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Note sur « Le livre noir du management » d’Isabelle BOURBOULON. C Delarue et T Le Goaziou

samedi 30 avril 2016, par Amitié entre les peuples

Note de lecture 30 dec 2011

Le livre noir du management d’Isabelle BOURBOULON.

Bayard Editions - Sortie le 22/09/11.

La démonstration de « l’imposture managériale » précède une seconde partie portant sur les résistances et les actions possibles pour sortir de
l’horreur managériale. Bien qu’écrit à deux mains, nous suivrons ce
parcours à en indiquant les principaux auteurs rencontrés par l’auteure.

Les références seront sommaires et toutes ne seront pas citées.

La première partie commence par la critique la plus connue des toutes premières théories « scientifiques » du management, celle de Taylor puis de Fayol. Elle passe ensuite à la critique du management dit humaniste de Mary Parker Follett (1868 -1933) et de Georges Elton Mayo (1880 - 1949). La première réhabilite une vision positive du conflit et le second met l’accent sur l’importance d’un bon climat psychologique. Il faut citer dans cette filiation Kurt Lewin et Maslow. Mais ces préconisations qui pour certaines ne manquent pas d’intérêts ne survivront pas au « règne du chronomètre » (N Hatsfeld) dans les ateliers puis dans les bureaux. Lire ici Le temps nous est compté.

En réponse à cette intensification du travail un « management participatif » va émerger pour assurer la légitimation des objectifs de l’entreprise. Riboud va ainsi s’appuyer avec un certain succès sur la CFDT dans cette perspective. Mais les limites apparaissent crument dès lors que l’individualisation apparait comme un tête-à-tête trompeur face aux directions. Lire ici H Vacquin.

La méritocratie lutte des places sont alors instrumentalisées aux fins de satisfaction des objectifs de l’entreprise puis ceux des actionnaires lors de la montée en puissance de la finance. Les administrations publiques connaissent aussi ce management adoubé par la stratégie de Lisbonne (mars 2000) sous la dénomination de New Public Management .

Dans tous les cas ce sont les travailleurs salariés qui vont en souffrir de plus en plus. Lire ici La société malade de la gestion de Vincent de Gaulejac et F Palpacuer Regard critique en science de gestion. Autre aspect : la priorité du contrôle managérial va d’abord être mise sur lesprocèdures avant de passer - en 1998 dit l’auteure - sur celle des résultats. I Bourboulon s’appuie sur ce qui s’est mis en place dans l’Education nationale et dans les Hôpitaux. La LOLF a accrue ce changement ainsi que le système des primes aux résultats (la PFR). Lire la critique du rapport Difenbacher.

Le « lean manufacturing » (ou « management sans gras » ce qui est de suite plus explicite) est une méthode issue du toyotisme (Ohno) qui permet de dégager de forts gains de productivité en ce centrant sur les besoins du client. La qualité n’est pas toujours au rendez-vous puisque Toyota a du rappeler 8 à 9 millions de véhicules depuis l’automne 2009 ! De plus les besoins du client vont souvent contre ceux des travailleurs. Les conditions de travail en « lean manufacturing » sont très dégradées. Cette théorie estime que c’est à l’entreprise - entendez les actionnaires, la direction et moindrement les cadres - que revient le produit final et pas aux « opérateurs » qui ne bénéficient donc d’aucun retour en rétrocession. Les salaires stagnent et le pouvoir d’achat est réduit chez les travailleurs prolétaires qui subissent la sous-consommation quand les actionnaires s’enrichissent eux fortement et s’adonnent à la surconsommation.

La souffrance au travail prend des formes liées aux injonctions organisationnelles non soutenables : sentiment d’échec face aux objectifs non atteints, culpabilité d’avoir du enfreindre les procédures préconisées. La reconnaissance du travail effectué est loin d’être au rendez-vous tant les exigences sont fortes.

Quant au management par la qualité, il est parfois source d’abus du fait de critères flous d’évaluation des comportements. Les tribunaux commencent à sanctionner de tels critères. Affaire Wolkers Kluwer France.

La seconde partie porte sur « Résistances et actions ».

Du côté des salariés, les résistances à l’hégémonie managériale consistent à exprimer les contradictions sur le travail.

Du côté des cadres et dirigeants il existe une formation à l’alter management promu par Ève Chiapello et Karim Medjad à HEC Paris. Lire HEC sur la piste du management alternatif

http://archives.lesechos.fr/archives/2006/LesEchos/19582-66-ECH.htm

Ces interrogations débouchent sur d’autres champs d’activité comme l’Economie sociale et solidaire (ESS) avec des entreprises fonctionnant plus sur la coopération. Mais ce secteur est influencé par le champ économique dominant. Il en copie les défauts comme le cloisonnement des entreprises et une certaine hiérarchisation.

Du côté syndical on trouve l’investissement dans les instances de prévention des risques psychosociaux mais aussi chez certains syndicats la volonté de transformer les rapports sociaux internes à l’entreprise. Cela suppose une démarche de syndicalisation chez les cadres qui est encore très insuffisante. Le changement des rapports sociaux en interne est à articuler avec les changements à enclencher en externe. Il n’est pas neutre, que se diffuse dans la société telle ou telle conception du travail . Le refus ferme et serein du travaillisme, de l’intensification du travail de l’allongement des journées de travail lié au partage du travail et donc à la RTT. L’internationalisation de cette option « non travailliste » est nécessaire contre le « toujours plus » managérial. Autre thème d’articulation entre interne et externe : le refus de la financiarisation. F Lordon propose ici quelques pistes.

Christian DELARUE - Syndicaliste membre d’ATTAC France

Thierry LE GOAZIOU - CGT Finances publiques 35 - élu CHSCT