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Rodinson 1915 : Islam, capitalisme et socialisme. Lequel ?

samedi 31 janvier 2015, par Amitié entre les peuples

Rodinson 1915 : Islam, capitalisme et socialisme. Lequel ?

 Un bref résumé des positions de Maxime Rodinson.

Le centenaire de la naissance de Maxime Rodinson (1) permet de rappeler que l’idéologie musulmane, coranique, comme post-coranique (hadith-s) n’a, selon lui, en rien empêché une évolution de type européen vers le capitalisme. Bien au contraire, cette idéologie, en tenant compte de ses variétés historiques, s’est montré largement compatible avec cette évolution.

Maxime Rodinson affirme, en son chapitre V de son ouvrage « Islam et capitalisme » (1966) que « L’opposition fondamentale de l’Islam au capitalisme est un mythe, que la thèse soit bien ou mal intentionnée » (p. 166) ; quant à l’idéologie, « elle se révèle bien moins puissante à longue échéance que les exigences de la situation sociale, de la lutte des sociétés et des groupes sociaux pour le pouvoir maximum et la maximation des avantages et des privilèges de toutes sortes dont ils jouissent. » (p. 167-8).

Rien n’interdit « qu’il y ait dans l’avenir une voie marocaine, algérienne, égyptienne, arabe, turque, iranienne du socialisme, il est peu vraisemblable que leurs caractéristiques importantes doivent beaucoup à la religion musulmane » (p. 193).

 Quel socialisme ?

Le socialisme ne concerne pas que la mise au pas de la finance et la transformation des rapports sociaux dans l’entreprises. Il ne suffit pas d’aller vers plus de réduction du temps de travail et d’opérer des socialisations d’entreprises. C’est décisif certes. Il ne suffit pas plus de renforcer la « main gauche » de l’Etat et de le démocratiser fortement pour aller vers son dépérissement. Le socialisme se déploie aussi dans un contexte sociétal (le « vivre ensemble »). Il s’accommode mal des discriminations diverses par exemple.

On peut se demander si le « socialisme du XXI » - plus écologique et moins autoritaire que sa caricature stalinienne - peut bénéficier surtout aux hommes et peut se conjuguer avec société patriarcale à dominante sexo-séparatiste forte (2). La réponse ne saurait être que négative. Ce qui ne signifie pas que le socialisme à naître dans les pays musulmans ou à dominante de la religion musulmane doivent se caler sur « la modernité occidentale » et son éthos productiviste, travailliste et consommationniste.

Cependant, il semble pertinent d’affirmer qu’un socialisme non autoritaire ne peut se déployer qu’au sein de sociétés ou la liberté des athées (ou agnostiques et libre-penseurs) et la liberté des femmes sont reconnues dans la diversité de leurs comportements ; y compris en matière de sexualité (possibilité d’être lesbienne librement par exemple) et d’habillement (possibilité de s’habiller sexy, la séduction charnelle étant un plaisir humain historique avéré quoique réprimé ) et ou l’égalité entre hommes et femmes est non seulement de principe au plan du droit mais aussi palpable dans le réel de la société (et relativement vérifiable dans les statistiques et études scientifiques).

La liberté d’expression fait aussi partie de la société socialiste, tout comme un certain niveau de sécularisation matérialisé dans les institutions par un dispositif de laïcité qui préserve les droits de tous et toutes.

Christian DELARUE

1) Maxime RODINSON est né il y a 100 ans en janvier 1915, il est mort en 2004. Pour plus de développements que ce résumé lire ce qu’a pu en dire Georges Labica sur le site Contretemps.

2) Une société patriarcale sexoséparatiste tend à enfermer les femmes à la maison (elles ne sortent qu’accompagnées du frère ou du mari) dans sa version « hard » et à vouloir dans sa version « soft » que les femmes soient très couvertes et sans vêtement près du corps : manches longues, jupe longue, pas de décolleté et souvent le voile sur la tête.