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L’entreprise privée capitaliste n’est pas là pour créer des emplois ! C Delarue

mardi 22 octobre 2013, par Amitié entre les peuples

L’entreprise privée capitaliste n’est pas là pour créer des emplois !

De bonnes conditions de travail non plus !

Etc...

par Christian DELARUE

nb : suite de

A propos de la position social-démocrate de Robert Castel.

http://blogs.mediapart.fr/blog/christian-delarue/121013/propos-de-la-position-social-democrate-de-robert-castel

C’est vrai. C’est une ânerie de vouloir le contraire - que l’entreprise créé des emplois - dit à raison le libéral N Bouzou (1). Le service public n’assume plus, lui aussi, cette fonction. Gros problème non ? Mais ce n’est pas tout. L’entreprise privée capitaliste n’a pas non plus pour objet d’offrir de bonnes conditions de travail aux travailleurs pourrait-on aussi ajouter ! Quand elle y est contrainte c’est le minimum qui est proposé, celui qui sert immédiatement à l’intensification du travail. Faut pas rêver !

Et elle a d’autres défauts : elle ne peut non plus produire gratuitement ou à bas prix (ou alors pour des biens de très mauvaises qualités, à obsolescence programmée). Elle produit pour des clients pas pour des usagers. Tans pis pour les pauvres ! Tant pis aussi pour ceux juste au-dessus, les couches sociales modestes qui épuisent leur maigre salaire en fin de mois. Cette économie-là n’est pas faite pour eux !

L’entreprise privée capitaliste produit des biens (ou des services) marchands en vue du profit. Et, avec ou sans tabou par rapport au profit (nouveau clin d’oeil à N Bouzou), il faudrait quand même voir que le profit n’est pas d’intérêt général mais outil d’accumulation de capital accaparé par les capitalistes (le patronat surtout ceux du CAC 40) et pourvoyeur de miettes pour le reste !

En droit européen on donne un sigle « SIG » qui sifnifie service d’intérêt général. Rien à voir avec le service public. Plus proche d’une vision caritative obligée pour une société qui veut toujours se présenter comme « sociale » ou « civilisée ».

Là N Bouzou se fait vulgaire apologiste des soit-disant « vertus » du capitalisme en invoquant Darwin. Il ferait bien d’invoquer Spencer pour éviter de dire lui aussi une ânerie. (NB Je me permet cette remarque que parce que lui se l’est permise.) . Spencer est le défenseur de la lutte pour la vie. Il défend la loi de la jungle, la loi du plus fort. Ce qui n’a rien à voir avec Darwin ! Rien à voir avec une perspective de civilisation !

L’économie de marché laissée à elle-même sans autres mécanismes ou dispositifs d’orientation de l’activité humaine produirait la barbarie et non la civilisation. Et il faut mettre la phrase au présent. Car il est aisé à vérifier que la barbarie est déjà là ; socialement (malgré l’Etat social qui résiste) et écologiquement . Le processus trentenaire d’approfondissement des inégalités qui caractérise le néolibéralisme va à l’encontre de la civilisation. La civilisation porte la justice sociale et non le monde actuel de violence économique contre les individus défaillants et la nature. Le propos a un côté Viviane Forrester mais cette personne n’a pas eu tort (2). La « guerre économique » néolibérale produit en effet la pauvreté, le chômage, les mauvaises conditions de vie pour une fraction grandissante de la population. Outre l’indignation il faut savoir pourquoi ?

Produire gratuitement ou à bas prix l’entreprise capitaliste ne sait pas faire. Le bas prix c’est de la très mauvaise qualité. Le gratuit, c’est le service public !

Il lui faut toujours un individu solvable, un acheteur bien pourvu en moyens de paiement, donc bien rémunérés. Or les patrons, en « bons gestionnaires » tendent à payer peu, le moins possible . Ils ne veulent plus du SMIC alors qu’on ne le SMIC c’est juste bon pour vivre en restant chez papa-maman mais guère pour fonder une famille, acheter un appartement, se loger correctement. Quid du logement social sans service public national et politique foncière dirigiste !

Sous le mode de production capitaliste largement dominant (ESS et services publics mis à part) il y a une grosse contradiction entre les nécessités de l’exploitation de la force de travail et la nécessité de débouchés solvables. On produit pour les riches et pour les couches aisées (les deux déciles du haut). Les autres sont dans la sobriété contrainte.

Quand l’entreprise capitaliste embauche, elle veut rentabiliser au maximum la force de travail en ne payant que le travail proprement dit. Elle tend à ne plus vouloir payer le non travail. C’est ainsi que la pause café est réduite, voire interdite ou alors elle met en place des procédés de « débadgé » pour aller aux toilettes ! C’est du véridique. Un retour au XIX ème siècle ! Le travail doit être efficace car un travail réel qui ne va pas vers la satisfaction des critères de profit en bout de processus est invalidé comme du travail inutile. On retrouve cela dans les administrations, bien que le bout du procès de production soit le service aux usagers.

Pour terminer, il faut ajouter, que la finance comme pouvoir, avec sa puissance renforcée depuis 30 ans, n’a pas perverti une « bonne entreprise capitaliste » (mythe de la production distincte de la finance) elle s’est au contraire appuyée sur tous ses vices.

Christian DELARUE

1) Nicolas Bouzou - Le profit des entreprises moteur de l’économie

http://www.tvdma.org/strategie/profit-bouzou/

2) On a reproché à Viviane Forrester une démonstration « plus littéraire que scientifique » mais elle a été comprise de millions de personnes dès 1996 car elle a su saisir toute « l’horreur économique » du système capitaliste. Je rappelle que l’alerte d’Ignacio Ramonet sur le Monde diplomatique contre la finance prédatrice - article très célèbre qui a donné lieu à la naissance d’ATTAC six mois plus tard - date de décembre 1997.