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Travailleurs salariés, travailleurs indépendants, une solidarité à construire. P Ruscassie

lundi 23 février 2009, par Amitié entre les peuples

Travailleurs salariés, travailleurs indépendants, une solidarité à construire. Pierre Ruscassie

Une critique de Pierre Ruscassie du texte de Christian Delarue :
Les indépendants font parti du peuple-classe. C Delarue

samedi 20 décembre 2008

Nous voulons ici produire une brève critique de de la notion de peuple-classe, du moins telle que mise œuvre dans ce texte par son auteur.

Ce que Christian DELARUE appelle « peuple-classe » depuis maintenant quelques années n’est pas une classe sociale (en soi, objectivement) puisque ses deux composantes, les travailleurs salariés et les travailleurs indépendants, ne sont pas soumises au même rapport de production à l’égard des capitalistes et prennent parfois place aux deux pôles d’un même rapport de production (vente et achat de force de travail).

C Delarue militant altermondialiste cherche, au moyen de cette notion de « peuple-classe », à répondre à la question de la solidarité possible entre ces deux classes sociales, mais en ne distinguant pas deux niveaux d’analyse différents (niveau objectif et niveau subjectif) qui permettent d’expliquer cette possible solidarité sans confondre les places occupées qui sont objectivement différentes.

La solidarité possible résulte d’une construction subjective, celle du « peuple de gauche » qui est une « classe pour soi » (subjective), mais pas une classe sociale objective. Elle est définie comme une identité commune à des travailleurs salariés et des travailleurs indépendants par adhésion à des valeurs démocratiques communes et par opposition à une même classe sociale objective, les capitalistes, qui vivent de l’exploitation de la force de travail et de l’exploitation du travail des indépendants (qui alimente les surprofits de monopole). Certains travailleurs (salariés ou indépendants) ne font donc pas partie du « peuple de gauche ».

Il s’agit de comprendre que si les rapports sociaux se définissent par leur matérialité, dans la réalité objective, ils relient des individus, qui ne sont pas des choses passives (comme le sont les objets étudiés par les sciences de la nature). Les humains accèdent à une conscience rationnelle déterminée par leur pratique et leurs sentiments en partie inconscients. C’est pourquoi le déterminisme des sciences de la culture est, selon Marx, avec raison, un matérialisme de la pratique subjective des individus et non un matérialisme mécaniste de l’objectivité matérielle.

Les motivations des individus dans les luttes sociales et politiques ne découlent pas directement des rapports sociaux où ils sont insérés. Mais cette détermination transite par les sentiments identitaires que les individus se sont socialement construits. Ne pas le reconnaître conduit à commettre, par exemple, des erreurs ouvriéristes pour ceux qui réduisent le prolétariat aux ouvriers d’industrie ou des erreurs nationalistes pour ceux qui ne comprennent pas la nature subjective de l’identité nationale et la confondent avec la citoyenneté.

Il dit dans un de ses texte : « Les indépendants forment l’essentiel de ce que les marxistes nomment petite-bourgeoisie, une catégorie encore plus complexe que celle des indépendants. Certains intègrent parmi la petite-bourgeoisie, outre les indépendants, les managers, les cadres supérieurs de commandement. Pour cela ils élargissent l’analyse en intégrant d’autres paramètres au-delà de la simple structure statique des classes sociales. Parler des seuls indépendants est plus simple. » Outre que cette notion de « petite-bourgeoisie » rend mal compte de l’état des travailleurs indépendants et de leur exploitation par la bourgeoisie, ceux qui y intègrent les cadres, accroissent la confusion parce que le rapport aux capitalistes qu’entretiennent les travailleurs indépendants est vraiment très différent de celui qu’entretiennent les cadres. Ceux-ci sont liés par un rapport salarial d’un côté et reliés par un rapport d’encadrement de l’autre côté.

La différence de salaire entre les cadres salariés et les salariés du rang ne modifie pas le rapport salarial mais révèle une différence de rapport de forces : la force de travail ne se vend pas au même prix. L’importance des écarts provient du fait que le prix de la force de travail n’est pas fixé, en moyenne, par une valeur-travail : la marchandise force de travail a une valeur d’échange et une valeur d’usage, mais n’a pas de valeur-travail puisqu’elle n’est pas le produit d’un travail (c’est cette précision qui permet de résoudre le « problème de la transformation » sur lequel avait buté Marx).

Pierre Ruscassie