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La laïcité avec la diversité culturelle et le social C Delarue

mardi 28 août 2012, par Amitié entre les peuples

La laïcité avec la diversité culturelle et le social.

Ce texte n’est que la poursuite d’une réflexion sur une thématique complexe. Le temps permet des évolutions dans la pensée, des regards différents, des infléchissements.

 Intégration entre anthropologie juridico-universaliste et anthropologie socio-culturelle.

http://amitie-entre-les-peuples.org/spip.php?article1911

 « La diversité et la gauche ».

http://amitie-entre-les-peuples.org/spip.php?article1570

 Une certaine reconnaissance de la diversité entre assimilation, communautarisme et discrimination positive.

http://amitie-entre-les-peuples.org/spip.php?article883

« La diversité ethnoculturelle est, historiquement, une donnée de base des sociétés humaines » (1). La mobilité des humains est ancienne mais elle est de nos jours encore plus forte. La montée en puissance de mondialisation économique (productive, marchande et financière) - elle-même ancienne - a accompagné une montée en force des migrations . Il y aurait 5000 groupes ethniques dans le monde avec 600 groupes linguistiques pour 190 États (Savidan p15).

« Le brassage des populations est en marche et rien ne l’arrêtera » dit F Héran (2007). Les fans de l’homogénéité à tout prix doivent faire le deuil d’un écrasement des subcultures internes minoritaires comme d’un possible renvoi des étrangers témoignant d’une trop grande résistance culturelle. Il reste donc le devoir d’assurer le « vivre ensemble » dans l’égalité alors que la diversité des cultures est encore plus forte qu’auparavant.

La laïcité a ici une importance capitale mais qui ne saurait devenir la réponse à tout problème. A ce propos, il faut rompre aussi avec l’idée mortifère que cette diversité est rapportable à un « choc des civilisations » entre Orient et Occident qui verrait une supériorité d’un ensemble culturel (occidental) contre un autre (oriental). Il faut rompre avec la logique de camp, le campisme. Dans chaque ensemble se déploie une bataille en faveur de la civilisation contre la barbarie, pour les droits contre les oppressions et dominations. Les français n’ont pas le « gène de la civilisation » pas plus que les femmes ont le « gène du balais » (Annie Delarue). Eux aussi violent les femmes, exploitent les travailleurs, volent le voisin, etc... Partout, il y a besoin d’un droit protecteur des faibles face aux dominants, autrement dit un droit contre le classisme, le racisme et le sexisme.

Le problème de la diversité culturelle est qu’elle a été largement recouverte par la promotion de la Nation fondement en France non seulement d’une « République des citoyens » (Schnapper) - communauté politique - mais aussi d’une « République une et indivisible » - avec écrasement des identités historiques locales -, sans parler ici d’un troisième aspect nommé « République néolibérale » qui accepte paradoxalement (d’où les guillemets) une immense fracture économico-sociale entre le 1% d’en-haut et son peuple-classe (soit les 99% restants). Dans la République une et indivisible il est à distinguer deux aspects l’un positif, l’autre non. Il y a l’aspect économique d’une bonne allocation des ressources sur le territoire dans le triple respect environnemental, démocratique et (multi)culturel. La démocratie française se doit de combattre ce que Trotsky appelait le développement inégal et combiné du capitalisme. En ce sens une certaine centralisation n’est pas condamnable si le débat démocratique fait entendre le point de vue local à l’instance centrale de décision qui en tient compte.

Il est à remarquer que ce « recouvrement de la diversité culturelle » n’est pas total. De fait, les forces de la subculture catho-laique dominante base de la nation française repousse toujours et encore les forces des autres subcultures dominées et « régionalisées » (bretons, basques, corses, etc...) mais aussi les différentes cultures des migrants, des étrangers qui résident durablement sur le territoire national. Face à cette sorte de « guerre identitaire », qui peut être meurtrière, les Républicains nationaux s’emploient à défendre eux la neutralité ethno-culturelle (qui se traduit par l’idée que « tout autre est mon semblable »), une République abstraite (comme le citoyen), calée sur des principes généraux constitutionalisés tels que « Liberté, Egalité, Fraternité » mais aussi « Laicité », « République sociale » ainsi que « République une et indivisible ». C’est ce modèle qui est de plus en plus critiqué, surtout ailleurs tant en Europe qu’à l’ONU. La différence n’est pas contraire à la République. La différence est acceptable et recommandable dans le cadre de l’égalité des droits.

La reconnaissance des peuples autochtone, indiens au Canada et aux USA, maori en Nouvelle-Zélande, aborigènes en Australie est chose ancienne. Elle s’est réalisée non à l’égard des individus mais à l’égard des groupes. Ce type de reconnaissance communautaire a été et sera encore repoussé en France. Les idées de Charles Taylor sur le multiculturalisme conçues pour le Canada sont difficilement transposables au cas français. Mais le discours contre le communautarisme ne doit pas être un alibi pour refuser la reconnaissance de droits culturels aux individus. Il revient alors à l’Etat français d’assurer dans un cadre régional adapté l’exercice des droits d’apprendre les langues dominées (aussi bien le breton que l’arabe), l’histoire des peuples dominés (aussi bien celle de l’occitan que du monde arabe). Quant aux religions, elles relèvent de la société civile, pas de l’Etat. Mais chaque croyant en Dieu a le droit au culte.

Enfin la reconnaissance culturelle ne libère pas de tous les maux. Il faut - pour faire court - un « culturel de gauche » ie tout à la fois social, démocratique et environnemental. Il n’est pas aisé de combiner tous ces aspects tout en étant pédagogue pour tous. De plus, à l’heure ou la mondialisation financière devient féroce, l’ethnicisation du social (pas nécessairement réactionnaire comme le veut la « reductio ad Hitlerum » dominante) vient néanmoins compliquer plus encore la réponse convergente nécessaire des peuples-classe face aux oligarchies financières et aux classes dominantes. C’est pourquoi il faut insérer partout la dimension sociale, y compris dans les revendications de différences. Et la dimension sociale doit s’entendre aussi d’ouverture.

Faire le deuil du socialisme stalinien et repousser le capitalisme productiviste implique d’aller vers un socialisme « arc-en-ciel »ou pluriel qui tienne compte des leçons d’Hannah Arendt (1906-1975) mais aussi d’un écosocialisme respectueux de l’environnement et de la démocratie. Environnement : l’économie verte est une régression mortifère directement issue du poids de la finance et des banques . Démocratie, l’emprise oligarchique freine la démocratisation est qui est le moyen de l’alterdémocratie qui en est le but. En matière de démocratie, il revient au peuple-classe de repousser l’oligarchie envahissante pour créer de l’espace pour le débat démocratique.

Enfin évoquer le peuple-classe en rapport avec la démocratie permet de réintroduire le social. A propos de social et de socialisation, c’est aussi le peuple-classe qui va repousser les privatisations et refonder l’Etat social que les classes dominantes détruisent. La finance est dans une logique mortifère et prédatrice qui détruit les droits sociaux (les DESC) qui sont la chose du peuple-classe. Sa logique destructrice se porte aussi contre la nature. Si une fraction du peuple-classe ne respecte pas la nature, cela est sans commune mesure avec la logique destructrice de la finance.

Christian DELARUE

1) C’est par ce propos que Patrick SAVIDAN ouvre son « Que sais-je ? » sur le multiculturalisme.