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Pantalon et voile / seins nus et jupe : le regard et le respect. C Delarue

vendredi 14 août 2009, par Amitié entre les peuples

Corps de femmes, regards d’hommes : sociologie des seins nus

PANTALON ET VOILE / SEINS NUS ET JUPE : LE REGARD ET LE RESPECT.

Le débat sur le voile s’élargit à d’autres vêtements. Pour détourner de la critique particulière du voile islamique certain(e)s ont rapproché le pantalon du voile comme instrument de protection du regard masculin. Le tout pour légitimer le voile islamique.

Ainsi le pantalon ne serait plus porté par confort mais comme voilage. Le fait serait patent pour les femmes qui ne portent que des pantalons et jamais de jupes (à l’exception des jupes très longues). En ce cas les reproches antisexistes faits au voile islamique portent aussi contre le pantalon. Mais est-ce pour autant la même chose ? Je crois qu’il y quelque outrance dans l’assimilation.

Sans plus approfondir ce sujet – qui peut faire l’objet de commentaires divers – posons la question délicate et récurrente du respect maintenu malgré le regard objectivant – dépréciatif ou concupiscent – des hommes. Sachant sans doute qu’il n’y a pas de réponse simple et sûre mais néanmoins des pistes à explorer en vue d’un effort civilisationnel à entreprendre pour améliorer les rapports hommes/femmes.

I – THEORIE : VOIR ENSEMBLE LE CORPS OBJET ET LE SUJET DESIRANT

Lire préalablement “Le machisme insidieux des “mecs lourds” sur le site Bellaciao ou sur ce blog car une partie de ce texte porte sur le regard. http://www.bellaciao.org/fr/article...

Lire aussi : De l’influence prégnante de l’interprétation réactionnaire patriarcale sur les rapports hommes/femmes. (sur chrismondial blogg)

Les lignes qui suivent sont de Valérie DAOUST in De la sexualité en démocratie” Son propos invite à repenser la dialectique corps-objet/femmes sujet.

Il est difficile de penser, en raison de la dialectique de la rationalité, que, derrière la représentation du corps-objet de la femme, il y a un sujet. Même la critique féministe, particulièrement préoccupée par l’objectivation du corps de la femme, reprend la dialectique sujet-objet. Dans les années 1970-1980, on dénonce l’objectivation du corps de la femme, et les rôles limités que celle-ci peut jouer au sein de la société justifient ces critiques. Les rôles de la femme dans la société s’étant multipliés, on ne peut plus penser l’activité de la femme et la représentation de son corps comme étant uniquement déterminées par des forces extérieures à elle-même sans du même coup la réduire à un « agent » passif auquel on ne reconnaît pas le sujet qui s’autodétermine.

Le problème concerne tout particulièrement les adolescentes : on arrive difficilement à leur reconnaître une sexualité active puisqu’elles se présentent, selon la dialectique traditionnelle, comme objet de désir (vêtements sexy, par exemple), associé à la passivité. On a du mal à voir et à reconnaître que derrière cet « objet », il y a un sujet de désir.

Un certain courant de pensée qui voit le jour dans les années 1990 commence à redécouvrir le concept de girl power, le pouvoir du corps et du sexe. Il est clair qu’il faut repenser la dialectique sujet-objet : c’est peut-être que la femme rationnelle ne s’est jamais « résolue à considérer son physique comme un qualité inhérente à sa personne, mais comme une sorte d’avatar qui lui serait fondamentalement étranger » (1) . A l’instar de Maurice Merleau-Ponty, il faut résolument penser le corps « l’existence figée ou généralisée » et l’existence comme une « incarnation perpétuelle » (2)

Derrière l’objet il y a donc un sujet, et il y en a toujours eu un, mais non pas dans le sens qu’il y a toujours eu un sujet qu’il faut enfin reconnaître pour le faire passer du statut d’objet à celui de sujet : il y a toujours eu un sujet qui dans les faits s’est exprimé, bien que dans l’ordre de la représentation, ce sujet ait été réduit au rôle d’objet. (fin de citation)

II – PRATIQUES SOCIALES PROGRESSISTES : SEINS NUS ET JOURNEE DE LA JUPE !

Ayant déjà écrit sur le port constant du voile comme mépris des hommes concupiscents et des femmes occidentales dépravées j’y renvoie avant de passer à d’autres situations, l’une concerne la sociologie de Jean-Claude Kaufmann (1) sur les seins nus sur les plages, l’autre sur la journée de la jupe dans les collèges et lycées.

Ici le mépris ne répond pas au mépris. Mieux le respect se développe dans la vérité – relative – de la différence des sexes.

A) SEINS NUS SUR LA PLAGE : RESPECT

Commençons par le comportement des femmes et des hommes sur les plages ou le sein nu est pratiqué :

Les seins nus ne seront possibles à la plage que parce qu’on ne se touche pas, qu’on ne se parle pas, parce que l’échange entre celle qui se donne à voir et celui qui regarde en reste strictement à ce stade, dans l’anonymat complet.

La pudeur non pudibonde sera de deux sortes :

d’une part cette capacité du regardant à voir sans voir, à banaliser ce qui est vu, de telle sorte que le sein se trouve privé de particularités ;

d’autre part la capacité de la femme à sentir si ses seins correspondent aux normes de la plage.

Ici l’homme n’est pas renvoyé à l’enfer de sa biologie prédatrice et la femme à une nécessaire abstinence de séduction à une obligation de sobriété vestimentaire pudique afin de maintenir l paix dans les rapports hommes/femmes.

On peut penser que la banalisation masculine est toute relative . On peut aussi critiquer ce retour d’une « norme corporelle » sur la plage (ne pas montrer des seins trop plats ou trop gros) . On peux aussi penser que toutes les femmes ne suivent pas cette norme implicite, reste qu’un respect se créé entre hommes et les femmes sur la plage.

B) JUPES COURTES ou STRINGS APPARENTS AU LYCEE : UN TRAVAIL CIVILISATIONNEL EN COURS

Ce respect disparaît au collège ou au lycée dans la mesure ou les jeunes filles ont quasiment cessé de porter des jupes (sauf des jupes longues) pour ne pas encourir les propos sexistes des jeunes hommes mais aussi des filles. Les filles et les femmes font preuve d’une sévérité étonnante et inadmissible – « tu fais la pute ! » contre les jeunes femmes qui s’habillent de façon séduisante, qui portent des jupes courtes ou des strings apparents.

Une réaction salutaire a été organisée dans un établissement d’Ille et vilaine : la « journée de la jupe » qui se répète chaque année qui vise à sensibiliser les jeunes garçons et les jeunes filles au droit à s’habiller librement sans subir d’injures. S’habiller réellement librement se comprend avec le droit de non respect d’une norme historique religieuse et patriacale de pudeur extrême interdisant d’être séduisante, « affriolante ».

Le string fait l’objet d’une stigmatisation intense dans certains pays. Que la femme puisse vouloir séduire ainsi n’est pas toléré ni par certains hommes ni par certaines femmes mais pour des raisons différentes.

Pour conclure provisoirement :

Ces quelques lignes montrent assez la nécessité de promouvoir d’autres rapports entre hommes et femmes en luttant radicalement contre le viol, le harcèlement sexuel et “le machisme insidieux des mecs lourds” . Pour mener à bien cette tâche il importe que soit reconnu la liberté de séduire franchement et de s’engager librement une relation sexuelle sans passer par le mariage. Par contre il convient de rappeler au pape que le préservatif est une protection essentielle. Et il ne s’agit pas non plus de défendre seulement les rapports hétérosexuels.

Christian DELARUE
chrismondial blogg

1 Corps de femmes, regards d’hommes : sociologie des seins nus par Jean-Claude Kaufmann