moments tragiques dans les offices de polices, dans les rues, sur les quais de la Seine ou dans les bouches de métro, ou entre autres, encore aujourd’hui dans les camps de rétention dont aucune condamnation de responsable ne pourra plus atténuer le deuil.

Pour les générations à venir, ces souvenirs de nos sœurs et de nos frères doivent ouvrir nos yeux, nos cœurs et nos consciences et les chemins d’une possible égalité, juste et partagée.

Paris, 17 octobre 2009.

Contact : Monique Dental, Animatrice du Réseau Féministe « Ruptures »