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Théologie de la libération et pluri-émancipation. Christian DELARUE

jeudi 24 mai 2018, par Amitié entre les peuples

Théologie de la libération et pluri-émancipation.

L’article de M Yasser LOUATI sur Mediapart intitulé « Religion et émancipation » ne manque pas d’intérêt, non pas pour la référence à Tariq Ramadan (indifférence au personnage) mais pour le thème « Religion et émancipation » qui est de fait « islam et émancipation » car l’auteur évoque surtout sa propre religion. Il y a cependant un propos général que je cite :

« Pourquoi émancipation ? Parce que, historiquement, les religions se sont rarement organisées au service des plus démunis ou en faveur de la justice sociale ». Ce n’est pas la seule critique à faire.

 Les niveaux de la critique des religions

Pour nombre de critiques voulant aller à la racine des choses le thème serait plutôt « Religion et aliénation » tant la croyance en Dieu apparait comme déjà très problématique. Un cran au-dessus l’observance des divers dogmes des religions est aussi fort problématique. Mais sur ce second niveau, il faut faire des distinctions en évoquant la théologie de la libération.

Je me situe donc pour ce débat à ce second niveau de critique et pas au premier niveau (celui d’ordre philosophique et épistémologique). Ma critique est donc au niveau social et sociétal et sur le thème de la pluri-émancipation.

 Retour en arrière sur une avancé au sein d’une religion.

La théologie de la libération telle que pensée dans le monde catholique en France jadis - cf prêtres ouvriers - puis en Amérique du sud et centrale visait surtout l’émancipation SOCIALE au sens de plus d’égalité économique via la fiscalité, un code du travail digne de ce nom, et des services publics en capacité de donner une effectivité aux droits-créance : logement, santé, éducation, transport, communication, énergie, etc. Avoir moins de pauvres et moins de riches - via la redistribution des richesse et l’appropriation publique - constituait un ensemble partagé entre marxistes athées et « curés rouges ». On trouve cet aspect-là au sein d’autres religions.

Il y avait aussi une émancipation POLITIQUE pour changer les équipes au pouvoir,trop à la solde des classes dominantes, trop corrompues aussi. Il y avait aussi une libération ANTI-IMPERIALISTE pour « sortir » les divers acteurs - militaires, politiques, économiques et criminels - venus des USA pour soumettre les élites et les peuples-classe aux intérêts des classes dominantes des USA. Là aussi on trouvera une telle dimension dans le monde musulman.

 Des critiques subsistaient et se maintiennent.

On sait que l’on a critiqué alors dans les années 80 au Nicaragua et ailleurs les théologiens catholiques pour leur conservatisme de moeurs, notamment sur le fait qu’ils restaient foncièrement anti-IVG. D’autres points furent reprochés mais je ne les ai plus en tête. Ils pouvaient suivre les positions restrictives du Vatican sur la contraception.

Au-delà des premiers points cités, il faut parler de pluri-émancipation ou de pluri-libération, car l’émancipation est aussi, surtout pour les religions, est aussi du côté sociétal ou pour le dire plus précisément du côté des moeurs.

Il s’agira essentiellement d’une libération des contraintes oppressives des courants intégristes ou fondamentalistes qui pèsent sur les femmes, les homosexuel, les athées (dit mécréants).

Il est choquant aussi concernant une sous-culture musulmane sexyphobique de voir le formatage du corps et de l’esprit par les éléments les plus rigoristes contre les gamines de deux à sept ans et plus.

Enfin la sobriété dans l’affichage de la religion participe d’une politique proximale de paix, de vivre ensemble avec des secteurs élargis, et ce sans vouloir faire supporter à l’autre des affichages identitaires lourds et pénibles.

Cela vaut pour toutes les religions mais il semble bien que la religion musulmane fasse preuve d’un regain d’affirmation identitaire et communautaire. On en a la preuve avec les « campagnes d’hidjabisation » imposée en Algérie et ailleurs par les salafistes et autres intégristes musulmans.

Christian DELARUE