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Peuple-ethnique et peuple-classe. C Delarue

dimanche 1er décembre 2013, par Amitié entre les peuples

Peuple-ethnique et peuple-classe.

La notion de peuple ethnique fait référence à une tradition, une culture
ancestrale inscrite le plus souvent (pas toujours) sur un territoire. Il peut s’agir soit d’une culture devenue dominante et comme en France érigée en peuple-nation dans un Etat Nation soit d’une culture dominée d’un peuple ethnique écrasé par la culture dominante du peuple-nation. La France évoque, en langage administratif (de son Etat), des « régions ».

Mais pour certaines d’entre-elles, il existe bien un peuple-ethnico-culturel dominé encore relativement actif (Corse, Catalogne,
Bretagne ouest, etc...), ne serait-ce que par la langue particulière qui
s’y maintien, sur lequel s’est greffé d’une part un peuple-démocratique
(issu du peuple nation) et d’autre part d’un peuple-classe « régional ». On est en présence d’une situation complexe qui, de par son évolution historique, reflète en quelque sorte le mélange des catégories de « peuple ».

De ce fait on peut trouver selon les époques soit des partis
indépendantistes (de rupture), soit des partis régionalistes contre l’excès de centralisme jacobin (un meilleur aménagement de l’appartement « régional » dans l’immeuble « France » pour reprendre une expression ancienne), mais certains sont socialement et politiquement « de droite » (ie en défense du peuple que si derrière le patronat local), d’autres « de gauche » (défense du peuple-classe local d’abord). Précisons un peu. En effet, la droite politique régionale défendra classiquement d’abord les intérêts de la bourgeoisie « régionale » (ou nationale dominée si indépendantiste) et formera derrière elle un bloc social hétérogène composé de paysans appauvris, de petits patrons locaux et de travailleurs salariés menacés de licenciements. C’est un peu le cas de la dynamique des « bonnets rouges en Bretagne lors de l’automne 2013. Les partis régionalistes de gauche tendent eux à défendre un compromis social qui favorise en principe plus les peuples-classe de la région mais sans cependant oublier de satisfaire certains intérêts de la bourgeoisie régionale. Il y a donc toujours un flou »social« caché par le biais régional national dans ces organisations. Les organisations »régionalistes, vraiment à gauche - troisième type - défendent elles un peuple-classe « régional » tout à la fois contre une bourgeoisie extérieure (jacobine ou « impérialiste » si indépendantiste) et contre une bourgeoisie interne, régionale ou « nationale » sont plus rares.

 Quand la frontière divise un peuple-ethnique.

Les positions politiques peuvent aussi varier de chaque côté d’une frontière qui coupe un territoire historique qui a maintenu sa langue. Ainsi « au sud des Pyrénées, où les langues sont assez bien reconnues, promues, soutenues, défendues, on observe une bourgeoisie catalanophone très engagée depuis plus d’un siècle dans la défense du catalan. Au nord, que ce soit en Occitanie ou dans la Catalogne dite »française« , les langues autres que le français sont très fragilisées, menacées de disparaître rapidement (selon un rapport récent de l’UNESCO). Or, qu’en est-il de la bourgeoisie »occitane« et »catalane« du côté français ? L’analyse de l’universitaire Rober Lafont est sur ce point édifiante. Tandis que dans une Espagne post-coloniale du XIXe siècle, la bourgeoisie catalane n’avait plus rien à attendre matériellement d’un état à la remorque sur le plan commercial international, la bourgeoisie occitane avait quant à elle bien des profits à tirer du rattachement à une France encore très puissante et très coloniale. La différence ne s’est guère faite attendre dans les faits. Tandis que la bourgeoisie sud-catalane s’est impliquée, et ce malgré le franquisme, dans la défense de la langue du peuple catalan, les bourgeoisies nord-catalane et occitane se sont très rapidement identifiées à la bourgeoisie française, laissant leur langue au »petit peuple« , celui des campagnes mais aussi celui des villes. Ainsi, lorsque l’école de Jules Ferry viendra effacer sans scrupule la culture vivante et si riche de la génération antérieure, nul intellectuel, à part Jean Jaurès, ne la défendra, ou si peu, et si mal, et de manière nécessairement trop singulière, trop isolée. » (Franc Bardou)

 Plurinationalité

Dans d’autres régions du monde on trouve des peuples plurinationaux, au sein d’un même Etat. Il y a alors, depuis l’avènement du capitalisme néolibéral, autant de bourgeoisies et de peuple(s)-classe que de peuple(s)-nation. La plurinationalité n’efface pas - ou du moins n’efface plus - le clivage de classe entre bourgeoisie et peuple-classe. Il faudrait ici distinguer les zone rurales des zones de concentration urbaines avec la montée d’un nouveau prolétariat venu de la paysannerie pauvre des campagnes. Si l’on parle des bidonvilles des mégapoles sud-américaine c’est d’un lumpenprolétariat urbain qu’il faut évoqué. Ces mégapoles sont un concentré combiné de « classisme » - fort écart entre classes sociales - (dont le mépris de classe est l’apparence quotidienne) et de racisme structurel (dont le racisme du discours quotidien est aussi l’apparence omniprésente) .

 De la culture aux groupes ethniques

Il peut y avoir au sein d’un même ensemble territorial une pluralité de groupes ethno-religieux et ethno-linguistiques. On évoque la Syrie en ce moment. C’est un bon exemple de cette pluralité avec cependant une nette dominante musulmane sunnite (1 ). L’analyse est alors plus difficile. Il faut arriver à saisir avec relativement de précision le
poids du passé dans les conflits inter-ethniques. Mais l’ethnicité forte ne signifie pas effacement systématique des conflits de classes sociales notamment avec la montée en force du capitalisme néolibéral. On trouve alors une bourgeoisie dans le groupe ethnique dominant et donc un peuple-classe pour ce même groupe ethnique dominant. Mais là ne s’arrête pas cette division. Les groupes ethniques à base religieuse ou à base linguistique ou à base de tradition spécifique peuvent aussi disposer d’un groupe interne dominant, mélange d’une bourgeoisie commerciale ancienne et d’une bourgeoisie d’affaire moderne en lien avec une élite politique

 Le peuple-ethnique dominant en rejet des cultures différentes.

Il y a aussi le peuple-ethnique dominant qui revendique sa domination
face à la montée en interne d’une culture extérieure. C’est la cas en
France de ceux qui se réclament du peuple-ethnique catholique contre les musulmans. On trouve soit une critique de la République de 1789 comme artifice moderne qui cache la longue permanence du peuple gaulois, soit au contraire une revendication d’une République offensive contre l’Islam. C’est le cas ici de Mme Tasin de Riposte laique. Alors que la première référence vient plutôt des groupes identitaires du type Bloc identitaire.

Christian DELARUE

Texte de nov 2011 repris en nov 2013.

1 ) Critique du discours de la « révolution » syrienne (1) : L’Hétérogénéité culturelle de la Syrie par Fida DAKROUB
(NB : Je ne partage pas pour autant les conclusion de l’auteur.)

http://www.legrandsoir.info/critique-du-discours-de-la-revolution-syrienne-1-l-heterogeneite-culturelle-de-la-syrie.html