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Les nouveaux modes de consommation pas si nouveaux ? Patrice BOUILLON - SN INDECOSA-CGT

mercredi 2 septembre 2020, par Amitié entre les peuples

Les nouveaux modes de consommation pas si nouveaux ? Patrice Bouillon SN INDECOSA CGT

Mais des attentes “nouvelles” ?
Tout comme le phénix renait de ses cendres, le capitalisme se régénère à travers les crises qu’il engendre. Selon Schumpeter (destruction créatrice), il en découle des découvertes scientifiques et des innovations technologiques qui participent à son renouvellement permanent. Cette “dynamique” influe sur les individus, la société.
Ces changements contribuent à l’émergence de “nouveaux” modes de consommations prenant en considérations les dégradations causées par le système capitaliste. Dans ce contexte, les consommateurs ne veulent pas rejeter leurs besoins de consommation. Ils affirment leurs volontés de consommer autrement et n’admettent plus d’être considérés comme des “cibles mercantiles“.
Dans ces mutations, les catégories socioprofessionnelles, les revenus des familles sont déterminants. Les consommateurs obligent donc les entreprises à répondre à leurs changements de comportements et à leurs attentes. Ils diversifient leurs points de ventes physiques et virtuels pour adapter leurs zones de chalandises. Le poids économique de la consommation est considérable. En France, il représente un peu plus de 70 % du PIB. Dans le même temps, les consommateurs tentent de dépasser les seuls critères utilitaristes de la consommation imposée. Le patronat a également la volonté de maîtriser l’utilisation de leurs temps qu’il soit hors ou dans le travail. Il s’agit pour lui de capter le maximum de profits et d’en conserver la maîtrise.
Toutefois, les consommateurs recherchent dans leurs actes d’achats le plaisir, la frivolité, la nouveauté, l’éthique et les produits naturels. Avec l’exigence que leurs besoins fondamentaux de consommations soient facilement accessibles économiquement, physiquement et/ou virtuellement. Aussi, leurs choix peuvent se classer en trois orientations :
• Des produits de bases améliorés et/ou de nouveaux produits.
• Les produits dits « tendances » considérés comme l’idéal à se procurer.
• L’accès facile aux entreprises de services et aux services publics.

La place prise dans nos vies par le tertiaire avec l’urbanisation, est l’élément marquant de ces mutations. Le poids des dépenses alimentaires et d’habillements diminuent considérablement au profit des dépenses de transports, de logements, des loisirs, de santé. Ainsi, la part du marché des services représentait 40 % en 1960, elle est aujourd’hui de plus de 60 % (INSEE). Autre changement, les français dépensent moins directement leurs argents. Ils utilisent d’avantage les emprunts, les loyers, les abonnements, les locations...

De la classe dite moyenne à la différenciation des modes de vies.
La formation de la classe dite moyenne dans les années 60 est le moteur de la volonté des consommateurs d’une autre consommation. Cette classe à son apparition se tourne vers les mêmes achats. Notamment, ces éléments importants qui concourent à la libération des femmes : le lave-linge, le lave-vaisselle. Ce changement est identique pour les loisirs avec la télévision et aujourd’hui le multimédia. C’est le début d’une société identificatrice qui conduit à la standardisation des modes de vie comme le montre Emmanuel TODD. Leur manière de consommer est en accord avec la structure familiale type couple avec enfants. Les familles recherchent un logement spacieux, une mobilité automobile et une proximité aux établissements du quotidien. Les serviteurs du capital ont imposé la grande supercherie permettant d’éluder la lutte des classes : la classe moyenne, l’image de la consommation de millions d’individus soit la ménagère ou la femme au foyer de moins de 50 ans.
Toutes les composantes de la société française sont impactées. Sauf bien entendu les 10% les plus riches. Cela a contribué à morceler la représentation de la classe moyenne, à fissurer l’image de la famille couple enfant pour laisser place aux familles recomposées, monoparentales et à l’homoparentalité. Dans le même mouvement le nombre de femmes et d’hommes vivants seuls tend à devenir la norme. C’est le temps du développement de la différenciation des modes de vies, de la société atomisée, de la solitude où chacun vit dans sa bulle.

Le progrès social en trompe l’œil.
Karl MARX en 1857, dans les Grundisse nous invite à porter notre réflexion sur le fait que le temps de travail cesse d’être la mesure de la formation de richesses. Il pointe qu’il y a derrière un ensemble de producteurs singuliers, un individu social au travail. MARX définit cet individu social comme celui qui possède un cerveau social. Il veut dire par là que plus la production met en œuvre une intelligence collective faite d’incessantes innovations scientifiques, techniques et artistiques sont ces forces productives générales du cerveau social. Elles sont absorbées dans le capital face au travail. En d’autres termes, le capital jouit de la faculté de s’approprier toutes les innovations pour les faire fructifier en vue de produire des objets nouveaux, voire inédits pour en tirer le maximum de profit.
L’intelligence du capital a été conceptualisée en 1870 par Léon. Il pointe que la valeur d’un objet ou d’un service est définie par la demande du consommateur. Par cette inversion, le capitaliste a réussi ce merveilleux tour de passe-passe, contraindre le salarié à autoréguler le paiement de sa force de travail, ses conditions de travail en un mot son auto-exploitation. Parce qu’il est à la fois producteur et consommateur. Plus largement le capitalisme a transformé le citoyen en consommateur. Le capital peut donc en réduire son temps de travail sans dommage pour sa création primitive de valeurs, de richesses, bien au contraire.

La centralité du travail.
Avec la réduction du temps de travail se télescope la baisse du pouvoir d’achat. Ainsi, plusieurs tendances de consommation apparaissent notamment le fait-maison (la cuisine, le bricolage, l’entretien et réparation automobiles, le jardinage urbain et rural, etc.). D’autre part sont également plébiscitées les ventes de produits bio, les ventes privées, le sur-mesure, l’occasion, les achats groupés, les circuits courts, le troc etc. Mais les ventes promotionnelles, les soldes, ont de moins en moins d’attraits car accessibles en permanence sur internet.
Aussi c’est la conjonction du “temps libéré” et de la baisse du pouvoir d’achat qui est source d’un changement des modes de consommations. Les luttes expriment le besoin d’augmenter les salaires et les pensions. Elles portent également l’exigence de la sécurité sociale professionnelle pour mettre fin au chômage et garantir le salaire tout au long de la vie.
Elles soutiennent le nécessaire partage des richesses produites par cet élément central de notre société, le travail, en changeant les modes de productions.

Pour sortir d’une économie des désirs, fabriqués par les industriels pour aller vers une économie des besoins soit l’alimentation, la santé, l’éducation, la culture, le logement, les transports avec leurs gratuités. INDECOSA-CGT est l’association qui permet d’agir à la fois comme travailleurs et consommateurs pour un changement drastique de la société et sortir du chantage du capital : Si tu ne consommes pas suffisamment, tu te licencieras toi- même ...

Patrice BOUILLON Secrétaire national d’INDECOSA-CGT