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Note sur « Nous les Allemands » de Matthias Matussek

samedi 1er septembre 2012, par Amitié entre les peuples

Note de Christian Delarue sur « Nous les Allemands » de Matthias Matussek

L’ouvrage (Ed Saint-Simon 2007) démarre par une opposition qui traverse tout le livre : Considérations liminaires sur les raisons pour lesquelles nous, les allemands, sommes des gens remarquables et pour lesquelles les Britanniques en particulier devraient nous laisser tranquilles.

La bourgeoisie britannique parle d’elle en évoquant la nation et la bourgeoisie allemande fait de même. Le « nous » cache les clivages internes qui apparaissent secondaires sur les 350 pages du livre. Une nation s’oppose fatalement à une autre. Que les allemands soient fiers de grands musiciens, de grands philosophes n’est pas gênant. Mais Mozart est opposé aux italiens. Il ne semble pas y avoir de nation en soi fier de soi sans volonté de supériorité sur une autre nation ou plusieurs.

Il y a aussi dans ce livre le refus de voir ce qui peut faire grave conflit interne. Merkel ressemble à Thatcher en ces temps de néolibéralisme. Elle déploie un management viril et anti-social bien nécessaire à la domination de classe en Allemagne et en Europe. Cela plait à certains pas à d’autres. Il ne faudrait pas lire une « mentalité germanique » sous celle d’Angela Merkel que l’on connait assez peu par ailleurs. Notons ici quand même qu’elle est originaire de RDA et qu’elle est chef du gouvernement allemand depuis novembre 2005. Le reste est accessible aisément sur le web.

Évoquons deux thèmes importants de l’histoire allemande sans remonter trop loin. L’Allemagne perd ses colonies - elle en avait peu - à la fin de la première guerre mondiale. Mais c’est loin surtout à cause d’une histoire encore plus tourmentée et plus récente.

1 - Sans doute les allemands ont-ils mal vécu les années d’après-guerre à cause du nazisme d’abord, puis à cause des occupations militaires. Mais qui a pu mettre le nazisme au bilan négatif de tous les allemands sans distinction ? Des nationalistes bornés. Dans cette logique, on devrait alors faire de même pour les français avec Pétain, de même pour les italiens avec Mussolini, pour les portugais avec Salazar, pour les espagnols avec Franco, pour les grecs avec le régime des colonels, etc...

2 - Sans doute la réunification de l’Allemagne de l’Ouest avec l’Allemagne de l’Est a-t-elle été ambiguë faite tout à la fois de joie et de désamour relatif notamment à cause de volontés contradictoires de nombreux allemands de l’Est, à cause du désir de liberté et de confort mélangé avec un désir de « social » qu’ils sentaient en voie de désagrégation sous l’effet du néolibéralisme montant. Ce qui nous ramène au présent.

Aujourd’hui l’oligarchie allemande derrière A Merkel a des volontés de meneuse des affaires de l’Europe. En ce sens, la gouvernance économique européenne (TSCG, MES, règle d’or, et autres dispositifs austéritaires et antidémocratiques) serait « sa chose ». Mais faut-il voir derrière cette appropriation illégitime un fait à rapporter à tous les allemands ? Non ! Le peuple-classe allemand doit-il être fier de cette aventure anti-sociale et anti-démocratique ? Pas plus. Certains allemands le sont certes. Comme des français ont pu être fiers de N Sarkozy.

Poursuivons dans la foulée avec un article économique de 2010 : Les Allemands : Mais qu’ont-ils de plus que nous ?de Patrick Chabert

Les allemands ont un gros PIB (produit intérieur brut), un fort taux de croissance. Plus gros que les autres pays européens. Rectification : l’économie allemande a un gros PIB . Admettons . Reste que la question essentielle, sauf à fétichiser un indice économique, est de savoir si cette richesse est bien distribuée entre toutes les couches sociales de la société allemande. Il n’est pas mauvais de savoir aussi la part de l’économie marchande et de celle non marchande. Si la bourgeoisie allemande s’approprie le gros de la richesse produite, le peuple-classe allemand n’aura guère le sentiment d’en être fier.

Une nation peut disposer d’un plus petit PIB et bien le répartir ce qui entrainera un soutien au régime de son peuple-classe qui, n’en doutons pas, aura sans doute grandement participé à cette relativement bonne répartition. Cela se nomme lutte de classe. Une grossièreté.

Christian DELARUE