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Le CADTM se demande si Emmanuel Macron a lu le « Rapport d’audit de la dette française » et...

dimanche 31 août 2014, par Amitié entre les peuples

France

Le CADTM se demande si Emmanuel Macron a lu le « Rapport d’audit de la dette française » et compte s’en emparer pour remettre la finance à sa place ?

Communiqué de presse

30 août par CADTM France

Manuel Valls vient de nommer Emmanuel Macron au ministère de l’économie. Si la presse nous présente ses prestigieux diplômes, son CV à rallonge, il n’en reste pas moins que ce dernier va succéder à Arnaud Montebourg sans jamais avoir été élu. Petite formalité sans importance quand on a été associé-gérant pour la banque Rothschild et qu’on a la bénédiction de Laurence Parisot : « C’est quelqu’un qui écoute. Il est curieux, il essaie de comprendre. Il est tourné vers les autres ». Selon la presse financière, François Pérol, ancien conseiller de Nicolas Sarkozy et actuel patron de BPCE qui été lui aussi banquier chez Rothschild (autre point commun, les deux hommes ont occupé le même bureau à l’Élysée…), l’aurait poussé à accepter ce poste délicat. Pour Pérol : « C’est un esprit brillant et séducteur » |1|.

Si le patron de BPCE et l’ex-patronne du Medef disent vrai, peut-être avons-nous une petite chance que la découverte du contenu du Rapport d’audit de la dette française |2| provoque en Emmanuel Macron une brusque illumination suivie d’une soif de justice sociale. Et pour ne pas laisser notre nouveau ministre dans l’embarras face à l’épineuse question de la dette publique, le CADTM se dévoue pour lui transmettre les principales conclusions du rapport et s’engage à lui en faire parvenir un exemplaire dans le cas peu probable où il lui aurait échappé !

Le pacte dit « de responsabilité » – dont Emmanuel Macron est un fervent défenseur – qui prévoit 50 milliards supplémentaires de réduction des dépenses publiques, est officiellement justifié par l’impératif de réduire les déficits et les dettes publiques. Or ces mesures sont profondément injustes et illégitimes puisque 59 % de la dette publique proviennent des cadeaux fiscaux et des taux d’intérêt excessifs appliqués par les banques. Il faut donc inverser radicalement la vapeur. Ce n’est certes pas pour plaire à Laurence Parisot, mais c’est ce que montre l’examen minutieux des faits. Les dépenses n’ont pas augmenté puisque leur part dans le PIB a chuté de 2 points en trente ans. Parallèlement, suite aux exonérations d’impôts des ménages aisés et des grandes entreprises (cadeaux fiscaux, niches, etc.) la part des recettes de l’État dans le PIB a chuté de 5 points dans le même laps de temps. De plus, si l’État, au lieu de se financer depuis 30 ans sur les marchés financiers, avait recouru à des emprunts auprès des ménages ou des banques à un taux d’intérêt réel de 2 %, la dette publique serait aujourd’hui inférieure de 29 points de PIB à son niveau actuel.

Qui de mieux qu’un ex-banquier d’affaire pour remettre la finance à sa place. Les rouages n’ont pas de secret pour ceux qui les ont créés. La déclaration de guerre de François Hollande « mon adversaire, mon véritable adversaire… c’est la finance » se révèle n’être en réalité qu’une nouvelle resucée du « capitalisme à la barbichette » |3| si cher à la droite et à ses clones socialistes. Emmanuel Macron qui fut un temps l’assistant de Paul Ricœur, le célèbre philosophe, ferait bien de se souvenir d’un propos de son ancien maître :

« Le problème du conseiller du prince, qui nous ramène à la vieille utopie, platonicienne, du philosophe-roi, n’est que l’envers du vrai propos qui est d’être le conseiller du public et non pas le conseiller du prince. » |4|

Notes

http://cadtm.org/Le-CADTM-se-demande-si-Emmanuel

|1| David Bensoussan, Challenges, 27 août 2011.

|2| Que faire de la dette ? Un audit de la dette publique de la France : http://www.audit-citoyen.org/wp-content/uploads/2014/05/note-dette.pdf. Ont participé à son élaboration : Michel Husson (Conseil scientifique d’Attac, coordination), Pascal Franchet (CADTM), Robert Joumard (Attac), Evelyne Ngo (Solidaires Finances Publiques), Henri Sterdyniak (Economistes Atterrés), Patrick Saurin (Sud BPCE).

|3| Le capitalisme à la barbichette désigne les relations incestueuses des grandes sociétés capitalistes françaises dont les patrons se cooptent au sein de leurs conseils d’administration respectifs, tout en s’autorisant de fréquents aller et retour entre la sphère privée et la sphère publique.

|4| « L’éthique, le politique, l’écologie », entretien avec Paul Ricœur (Propos recueillis par Edith et Jean Paul Deléage), Ecologie politique. Sciences, Culture, Société 1993, n° 7, été.