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Le maintien d’une dimension populiste-classiste dans le discours politique. Christian DELARUE

samedi 1er septembre 2018, par Amitié entre les peuples

Le maintien d’une dimension populiste-classiste dans le discours politique.

« Maintenir une dimension populiste reviendrait à se soucier un tant soit peu d’hégémonie ou plutôt de contre-hégémonie face à l’hégémonie existante » . Fabrice Flipo, philosophe et altermondialiste explique (1) qu’ « une opération hégémonique dans le fond est une opération populiste dans le sens précis et non vulgaire du concept  » (selon Laclau et Mouffe) . Il ajoute : « Le sens vulgaire renvoie principalement à deux dimensions : la démagogie (un populiste est quelqu’un qui dit à ses électeurs ce qu’ils ont envie d’entendre) et la propension des populistes à passer en-dehors des cadres établis de la politique (les partis, à petite échelle, ou l’état de droit, à plus grande échelle, comme pendant les révolutions) » .

Fabrice Flipo, toujours, a écrit dans un autre texte dans l’Humanité (2) que « le populisme peut également poursuivre d’autres buts que ceux de l’émancipation  ». D’ou la distinction classique entre populisme de droite et populisme de gauche. Une distinction qui reste insuffisante et critiquée largement désormais mais qui perdure.

Le populisme de gauche aurait bien, à la différence du populisme de droite, une dimension d’émancipation mais trop souvent réduite, à lire les critiques, au « classisme » (à savoir la domination de la classe dominante contre le peuple-classe). Il serait plus discret sur la résistance aux autres oppressions : racisme, sexisme, intégrismes religieux. C’est là la principale critique faite au populisme par la gauche. Elle est évidemment d’importance.

La solution consiste a réintroduire le projet politique ou le programme politique, lequel, d’un point de vue de gauche, doit mobiliser la pluri-émancipation autrement dit la diversité des résistances. Mais faut-il pour autant abandonner toute dimension populiste dans le discours politique ? Faut-il, pour être plus explicite, ne plus s’adresser au peuple-classe ? Jamais ?
La réponse dépend beaucoup du statut du clivage « eux-nous », « eux » étant ici la ou les classes dominantes, « nous » le peuple résiduel , le peuple-classe, les 99% d’en-bas.

Si vous pensez qu’une fraction de la classe dominante est proche d’une gauche de pluri-émancipation, y compris sur la dimension classiste, alors vous allez refuser le clivage « eux-nous » totalement, vous n’allez conserver quasiment aucune dimension populiste dans votre discours. La stratégie d’alliance « eux-nous » relativise toujours les clivages avec les classes dominantes, ce qui n’est pas neutre loin de là !

Un autre aspect consiste à adopter constamment un point de vue politique de type citoyenniste et interclassiste qui refuse lui aussi tout clivage de classes sociales y compris quand ce clivage prend des dimensions d’une véritable « guerre sociale » et pas que contre les travailleurs précaires . Ce discours ne s’adressera lui aussi qu’aux citoyens (nationaux ou résidents ?) sur un mode universaliste et démocratique qui est de facture interclassiste .

Ces deux types discours en usage constant et exclusif sont vus par les critiques comme « politiciens », c’est à dire trompeurs, manipulateurs .

Si vous êtes dubitatif sur cette fraction progressiste au sein de la classe dominante, ou si vous la considérez comme trop discrète ou trop peu influente, vous allez fatalement vouloir maintenir une certaine dimension populiste-classiste.

Le langage populiste de gauche reste un langage classiste qui montre une domination de classe interne à la nation mais il ne se réduit pas à cette domination . Il est entendu que vous maintenez aussi la pluralité des mots d’ordre et des adversaires. Citons ici encore Fabrice Flipo : « La nouvelle situation est celle d’un pluralisme de mots d’ordre et d’adversaires – le capitalisme, le productivisme, le patriarcat, le racisme etc. – s’accompagnant d’un pluralisme d’utopies positives : la société écologique (ou décroissance), la « réciprocité multiculturelle textile » (C. Delarue), etc. » Ne risque-t-on pas alors de perdre en populisme, c’est à dire en contre-hégémonie ? « Maintenir une dimension hégémonique » est nécessaire pour le rapport des forces, y compris lorsqu’une pluralité de libérations sont articulées. Et là il y a besoin de réels débats entre individus disposants de pensées stratégiques diverses au sein d’un situation donnée. La meilleure position se dégage du débat.

Les deux usages : Peuple démocratico-citoyen et peuple-classe 99%.

Pour sa part, le PCF dit JF GAU (sous le texte de F FLIPO) entend le mot peuple dans une double dimension, classiste et républicaine : le peuple comme classes populaires, et comme communauté des citoyens (français, européens, du monde).

Christian DELARUE
sept 2018

1) Un « populisme de gauche » ? - F FLIPO - Amitié entre les peuples
http://amitie-entre-les-peuples.org/Un-populisme-de-gauche-F-FLIPO

2 Le populisme renouvelle-t-il le discours de transformation sociale ? | L’Humanité
https://www.humanite.fr/le-populisme-renouvelle-t-il-le-discours-de-transformation-sociale-644174