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Une mondialisation solidaire contre le libre échange et la libre circulation des capitaux. G Duménil

mardi 21 juillet 2009, par Amitié entre les peuples

I Une mondialisation solidaire contre le libre-échange et la libre circulation des capitaux

Le libre-échange, c’est l’ouverture de toutes les frontières commerciales par la disparition graduelle des droits de douane, des obstacles non tarifaires et des limitations quantitatives aux échanges de biens et de services, indépendamment de toute considération sociale, écologique et de droits humains. La libre circulation des capi­taux, c’est la totale latitude laissée à leurs dé­tenteurs de les placer ou de les investir dans les pays de leur choix, notamment dans des paradis fiscaux. La production se fera là où le travail est le moins cher, là où les normes environnementales et fiscales sont les plus laxistes, et là où l’ordre règne. La parfaite mobilité des capitaux conduit à la mise en concurrence directe des travailleurs et des systèmes sociaux des pays du centre du ca­pitalisme avec ceux de la périphérie, pour le plus grand profit des intérêts financiers.

Libre circulation des capitaux et libre-échange intégral sont les deux aspects indissociables du processus de marchan­disation qui affecte progressivement tou­tes les activités humaines, hors de tout contrôle démocratique. Le laminage des souverainetés populaires – s’exerçant dans un cadre national ou supranational – n’est pas tombé du ciel : il est le produit de décisions – parfois volontaires, parfois contraintes – de gouvernements théori­quement souverains. L’Union européenne (UE) représente un cas d’école de ce mé­lange de démission des gouvernements et d’application délibérée par ceux-ci des dogmes du néolibéralisme.

La Commission européenne a impulsé, fait adopter et met en oeuvre quatre grands types de politiques :
* au sein de l’UE, la libéralisation et la mise en concurrence, sans harmonisation fisca­le ou sociale, des systèmes nationaux ;
* à ses frontières, l’élargissement à de nouveaux États membres, mais sans ac­cepter l’effort financier de solidarité né­cessaire, et en imposant aux candidats de véritables programmes d’ajustement structurel qui laminent tous les disposi­tifs de protection sociale et favorisent le dumping social ;
* avec les pays tiers du Sud, notamment ceux du pourtour méditerranéen, la si­gnature de traités de libre-échange par nature inégaux, tandis que les accords de Schengen ferment hermétiquement l’UE à l’immigration des ressortissants de ces mêmes pays ; avec les États-Unis, à l’horizon de 2010, la mise en place d’une zone de libre-échange, conçue comme un gigantesque outil de li­béralisation dans le cadre du Partenariat économique transatlantique (PET).

L’Organisation mondiale du commerce (OMC), censée réguler le commerce inter­national, est régie par deux grands prin­cipes. Le premier porte un nom étrange hérité du passé : la clause de « la nation la plus favorisée ». Cela signifie que si un pays accorde un avantage à un autre, par exemple en réduisant les droits de douane à l’importation de certains des produits de ce partenaire commercial, il doit octroyer les mêmes avantages à tous les autres pays de l’OMC, puisque les pays sont censés être à égalité dans la concurrence. Le second principe est le « traitement natio­nal ». Il implique que, dans un pays donné, investisseurs étrangers y seront traités comme des investisseurs nationaux.

Face à cela, l’objectif, aujourd’hui, est que les peuples puissent exercer leur sou­veraineté, c’est-à-dire décider réellement de la société dans laquelle ils veulent vivre, des politiques qu’ils veulent voir mener et des institutions qu’ils veulent voir créer. Il faut reconstruire un nouvel ordre mondial sur la base de principes complètement ré­novés. Ce nouvel ordre doit reposer sur des principes de solidarité et de coopéra­tion sélective, en fonction des situations et besoins des uns et des autres. Pour cela, l’OMC devrait dépendre de l’ONU et respecter les droits sociaux, écologiques, politiques fixés dans la Charte de celle-ci. Dans ce cadre-là, des accords entre cer­tains pays seraient possibles, non généra­lisables, visant à une véritable coopération, à la satisfaction des besoins, à la répara­tion des dégâts sociaux et écologiques des politiques antérieures, ainsi qu’à une plus juste distribution des richesses. De même, la construction européenne doit être réo­rientée sur la base de nouveaux principes permettant à l’intérêt général des peuples d’Europe de prendre le dessus.

Renoncer au libre-échange tous azimuts ne signifie pas basculer dans un protection­nisme frileux, mais organiser les échanges selon des logiques solidaires et sélectives.

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