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La théologie de la libération pour le socialisme - C Delarue

dimanche 21 décembre 2008, par Amitié entre les peuples

LA THEOLOGIE DE LA LIBERATION POUR LE SOCIALISME

Les grandes religions connaisent une pente conservatrice voire réactionnaire (1) . Les courants critiques du capitalisme au sein des grandes religions existent mais sont peu connus (2). Une exception : la théologie de la libération en Amérique latine.

Mais qu’en reste-il ? Elle participe aux Forum sociaux altermondialiste . Sa branche sud-américaine pour l’essentiel. En Europe ?

Autre question : n’a-t-elle pas au cours des ce dernières années « bradé » son programme politique anticapitaliste et socialiste ? Ou en est-elle du féminisme et de la laïcité ? Des questions ouvertes donc. Mais pour ne pas en rester là voici des extraits d’un de ses représentants historiques : Léonardo BOFF.

Christian DELARUE
Militant altermondialiste

1) Lire : « À l’extrême droite de Dieu » (récent)

2) Consulter le site

GOLIAS

 » [RISAL]

I - LE SOCIALISME COMME RADICALISATION DE LA DEMOCRATIE

J’ai l’impression que le projet socialiste qui n’existe plus en Europe peut se redessiner depuis l’Amérique latine. Ici, nous avons la possibilité de ressusciter le projet socialiste, mais différent du vieux projet de l’Europe de l’Est, plutôt comme une radicalisation de la démocratie, comme une inclusion des masses, avec le peuple, en respectant les peuples indigènes, avec les différences culturelles, en socialisant les richesses. Et en tenant compte que les terres de ce continent-ci renferment la plus riche biodiversité de la planète, qui sera la richesse la plus prisée des prochaines décennies. Ce nouveau socialisme pourrait être inspiré par un grand penseur comme Mariategui : ce sont nos idées, il valorise les cultures, la dimension religieuse mystique, un regard utopique. On ne retrouve presque jamais cela chez les classiques européens. Ce serait un socialisme créole, latino-américain. En ce sens, je pense que les sujets historiques porteurs de projets de changements profonds ne sont pas les Etats, ce sont les mouvements sociaux, le MST, la Vía Campesina, les groupes de noirs, d’indigènes. Ils se réclament tous du socialisme, mais pas d’une social-démocratie, plutôt d’une démocratie sociale, une démocratie incluante, participative, redistributive. Avec le socialisme qui serait le cadre théorique pour cette aspiration. Au niveau mondial, c’est clair : ou nous partageons ce que nous avons ou il n’y en aura assez pour tout le monde.

II - QUE RESTE-IL DE LA THEOLOGIE DE LA LIBERATION ?

 Qu’est aujourd’hui la Théologie de la Libération ?

La Théologie de la Libération est née en écoutant le cri de l’opprimé : le noir, le pauvre, la femme, le cri de la terre, de tous les opprimés. Et le nombre de pauvres dans le monde a augmenté. Je pense que l’un des problèmes du système est qu’avant on pouvait cacher les pauvres. Aujourd’hui, le malheur est si terrible qu’on ne peut plus occulter cette réalité, le drame des pauvres du monde : des milliards de personnes souffrent de faim et de soif. C’est un défi à la conscience humaine. L’Eglise catholique n’écoute pas ce cri. De cette situation d’injustice, l’Eglise n’en connaît pas grand-chose. L’Eglise actuelle, de Benoît XVI, est l’option pour les riches et non pour les pauvres. Alors la Théologie de la Libération insiste, met l’accent sur le fait que le problème, c’est le système, et continue à être vivante essentiellement dans les églises plus petites qui prennent au sérieux le défi des pauvres et la justice. Et l’Eglise, qui est plus préoccupée de liturgie et de catéchèse, n’est pas très sensible à ces sujets, elle voit la Libération comme quelque chose de mauvais, de dangereux, parce qu’elle politise les gens. Après 40 années de Théologie de la Libération, on peut rendre hommage à cet apport de l’Amérique latine au monde, un apport culturel et d’idées en quête de justice.

 A l’intérieur de l’Eglise catholique, quel espace existe-t-il aujourd’hui pour la Théologie de la Libération ?

Le christianisme doit avoir une matrice ouverte, où chaque culture prend le christianisme et l’ajoute à sa culture, comme nous l’avons fait en Amérique : nous essayons de donner au christianisme un visage noir, indigène, latino-américain. Avec nos propres rites, nos célébrations. Et une église latino-américaine, très différente de celle de Rome, s’est lentement construite. C’est un catholicisme populaire, qui a été créé par les peuples. Mais si on regarde l’/establishment/ romain, la curie, il s’agit d’une église très conservatrice, qui se construit seulement vers l’intérieur, où il n’y a pas de place pour agir. Maintenant si on regarde les églises périphériques, puisque le christianisme est une grande multinationale avec différents niveaux de conscientisation, on s’aperçoit qu’il existe des espaces pour que la théologie débatte, remette en cause le néolibéralisme. C’est donc une théologie vivante, mais dans les églises où les groupes y sont sensibles. C’est pourquoi la Théologie de la Libération possède l’hégémonie morale, mais n’a pas l’hégémonie politique, que Rome détient sans aucun doute.

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RISAL - Réseau d’information et de solidarité avec l’Amérique latine
URL : http://risal.collectifs.net/

Source : Pagina 12 ( www.pagina12.com.ar ), 4 décembre 2006.

Traduction : Catherine Goudounèche, pour le RISAL
( http://risal.collectifs.net ).