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Une identité nationale-française métissée par l’outre-mer et les colonies C Delarue

lundi 18 janvier 2010, par Amitié entre les peuples

Une identitée nationale-française métissée par l’outre-mer et les colonies

L’existence des colonies durablement liées à l’histoire de la métropole française puis la réalité des territoires d’outre-mer avec leur particularité culturelle a donné à la France un caractère métissé plus ou moins visible en métropole selon les lieux. La France métissée est un aspect réel de la France contemporaine y compris en métropole. Il n’en demeure pas moins qu’en métropole la dominante identitaire est de type « nationale-française » car elle mélange une France ethnico-culturelle et une France citoyenne républicaine. Essai de clarification.

La nation au sens ethnique refait surface quand les « pratiques sociales et historiques sont bousculées » . Je suis ici le propos de Michel Cahen in « Nations et ethnie par temps de mondialisation » (1). Le bousculement est social et culturel mais il tend à prendre une forme nationale . Mais sa racine est sociale et culturelle. Le bousculement est produit par conflit interne et confrontation externe dit M Cahen. C’est en ce sens qu’il faut comprendre la thématique de l’islamisation . Cette dernière a une composante mythique (thème de l’invasion) et sa composante réelle (implantation visible de la seconde religion de France) . Cette islamisation du fait de ses deux acceptions a fait l’objet de débats et d’instrumentalisation idéologico-politique. Aujourd’hui, c’est l’intégrisme islamique, qui sous l’apparition de la question du voile intégral ( burqa et niqab), est perçu comme élément perturbateur assez largement rejeté quoiqu’avec des préconisations variables. C’est là que j’ai émis l’hypothèse que « L’islam intégriste produit en France une cristallisation culturelle identitaire » (2) Ce rejet a été construit. par un processus historique long et court . Le temps court – de la pré-cristallisation identitaire - est relaté dans le texte sus-relaté (2).

En reprenant la summa division de la science politique entre Ethnos et Démos on peut distinguer à propos de la question identitaire une France ethnico-culturelle d’une France citoyenne et républicaine.

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1) La France ETHNOS, ethnico-culturelle :

Cette France-là est celle issue de pratiques sociales de la société civile. Elles renvoient à des types de luttes historiques que l’’intégrisme islamique réactive.

* celle des forces de sécularisation
qui ont renvoyé la religion dominante dans la sphère privée pour la réduire à une subculture chrétienne .Cette subculture n’est pas sans force : elle laisse son empreinte dans la matérialité physique via les églises notamment mais aussi dans la matérialité des pratiques sociales qui implique y compris les athées tel ceux qui vont aux enterrements en église par exemple. Par ailleurs, de nombreux athées en France viennent du christianisme. Ils en ont la mémoire. Un mémoire qui explique au niveau de la société politique les tensions et distorsions entre une France pro laïcité positive et une France de laïcité de combat .

* celle des forces d’égalité des sexes et de libéralisation des contraintes sexuelles
. Il y a ici la marque culturelle de mai 68 et des conquêtes du féminisme mais matinée avec une intégration marchande. Cette combinaison particulière forme une vision égalitaire entre homme et femme pour ce qui est des relations de genre. Le refus du séparatisme, le refus de l’enfermement est largement admis. Tout cela ne signifie pas que le sexisme a disparu. Les violences contre les femmes perdurent.

* celle des droits humains.
La France du peuple se voit volontiers comme patrie des droits de l’homme. Une fraction d’elle est naturellement et légitimement fière de sa tradition de lutte pour le développement des droits humains, sociaux et démocratiques et notamment d’une plus grande ouverture aux migrants, aux réfugiés du monde. Cette réalité est plus présente dans la société civile que dans la société politique . Cette tradition est perturbée au niveau étatique par le sécuritarisme et l’utilitarisme économique dominant.

La cristallisation culturelle identitaire de la société civile a une dimension restreinte. On retrouve ici un aspect oublié des « identitaires de droite » (3) : Il y a outre la contradiction entre société civile et société politique, le clivage propre à la société civile. Les autres forces de la société civile sont socialement conflictuelles du fait des clivages entre les forces de libéralisation financière et marchande et les forces exigeant des droits et des garanties contre la prédation de la classe dominante, contre le déclassement social, la désaffilation du cadre stable d’emploi (précarité-chômage), l’intensification du travail, le mépris du travail non performant.

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2) La France DEMOS, Républicaine citoyenne et sociale.

Cette France-là, différente de la première, tantôt complémentaire, tantôt contradictoire, est marquée par les dispositifs étatiques de type juridiques et administratifs qui structurent
profondément les mentalités des habitants de France pour en faire des individus citoyens, égaux, libres, désaffiliés de toute communauté obligée à l’instar des ordres pré-révolutionnaires. Même les régions les plus riches culturellement (langue, religion, coutumes,..) se sont inclinées face à l’Etat jacobin poussant à l’assimilation culturelle nationale. L’école républicaine a participé aux punitions des enfants bretons parlant breton pendant de nombreuses années. Il n’y a pas que la religion chrétienne qui a du s’effacer . Les fortes particularités régionales se sont adoucies, intégrées, même si on assiste ici ou là à des retours.

La République a du aussi depuis le Traité de Rome s’accommoder de la montée en puissance de l’Europe comme entité de plus en plus imposante. Son évolution néolibérale depuis 1986 (Acte unique européen) est périodiquement contestée par une bonne partie du peuple français soit sur une base nationale, soit sur une base sociale. La dynamique d’ouverture vers l’infra et le supra national est réelle mais comme sous contrôle des élites par le peuple. Ce qui renvoie à un autre aspect de la République.

La France Républicaine contient aussi un ordre social relativement protecteur (dont la sécurité sociale est le symbole) face à la mondialisation capitaliste, à la fois financière et marchande mais aussi face au « retour du religieux » de part sa référence à la laïcité depuis 1905. Cet Etat social est en déclin mais pas abattu. Cependant un Etat policier des « trente austères » (pour le peuple-classe) tend à remplacer depuis 1979 l’Etat social post 1945.

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Retour sur le mixte identitaire national-français. Perspective émancipatrice.

Pour revenir à ce que peut être la matrice nationale-française source de matière à cristallisation identitaire on voit que deux dynamiques complexes de résistance émancipatrice émergent à l’occasion du débat récurrent sur l’islam mais surtout sur sa dérive intégriste.

*L’identitaire d’ordre culturel soucieux de se prémunir sur deux plans : contre l’emprise du religieux, contre la montée des pratiques sexo-séparatistes (enfermement des femmes) (4).

*L’identitaire d’ordre républicain mais avec une demande de dépassement du national sur un mode plus ouvert sur le droit de vote, sur l’emploi, la non discrimination raciste, le respect de l’étranger, de l’immigré, sur le refus du colonialisme et de l’impérialisme. Mais sans accommodement de type intégriste.

Christian Delarue

1) in Contretemps de mai 2003

2 ) L’islam intégriste produit en France une cristallisation culturelle identitaire
Cette cristallisation a été construite et préparée avant de se former fin 2009.

3) Droit du sang ou les identitaires plus loin que Sarkozy

4) Contre le contrôle et l’enfermement des femmes par les intégristes musulmans.