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L’amour libre. J Zin

jeudi 1er janvier 2009, par Amitié entre les peuples

L’amour libre

http://jeanzin.fr/ecorevo/psy/amourlib.htm

L’amour pose concrètement, dans notre chair, la question de la liberté avec toutes ses contradictions. On pourra voir effectivement, avec la belle phénoménologie de l’amour de Jean-Luc Marion que le véritable amour éveille nos chairs et dure toujours alors que Serge Chaumier montre en sociologue comme les formes d’amour ont évolué historiquement avec la libération des femmes jusqu’aux formes actuelles instables et multiples où se cherchent des relations plus libres et authentiques. L’indispensable Francesco Alberoni célèbre le caractère révolutionnaire et fondateur de l’amour annonçant des bouleversements sociaux, alors qu’Ortega y Gasset insiste au contraire sur le libre choix amoureux engageant l’avenir, sur ce qui distingue le désir sexuel d’un amour qui est décision de vivre ensemble et de partager la vie quotidienne dans sa banalité. Pourtant, il semble bien que la seule excuse de l’amour soit le désespoir et que cela finisse la plupart du temps en « guerre des sexes » plus ou moins sordide dont la littérature témoigne (notamment Colette pour la partie féminine). Avec Paul-Laurent Assoun, la psychanalyse dévoile le caractère traumatique de la sexualité et les ressorts inconscients de la Loi de l’amour (courtois) où c’est la femme (la maîtresse) qui fait loi, jusqu’au masochisme. La dimension incestueuse de l’amour semble nous condamner à la transgression ou bien à l’obstacle et la distance idéalisant l’objet du désir mais ne laissant que peu de chances à un amour durable (si ce n’est en acceptant d’avoir deux amours peut-être ? solution inacceptable et pourtant traditionnelle). En annexe, il a paru utile de rappeler ce que la sexualité féminine garde de mystérieux pour la psychanalyse, ainsi que le témoignage qu’elle recueille du ratage du rapport sexuel et du malentendu entre les sexes.

Préliminaire : la libération de l’amour, 14/02/04-04/04/04

S’il fallait se délivrer de la névrose chrétienne et « cultiver » notre part sexuelle, si la tâche la plus considérable était d’abattre le patriarcat et sa domination des femmes, la véritable libération ce serait celle de l’amour.


Phénoménologie de l’amour
, 08/03/04, 28k
Jean-Luc Marion, Le phénomène érotique, Grasset, 2003

Tentative de décrire les figures de la conscience de la relation amoureuse qui part de la haine de soi et de la nécessité d’être aimé à l’échange où chacun donne à l’autre ce qu’il n’a pas, l’érotisation de sa chair. L’amour n’est pas une passion irrationnelle, absurde ou insignifiante, l’amour ne dérive pas de l’ego, mais le précède et le donne à lui-même, incarnation qui précède tout sujet, désir qui précède toute connaissance. La satisfaction du désir confronte l’amour à la finitude et au mensonge mais chacun resterait fidèle à tous ses amours passés, dans la certitude d’avoir été aimé.


Des amours multiples
, 18/03/04, 27k
La déliaison amoureuse, De la fusion romantique au désir d’indépendance, Serge Chaumier, Payot

Après la phénoménologie de l’amour rêvé unique et éternel, la sociologie des amours d’aujourd’hui multiples et temporaires, la déliaison amoureuse, la libération féminine, le désir d’indépendance et les familles recomposées, le conflit des modèles amoureux entre amour fusionnel et « fissionnel ».


La révolution amoureuse
, 29/03/04, 28k
Le choc amoureux, Francesco Alberoni, Pocket

L’amour comme « état naissant d’un mouvement collectif à deux », force de transformation révolutionnaire de la vie quotidienne, destruction des anciennes institutions et des anciennes communautés, suite à une surcharge dépressive, mais aussi fondation de nouvelles institutions et d’une nouvelle communauté. La passion amoureuse est transgressive, elle se construit contre l’obstacle et la Loi. L’énamoration est une renaissance, le retour de la force vitale, des projets et de l’espérance. C’est un moment exceptionnel et, comme tel, il ne peut durer sans s’institutionnaliser et tomber dans l’ordinaire jusqu’à la prochaine révolution. L’amour naissant annonce parfois des révolutions imminentes et les mouvements sociaux favorisent la naissance de l’amour. On est loin d’une passion inutile et plus près d’une folie sacrée où nous trouvons notre origine.


Le choix amoureux
, 25/04/04, 45k
Etudes sur l’amour, José Ortega y Gasset, Rivages

Le choix amoureux est largement inconscient mais c’est un véritable choix, manifestation de notre liberté, de nos préférences, de nos valeurs et de notre projet de vie, non pas d’une « cristallisation » illusoire. Dès lors, ce n’est pas le coup de foudre qui compte, ni la jouissance sexuelle, mais bien la vie commune, son institution, l’amour n’étant pas désir mais union active dans la vie quotidienne, projet commun conscient autant qu’accord inconscient.


La guerre des sexes,
17/05/04, 38k
Colette (Le génie féminin 3.), Julia Kristeva

Il fallait une intellectuelle reconnue comme Julia Kristeva pour réhabiliter le témoignage de Colette sur la libération féminine et la (bi)sexualité de la femme, identification incestueuse à la mère archaïque retrouvée, avec ses relations triangulaires, la guerre des sexes qui sépare inexorablement les amants d’hier, la malédiction de l’amour et de ses jeux pervers qui nous laissent de plus en plus solitaires...


Après l’amour
(postface), 01/06/04, 60k,
Le couple inconcient, Paul-Laurent Assoun, Anthropos, 1992

L’amour et la littérature sont avec le foyer et les enfants des domaines où c’est la femme qui fait la loi. Le masochisme pourrait être l’aboutissement de l’amour courtois mais l’amour postfreudien serait condamné à la farce ou au crime. Dans son roman Adolphe, Benjamin Constant témoigne de son impossibilité à se soumettre à la loi féminine, déchiré entre son amour et son besoin de liberté. Lou Andreas-Salomé résoudra la question par la distance et la sublimation dans l’art ou le mysticisme de la nature. Ce n’est pas à ce prix pourtant que les promesses de retrouvailles de l’amour pourront être tenues, mais de pouvoir vivre ensemble durablement, avec assez d’humour. Il semble bien que la seule solution stable, c’est d’avoir deux amours, malgré qu’on en ait...

Annexe : La sexualité féminine, 16/04/04, 82k

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