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Oligarchie, mafia et décomposition sociale. C Delarue

mardi 30 octobre 2012, par Amitié entre les peuples

Oligarchie, mafia et décomposition sociale.

Sur Daziboueb et blog Médiapart Christian DELARUE

Sonia Mitralias

Le contenu de billet est nourri des conférences de Sonia Mitralias sur la situation en Grèce et de Judith Morva sur la Hongrie. Il n’y a plus d’Etat social en Grèce dit Sonia qui a évoqué la montée de la mafia en Grèce, soit un phénomène politique particulier, bien connu en quelques lieux, mais fort peu connu de façon générale.

Effectivement, il ne suffit pas de dire classiquement que l’Etat social disparait au profit d’un Etat policier. Jamais la police n’arrivera à faire régner « l’ordre » en l’absence d’Etat social. D’autres forces viennent compléter le travail policier pour insuffler la peur et la soumission. Ce peut être une Eglise particulièrement réactionnaire comme dans les dictatures du sud de l’Europe jadis : Portugal de Salazar, Espagne de Franco, Italie de Mussolini, Grèce des colonels. Mais avec la sécularisation des sociétés, il faut plutôt remarquer le poids des mafias.

Judith Morva

La déliquescence de l’Etat social et de la démocratie a fait apparaitre sur la scène politique le fait oligarchique. L’oligarchie politico-financière, pour assurer son pouvoir et sa domination, ce mélange des genres que l’on nomme « gouvernance », fait appel d’une part aux médias dominants qui sont de véritables appareils d’influence idéologique, et ce pour gagner le consentement populaire des masses . Elle fait aussi usage de la police pour le volet répressif. Le citoyen est donc pris en étau dans une stratégie qui oscille entre des pseudos reconnaissances symboliques et de la répression ouverte, le plus souvent en commençant par les marges, les Roms, les migrants, mais aussi en ciblant centralement les fonctionnaires des services publics. In fine cette stratégie « de la carotte et du bâton » frappe l’ensemble du peuple-classe avec ses institutions. C’est alors que l’on peut parler de stratégie du chaos, tant les inégalités sont profondes et la décomposition sociale avancée.

Mais, ce qui est généralement sous-estimé c’est la montée du fait mafieux. Les mafias se développent avec les insécurités tant dans le champ social et économique que sous l’aspect du vivre en sécurité sans agression. Il faut compter aussi avec la montée des partis fascistes. En Grèce le parti nazi, fait sa loi sans être véritablement gêné par la police officielle. La corruption favorise autant que l’inversion démocratique et sociale la montée des mafias.

« La Grèce et l’Espagne comptent parmi les pays européens les plus touchés par la crise et ils sont aussi littéralement gangrénés par la corruption et le crime organisé. C’est pourquoi ils constituent deux exemples révélateurs des liens qui se nouent entre mafia, finance et crise, estime Saviano, qui consacre une large partie de son enquête aux deux pays. » (1)

Ainsi, plus l’oligarchie politico-financière prend de la place et du pouvoir dans l’Etat et la société civile et plus la démocratie et le social se réduisent. C’est un processus lié au néolibéralisme qui se manifeste dans quasiment tous les pays occidentaux depuis vingt ans. Il est remarquable dans les pays du sud de l’Europe frappés par la crise et surtout par la gouvernance austéritaire de la troika.

La démocratisation comme implication par le débat politique et le vote de plus en plus de citoyens est un processus de longue durée qui s’est établi difficilement au cours du XIX et XX ème siècle . Il n’était pas, loin de là, arrivé à son terme avant le retournement néolibéral. Démocratisation et lois sociales vont de pairs, ce qui ne signifie pas absence de discordances dans le processus. Le mouvement ouvrier a beaucoup oeuvrer à la démocratisation des sociétés et des Etats. Dans le même temps des lois sociales ont été conquises. Après la seconde guerre mondiale, la Sécurité sociale et les services publics se généralisèrent.

L’article cité plus haut - Mafia et finance : la crise favorise les liasons dangereuses - montre non seulement que les mafias se nourrissent de la chute des Etats sociaux mais que de plus il y a un lien plus direct entre financiarisation de l’économie et mafia. Il est donc important de ne pas oublier cet aspect et de se mettre à étudier la mafia, du moins pour les sociétés qui avaient jusqu’alors éviter la montée de ces phénomènes.

En tout état de cause, on ne saurait limiter trop facilement le phénomène mafieux au sud de l’Italie (2) ou ce système perdure voire se renforce.

Christian DELARUE

1) Mafia et finance : la crise favorise les liaisons dangereuses

La crise financière a donné l’occasion aux réseaux mafieux de s’infiltrer davantage dans l’écomomie mondiale, en investissant du liquide dans les banques européennes et américaines. C’est ce que démontre Roberto Saviano, l’auteur italien de Gomorra, dans une longue enquête qui suscite de nombreuses réactions.

Lucie Geffroy | 30 août 2012

http://www.courrierinternational.com/revue-de-presse/2012/08/30/mafia-et-finance-la-crise-favorise-les-liaisons-dangereuses

2) Les liens ambigus entre la mafia et certains élus italiens inquiètent le gouvernement
http://fr.euronews.com/2012/10/10/les-liens-ambigus-entre-la-mafia-et-certains-elus-italiens-inquietent-le-/