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Derrière le peuple, le peuple-classe. C Delarue

mardi 22 février 2011, par Amitié entre les peuples

Derrière le peuple, le peuple-classe.

Faire la promotion du peuple-classe n’a pas été simple. La théorie sent le souffre d’une pratique qui a tort ou à raison respire la révolution. En fait hors de toute exploitation selon les personnes ou le contexte elle met surtout en évidence l’existence d’une classe dominante. Là est sa fonction. Le peuple-classe est l’autre de la bourgeoisie.

Mais les choses changent. La multitude, concept en vogue il y a quelques années, reconnaissait difficilement les couches et classes sociales mais ignorait radicalement le peuple et les peuples. Et voici que celui-ci émerge. Et là ou nul ne l’attendait. Qui ne voit que derrière le peuple c’est le peuple-classe qui est au combat pour une double lutte contre l’impérialisme (externe) et contre le capitalisme (interne).

La notion de peuple-classe a déjà été employée, (quoique très rarement pour ce que j’en sais), par quelques marxistes du Maghreb pour évoquer un peuple qui lutte contre l’impérialisme (seulement). Si cette interprétation est exacte alors elle est à la fois juste et faux. Si on répond que c’est le peuple qui lutte contre l’impérialisme (et pas plus), ce qui est sa définition traditionnelle (1), c’est aussi pour partie une erreur car au sein du peuple ici entendu au sens commun il y a une classe qui résiste au peuple-classe, celle qui profitait de l’impérialisme et que l’on nomme parfois bourgeoisie compradores.

Ou alors on en revient au peuple-classe qui n’est pas tout le peuple. Une pensée qui se veut scientifique-critique a toujours à se battre contre le sens commun. Car, la racine de ce débat répété tient au fait de la prégnance de la définition du peuple comme communauté sur un territoire national (dominant ou non), communauté qui englobe la bourgeoisie et le peuple-classe.

Cette définition-là rabat le peuple sur la nation dans beaucoup de cas. Là ou il y a Etat-nation du moins. A côte de cela il y a le peuple définit grosso modo depuis Bandoung (1955) qui évoque le peuple qui se lève contre l’impérialisme. Mais s’agit-il en fait de tout le peuple d’un pays dominé ou colonisé ? Souvent non.

Pour relativiser cette dispute sémantique il faut noter surtout que tôt ou tard le combat anti-impérialiste devient aussi plus nettement un combat anti-capitaliste et là c’est plus le peuple-classe qui devient pertinent comme notion et comme acteur.

La lutte contre le capitalisme liée à celle contre l’impérialisme suppose un combat de chaque peuple-classe contre sa propre bourgeoisie avec cependant des alliances de classe possibles quoique difficiles et même souvent mortifères avec des fractions « progressistes » de la bourgeoisie (bourgeoisie de déconnexion). Reste qu’il importe de conserver la ligne de la convergence des lutte des différents secteurs et couches du peuple-classe y compris des couches qui disposent le moins de représentants et de capacité d’intervenir dans le rapport de force.

On pourrait dire que c’est là le rôle classique d’un parti communiste au sens générique du terme. Un tel parti se veut en principe le parti de la classe ouvrière ou le parti des travailleurs salariés (ce qui n’est pas exactement la même chose mais les significations tendent à se recouper) mais il s’engage aussi pour emmener à la lutte de libération les autres couches sociales hésitantes. La tradition communiste évoque ici la paysannerie et tout ce que l’on rapporte à l’existence d’une petite bourgeoisie dont le substrat a pu là aussi évoluer. La structuration des classes et couches sociales peut en effet varier selon les marxistes et selon les formations sociales qu’ils étudient mais il n’en demeure pas moins qu’il y a toujours au-delà des variations ce combat fondamental à mener contre la classe dominante, contre sa bourgeoisie. On devrait dire les bourgeoisies car si cette classe est bien unifiée elle aussi diverse quand à ses bases : rentière financière, issu de l’agrobusiness, de l’industrie, du commerce international, etc.

Chrstian Delarue

1) Il(s) se lève(ent) : le peuple, les peuples.
http://amitie-entre-les-peuples.org/spip.php?article1540
Pdf sur LGS
http://www.legrandsoir.info/IMG/article_PDF/article_a12848.pdf