Intolérance à la faiblesse ou la fatigue d’être irréprochable. C Delarue
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Intolérance à la faiblesse ou la fatigue de devoir être constamment irréprochable.
L’individu insuffisant est l’individu contemporain pris dans la lutte concurrentielle des entreprises et surtout celle des travailleurs et travailleuses. Le régime néolibéral contemporain, qui a adopté le principe de Spencer de la survie des plus forts, est caractérisé par la puissance de la domination de la finance.
Les gagnants et tous les perdants
Ce système social est particulièrement dur. Il montre, à divers niveaux et dans divers champs sociaux, une distinction entre les gagnants et les perdants. Ce qui est la version moderne du monde de Hobbes ou l’homme est un loup pour l’homme. La solidarité ne subsiste qu’aux marges du système comme verni de civilisation. Hobbes prévoyait un Etat pour la sécurité des personnes agressées par d’autres mais pas un Etat protecteur des prédateurs économiques.
Les premiers, les gagnants, sont des entrepreneurs (au plan économique) et psychologiquement il font très souvent l’expérience de la force, de la compétence et de la pugnacité, le tout bien calé dans une double perspective celle de l’entreprise et leur propre profit. Ils sortent souvent (pas toujours) les "crocs" agressifs de l’avidité de l’argent et surtout du pouvoir.
A côté d’eux, il y a les seconds, plus nombreux, les individus qui font occasionnellement, ou parfois durablement, l’expérience d’être insuffisant . Ils connaissent ce que l’on a appelé, avec A Ehrenberg, "la fatigue d’être soi" (1). De quoi s’agit-il ? "L’homme contemporain souffre d’un mal sans précédent : la fatigue d’être soi. Avec le culte moderne de la performance on assiste à une réelle montée en puissance des valeurs de la concurrence économique et de la compétition sportive dans la société française sommant les individus de se lancer à la conquête de leur identité personnelle et de la réussite sociale". (2)
Un cran de plus.
A la fatigue d’être soi s’est ajouté, c’est ce qu’il faut noter, du fait d’une montée en force de la déontologie dans certaines organisations, surtout dans les appareils d’Etat, la fatigue d’être irréprochable. La demande est d’ailleurs ainsi faite dans les guides de déontologie.
Sous cet aspect, l’entreprise va exiger un individu vertueux, lisse et sans conflit mais très adapté à sa logique interne. Cela vaut pour d’autres organisations non orientées elles vers l’obtention du profit (souci de l’intérêt général des administrations) mais désormais très soucieuses de rentabilité. Le caractère irréprochable concerne le comportement individuel, en interne et externe, en plus de la compétence. Cela se rapporte à la recherche contemporaine de qualité dans tous les domaines. Cette obligation d’êrte irréprochable, à plusieurs niveaux, constitue bien une nouvelle fatigue d’être soi.
Il est évident que chaque profession doit observer un minimum de règles déontologiques pour éviter des dérives graves de type accidents humains, mal traitement, corruption, trafic d’influence, pots de vin, discriminations sexistes ou racistes, etc... Mais la déontologie ne s’arrête pas là. Elle va surveiller vos excès de vitesse sur route, votre usage de la boite de messagerie professionnelle, y compris sur ce qui est personnel, et bien d’autres choses encore, qui n’ont pas un caractère dramatique pour l’entreprise mais qui participe du contrôle de tous contre tous à des fins de rendement, de productivité.
Critique sociale
Notre société n’est pas orientée vers le bien vivre pour tous, un bien vivre bien partagé tant pour le travail que pour l’argent et l’accès aux services. Elle est devenue asociale, prédatrice et incivilisée car insensible à la souffrance et la détresse d’autrui. Insensible aux inégalités, aux misères sociales.
Reste alors pour sortir de ce cercle vicieux de la non reconnaissance, le sens des solidarités horizontales entre humains, et plus précisément de la fraternité de classe interne au peuple-classe d’ici et à tous les peuples-classe.
Une des bataille pour la civilisation reste la RTT afin que tous et toutes puissent participer à la production de l’existence sociale, chacun à sa mesure, sans forfanterie ni domination d’autrui.
Christian Delarue
1) La Fatigue d’être soi Dépression et société A Ehrenberg. (je recommande cette lecture)
http://1libertaire.free.fr/FatiguedEtreSoi01.html
2) Peut-on échapper à la fatigue d’être soi ? : Marc Alpozzo
http://marcalpozzo.blogspirit.com/archive/2008/06/29/peut-on-echapper-a-la-fatigue-d-etre-soi.html