Accueil > Altermondialisme > Contre la marchandisation ? > Contre la marchandisation de la force de travail. > Contre le travaillisme, le précariat et le chômage. > Note sur « La politique du travail » de Guy THUILLIER

Note sur « La politique du travail » de Guy THUILLIER

dimanche 2 juin 2019, par Amitié entre les peuples

Note sur « La politique du travail » de Guy THUILLIER (1932-2019)

L’ouvrage date de 1981 et les données chiffrées sont pour partie obsolètes. L’auteur (1) venant de décéder à 87 ans en mars 2019 j’ai réouvert ce vieux « Que sais-je ? » abondamment surligné et annoté jadis comme étudiant en droit, notamment en droit du travail.

Juste quelques lignes.

La ligne de cette politique de l’emploi et du travail ne relève pas des rapports de force même si ces derniers existent. Elle n’est pas non plus subordonnée à la politique économique même si l’auteur s’emploie à poser toutes les contraintes économiques qui pèsent sur elle. Sans ignorer ni les rapports de force entre patronat et syndicats de travailleurs ni la crise économique (ralentissement de l’activité à partir de 1974 avec montée du chômage) qui surgit, cette politique de l’emploi et du travail existe. Elle a en quelque sort son couloir d’intervention !

Le contexte est celui de la montée puissante du chômage. Quelques chiffres : de 757 000 demandeurs d’emplois en avril 1975 on passe à 1 017 000 en avril 1977, puis 1 400 000 en avril 1979 et enfin (à la date du livre) 1 645 000 en avril 1981 (juste avant l’arrivée de F Mitterrand comme Président).
Le chômage est alors indemnisé à « guichet ouvert » mais rapidement deux problèmes liés apparaissent : le cout de l’indemnisation et, au regard des montants en augmentation, la nécessité du contrôle de la recherche d’emploi. Le problème reste la tendance lourde vers le chômage alors que faire ?

Et l’on voit ici que pour l’auteur, à l’époque (il a pu changer de position depuis), si on ne veut pas de la thèse à la Spencer "lois sociales comme fardeau (2) à jeter pour survivre » en temps de crise, il y a nécessairement une politique de l’emploi et du travail à mener. Elle s’appuie à l’évidence sur tout un appareil d’analyses et de statistiques. C’est l’aspect scientifique du travail qui justifie l’existence d’experts au Ministère du Travail en plus des juristes spécialisés.

Mais il n’y a pas que cela puisque des enjeux doctrinaux perdurent au-delà des chiffres. Le premier débat porte sur la négociation et l’encadrement des rapports de force, puisque « l’Etat ne peut tout faire". L’Administration pose une trame pour les négociations afin de parvenir à un accord . L’idée de l’accord nécessaire vient du cout élevé d’une secousse sociale prévisible . Guy Thuilier était aussi historien et n’ignorait pas ce rapport entre négociation bi-partites et crise sociale en cas de non accord. L’existence de la pluralité des syndicats et des syndicalismes est à prendre en compte pour trouver un accord. Le recentrage de la CFDT est cité.

Le second débat porte sur la réduction du temps de travail et l’aménagement du travail en lien avec la compensation salariale. Le rapport de force est d’emblée plus global sur cette question mais une concurrence entre syndicats existe toujours et permet de tracer une politique combinant réduction et aménagement du travail . L’enjeu est aussi « politique » car il recoupe pour partie une opposition politique entre droite pro-patronale et gauche de lois sociales protectrices du monde du travail. Mais là encore la gauche est divisée. Une politique du travail trouve à se déployer dans cet espace.

Il y a encore bien d’autres aspects développés dans ce Que-sais-je ? : La politique de placement (des chômeurs) qui concernait l’ANPE de l’époque (rapport Farge). La politique de formation professionnelle : AFPA. Celle d’orientation professionnelle (Sullerot 1980). L’emploi des immigrés est aussi pris en compte. La place des inspecteurs du travail. Le champ est vaste.

Christian DELARUE

1) L’auteur sur :
https://fr.wikipedia.org/wiki/Guy_Thuillier

2) « Fardeau aujourd’hui trop lourd pour notre économie » écrit-il page 18 Depuis 40 ans les dirigeants de la dite « économie » ne cessent-ils pas de jeter petit à petit , négociations après négociations, conformément à une « politique de petits pas » les conquêtes sociales d’après-guerre ?