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Pour faire front , place au peuple-classe de France ! C Delarue
vendredi 15 juin 2012, par
Pour faire front , place au peuple-classe de France !
Pour faire face au patronat et à la droite, place au peuple-classe de France !
(Version revue de celle sur lepost).
A qui peut s’adresser la gauche ? Au peuple ? Ce que fait le Front de Gauche. Mais quel peuple ? Au peuple « social », au peuple-classe.
– Peuple à plusieurs tiroirs.
Il existe plusieurs déclinaisons du « peuple », même si on met de côté les sens trop anciens. Le peuple sans plus de précision est une notion beaucoup trop englobante, et pour tout dire mystificatrice de par son interclassisme voir son nationalisme, son patriotisme.
– Peuple ethno-nationaliste à gauche ?
Riposte laïque s’adresse, comme Marine Le Pen, au peuple de France catho-laique contre l’islam, contre un « eux » externe ou resté (pour eux) étranger sur le sol français. Cette association diffuse une vidéo « peuple de France » avec une chanson qui évoque divers thèmes se rapportant à la France humilié. De qui se moquent-ils à RL ? Que des exclus bafouent le drapeau tricolore est une chose sans gravité pour quiconque sauf pour ceux qui précisément veulent conforter une notion patriote de peuple ou le peuple-classe assujetti pactise avec la classe dominante. Les dominés avec les dominants. Ils font donc du drapeau un fétiche religieux sacré ! Étonnant pour des laïques . Ce n’est pourtant pas le blasphème du chiffon national qui ne va pas nous donner plus ou moins d’austérité. Et c’est un français « de souche » qui le dit tout net. Le mensonge nationaliste nous prive d’accéder à la vérité. C’est une pollution de l’esprit.
Riposte laique ne dit rien contre la finance, rien contre l’oligarchie financière et le capitalisme financier. Ce n’est pas son objet me-direz vous. Il n’empêche qu’elle est objectivement un organe de détournement du regard critique contre en-haut, contre les dominants : la bourgeoisie et ses hauts managers. Il faut être sérieusement obsédé par les intégristes pour ne pas voir que ce sont ceux d’en-haut qui nous dominent et nous oppriment bien plus que quelques fous furieux de l’islam.
Peuple ethnique ce n’est donc pas une notion pour la gauche que ce soit la version « saucisson-vin rouge » ou « catho-laique ». Cela ne signifie pas tout accepter de l’islam mais c’est un combat très secondaire.
– Faut-il alors en appeler au peuple-nation, au peuple démocratique ?
Depuis le 29 mai 2005 il est plus clair qu’avant qu’on se moque de ce qu’il veut, du moins une part de lui. De fait, et bien avant 2005, une large fraction du peuple a toujours été assujetti par une oligarchie, dominé par une classe sociale. L’oligarchie financière n’a pas toujours existé, pas pendant les « Trente glorieuses » mais il y avait néanmoins une bourgeoisie, une classe dominante. Elle n’avait pas la force de frappe d’aujourd’hui mais elle dominait malgré sa concession sur un Etat social aujourd’hui attaqué. Le fait n’est pas propre à la France. C’est général. Il n’y a pas de pays dans classe ou caste dominante.
– Dans tous les pays, évoquons un peuple « social », un peuple-classe.
Ne sautons pas du très englobant à un en-bas sans danger, passible de politiques publiques compassionnelles qui ne sauvent pas ces couches populaires de la mal vie . Entre le peuple tout entier (expression déjà prise ailleurs) et les couches populaires il y a place plus largement pour un peuple-classe.
Large fraction de peuple assujetti plus que peuple tout entier, il ne s’agit donc pas pour autant d’abandonner le mot peuple qui sonne si large mais de lui ajouter systématiquement ou de temps en temps un adjectif qui connote son contenu social. Et de s’adresser à lui par ce nom.
Il faut comprendre, à gauche surtout, que la bourgeoisie est dans le peuple comme l’oligarchie est dans la démocratie. Les jolis mots de peuple et de démocratie ont été phagocytés par une minorité d’en-haut. Ils sont devenus des fétiches. Contre cette réification il ne s’agit pas de dire que peuple et démocratie n’existent pas. Mais nous devons dire quel peuple ? Quelle démocratie ? Poser la question c’est déjà dévoiler qu’une autre appropriation est possible. Par qui ? Par le peuple-classe et pour une autre démocratie radicalement différente de celle-ci.
– La notion de peuple-classe est suffisamment englobante
Elle est suffisamment large pour accueillir les diverses théories de classes sociales (ou couches sociales ) internes et les diverses formes de dominations. Le peuple-classe c’est l’ensemble des citoyens qui ne décident pas y compris les petits patrons, y compris les cadres (sauf le niveau managérial ou de commandement).
Le peuple-classe est « assujetti à des décisions sur lesquels il n’a pas prise - sauf en des circonstances exceptionnelles de réussite d’une action syndicale ou de référendum . On peut dire qu’il est exploité économiquement, dominé politiquement et influencé idéologiquement ».
Bref ce peuple-classe bien que très largement majoritaire (autour de 98 % des résidents) n’est pas souverain. On ne peut tout à la fois être souverain et assujetti . Les dominants n’ont nul besoin d’un peuple souverain et d’un peuple-classe qui décide, qui imprime son pouvoir aux dominants au point que ces derniers doivent reculer et céder du pouvoir, des droits économiques et politiques. Ils ne cèdent jamais longtemps. Il faut donc conserver l’idée d’un peuple-classe offensif, en capacité de s’émanciper pour peu qu’il ait accès aux théories critiques qui dérangent les dominants.
Les dominations sont multiples : de classe (classisme), de racisme, de sexisme, de sécuritarisme, de néocolonialisme. Le peuple-classe n’est donc pas pur et exempt de conflits internes. La classe dominante use de tout son appareil d’influence idéologique pour accroître ces divisions qui ne sont pas toutes intrinsèquement capitalistes mais que le capital a renforcé.
Christian DELARUE