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L’égalisation nécessaire par la référence à la République. C Delarue

jeudi 29 octobre 2015, par Amitié entre les peuples

L’égalisation nécessaire par la référence à la République.

M Joseph Confavreux et Mme Marine Turqui (sur Médiapart - 1) publient ce jour un article important sur le « néo-républicanisme », sur l’usage du terme République, « mot valise » ou « auberge espagnole » (comme peuple), qui permet de rassembler très largement, trop puisque même le FN y trouve sa place. Un comble ! Il va falloir, peut-être, « adjectiver » la République (ce qui n’est pas nouveau !), préciser de quel type de République on parle . République nationaliste-communautariste étroitement franco-française, République fasciste, République islamiste, République socialiste, République décentralisée, République multiculturelle, etc Chacun donne son contenu au bien commun, une conception à la chose publique (res publica) ! D’ou les questions suivantes La République doit-elle « travailler » pour les français exclusivement ou pour tous les résidents sur son territoire ? Doit-elle le faire en uniformisant sous prétexte d’évitement du communautarisme ? Doit-elle le faire en commençant - comme la droite - par servir les déjà riches et très riches ou en cherchant d’abord à élever les (mauvaises) conditions de vie des couches sociales modestes (chômage, précarité, bas salaires, logement trop petit, etc) quitte à abaisser, si il le faut, le train de vie des riches ? Qui se sert d’abord ? N’est-elle pas trop atteinte par le clientélisme cette République du 1% d’en-haut ? Le clientélisme, fort (en acte) et léger (en discours avec le « diviser pour régner »), est un des éléments constitutif du bloc hégémonique de la droite !

La République authentique doit constamment corriger ce qui la menace et en ce sens elle est et demeure nécessairement « inachevée » (thèse de Christian Picquet) mais il faut alors montrer la vraie menace . Il s’agit plus, selon nous, des fortes inégalités sociales et territoriales (développement inégal et combiné) que de la « menace multiculturaliste ». Evoquons alors une branche oubliée de la République, celle qui cherche une égalisation multifactorielle, dans le respect des différences, dans le cadre d’un Etat de droit et sous la dynamique d’un peuple-classe actif du côté des dominés, des exploités, des opprimés.

 La République à tous les vents.

La République très franco-française sert désormais à l’extrême-droite identitaire à la promotion de l’écrasement des différences via une apologie du commun calée sur une France blanche et catholique ou judéo-chrétienne (cf Mme Morano). La droite critique le communautarisme des différences et valorise surtout la liberté d’entreprendre dans la République qui défend une égalité abstraite ou la fraternité s’exprime dans une inégalité maintenue à peine corrigée par la charité privée. La gauche social-libérale fait de même en valorisant une charité publique, un néo-solidarisme qui peine à éradiquer la pauvreté. Reste la gauche d’alternative à défendre une République sociale ou socialiste. La République libérale (de droite) ou social-libérale (de centre-gauche) veut bient de la liberté (ce ceux qui ont les moyens) de la fraternité (comme charité quand je veux comme je veux) et d’une égalité (des âmes mais pas des conditions matérielles de vie)

On pourrait penser que la référence à la République puisse aider à une forte réduction des inégalités territoriales (campagnes-villes et quartiers délaissés-quartiers favorisés) et des inégalités sociales mais ce serait là non une option de gauche fausse mais plutôt une position d’alternative qui ne tient pas compte du « complexe républicain » issu du droit constitutionnel français.

Il y a en effet, en la matière, d’abord les fameux principes fondamentaux de la République française énoncés dans sa devise : « Liberté, Égalité, Fraternité ». La compréhension actuelle de cette formule appuie fortement à l’indivisibilité de ces droits humains et non comme jadis à la relativisation des droits sociaux, des droits créances au bénéfice des droits civiques. Cette idée se retrouve assez peu dans l’article 1er de la Constitution qui proclame que « La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale ». On a beaucoup écrit sur l’indivisibilité, la laïcité et la démocratie mais pas assez sur le volet social de la République qui arrive en fin de phrase.

 Le « social » à valoriser contre les inégalités !

Le social a aujourd’hui un sens fort d’anti-austéritaire mais aussi d’égalité et même d’égalisation nécessaire des inégalités produites par le néolibéralisme depuis plus de 30 ans .

Le social correspond - on l’a dit- à une tendance juridique mondiale qui veut que les droits économiques, sociaux et culturels (dit les DESC) soient comme les droits civiques, et sans distinction hiérarchique, des droits humains fondamentaux.

Une République sociale se doit de combattre activement les inégalités territoriales (campagnes-villes et quartiers délaissés-quartiers favorisés) et les inégalités sociales dans les revenus, le logement, le travail, la santé, l’école, etc via une régulation politique contraire à celle du marché et du concurrentialisme dominant.

Cela suppose de mettre les services publics existant - leur potentiel anti-systèmique - au service du peuple-classe 99% et non pour le 1% d’en-haut avec le complément de la lutte contre la pauvreté (la République libérale et son filet anti-pauvres) Les grands patrons et le 1% d’en-haut veut privatiser et casser les services publics, en faire un objet de profit .

 Autres aspects pour une République « inachevée »

Il y a aussi la promotion

 d’une République non sexiste, active contre la prostitution, contre les publicités sexistes, etc pour l’égalité hommes-femmes dans la liberté de tous et toutes !

 d’une République non raciste qui ne se contente pas de la loi de 1972 pour se dire non raciste !

Et la République voulant le bien commun, la « res publica », doit-elle refuser les langues régionales sous prétexte de communautarisme (comme le Sénat l’a fait ) ? N’y a-t-il pas là une sorte de communautarisme franco-français un brin autoritaire qui voudrait écraser les cultures et langues dites régionales qui ne menacent guère la France à mon sens car la langue française conserve bien son veecteur de lien interculturel tout comme d’ailleurs la laïcité ! Il y a plus à craindre, semble-t-il, de la montée des intégrismes religieux en France, en Europe et dans le monde mais là encore la réponse est, selon nous, dans la promotion d’une République sociale, et même éco-socialiste !

Christian Delarue

1- Aux sources de la nouvelle pensée unique : enquête sur les néorépublicains

http://www.mediapart.fr/journal/culture-idees/271015/aux-sources-de-la-nouvelle-pensee-unique-enquete-sur-les-neorepublicains

Précédents textes

 Oligarchie, République, socialisme

http://blogs.mediapart.fr/blog/christian-delarue/041112/oligarchie-republique-socialisme

 L’interculturel entre multiculturalisme et monoculturalisme. C Delarue

http://amitie-entre-les-peuples.org/L-interculturel-entre

- Le « carré républicain » : Liberté, Egalité, Adelphité, Laïcité - Attac France

https://france.attac.org/archives/spip.php?article10468