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Impérialisme et oppression des femmes

jeudi 29 mai 2008, par Amitié entre les peuples

Dès le début, le capitalisme a été expansionniste. Il a créé une économie capitaliste mondiale. Mais au cours de son histoire, il s’est développé d’une manière combinée et inégale. Le colonialisme, puis, à partir de la fin du XIXe siècle, l’impérialisme, ont partagé le monde, pillant les ressources et le travail, et exploitant les régions dominées — les colonies ou les semi-colonies — au bénéfice du capital monopoliste.

A travers son expansion et sa domination du monde, le capital impérialiste a détruit à la fois les économies existantes et les relations sociales des modes de production pré-capitalistes dans les pays dominés par l’impérialisme.

Il a détruit l’agriculture de subsistance, apporté la ruine des industries textiles locales, détruit les réseaux d’entraide et d’obligation des villages et affaibli l’autorité religieuse et féodale.

Mais là où le capitalisme a “jeté bas des murailles de Chine”, il a aussi déchiré la structure sociale des anciennes sociétés, y compris les structures familiales, avec comme objectif non pas le progrès, mais de faciliter l’exploitation coloniale des peuples conquis.

Les conséquences pour les femmes

Pour les femmes, comme pour les masses exploitées dans leur ensemble, ces développements ont créé les conditions matérielles de libération des structures patriarcales, souvent brutales, qui prévalaient avant l’arrivée du capital impérialiste. Mais en même temps, ils ont approfondi et accru l’exploitation et l’oppression dont elles souffraient.

L’introduction de l’industrie capitaliste, l’invasion de la campagne par le capitalisme, la perte des liens féodaux, ont conduit à la création d’un prolétariat, la seule classe capable de mettre fin tout à la fois à l’exploitation, à l’oppression et à la société de classe.

A l’époque impérialiste, ce chemin a été ouvert à la masse des femmes paysannes et travailleuses des colonies et semi-colonies. La soumission à la domination masculine dans la famille, la superstition, l’ignorance et l’asservissement — les formes de la vie familiale pendant des siècles — peuvent être abolis une bonne fois pour toutes.

Pourtant, précisément parce que nous sommes à l’époque de l’impérialisme, la possibilité d’un tel progrès est bloquée, voire entièrement empêchée dans certains pays, aires ou secteurs, par l’étau réactionnaire de l’impérialisme.
Le développement combiné et inégal a crée les conditions matérielles préalables — et les obstacles — à la libération des femmes dans les pays dominés par l’impérialisme.

Seules des révolutions conduites par les travailleurs et dirigées en vue de la destruction totale du capitalisme pourraient se servir de ces conditions matérielles préalables et balayer ces obstacles.

Femmes et famille sous l’oppression impérialiste

Le rôle des femmes dans la production et la reproduction est sévèrement affecté par l’exploitation impérialiste. La prolétarisation peut signifier, pour des millions de femmes, l’enfer sans fin du travail agricole migratoire, sans espoir de jamais posséder des terres, ou le chômage et les taudis.

Pour les femmes qui vivent dans les semi-colonies les plus développées, comme la Corée du Sud, cela peut signifier la surexploitation pendant la jeunesse, suivie de la destitution une fois que la capacité de travail a été épuisée par des années de travail — parfois dès l’âge de 10 ans — pour un salaire misérable.

Et pour des millions d’autres femmes, ce processus conduit inexorablement à la prostitution (une industrie importante dans des pays comme la Thaïlande) ou à être exportée comme servante/épouse (en fait, esclave) d’hommes vivant en Occident. La vente d’“épouses” Philippines ou l’exportation de jeunes femmes de Sri Lanka sont deux exemples écoeurants de ce commerce des femmes.

Les paysannes, elles, doivent supporter le double fardeau de l’entretien de la maison et du travail au champ. Là où la terre est confisquée et où la différenciation entre les classes à la campagne laisse les plus pauvres sans terre, les femmes doivent se débrouiller pour élever leurs enfants, sans aucun soutien, sauf l’espoir que leur époux qui travaille en ville donne une partie de son salaire.

Les mariages et les structures familiales traditionnelles sont détruits ou recréés sous des formes qui intensifient l’oppression subie par les femmes ; les femmes du prolétariat qui fuient les campagnes voient souvent leurs revenus diminués par la nécessité de subvenir aux besoins de la famille qu’elles ont laissé derrière elles.

La plupart du temps, les femmes travaillent pour des salaires inférieurs à ceux des hommes et elles sont souvent cantonnées dans le travail saisonnier. Tout ceci augmente le risque que les femmes se prostituent ou acceptent un véritable esclavage comme seules alternatives à la famine.

L’oppression à la campagne

Pour les femmes qui restent à la campagne, en particulier en Afrique, l’introduction des techniques modernes en agriculture, et en particulier pour les récoltes destinées à la vente, a fait que les femmes ont perdu le contrôle des terres héritées par voie matrilinéaire et de la production de nourriture, bien que ce soient elles qui fassent la plupart du travail.

L’obligation de continuer à travailler dans ces conditions difficiles vient de la nécessité de produire des moyens de subsistance pour les personnes dépendantes, jeunes et âgées. Les formes antérieures de l’oppression des femmes — la dot, la polygamie, l’ablation du clitoris — ne sont pas éliminées par l’impérialisme, bien que leur base sociale ait été minée.

Des millions de femmes, en particulier en Afrique et dans certains pays islamiques, sont victimes de l’excision ou de l’infibulation. En Asie du Sud, des dizaines de milliers de femmes doivent supporter le fardeau des corvées dans la famille de leur époux.

La destruction partielle des structures et des obligations familiales traditionnelles peut laisser les femmes dans une situation moins protégée, menant, par exemple, à des horreurs comme l’augmentation de l’immolation des veuves en Inde.

Dans le monde dominé par l’impérialisme, les progrès que le capitalisme apporte, comme l’éducation et la santé, ne profitent réellement qu’à une poignée de gens. L’alphabétisation des femmes demeure inférieure à celle des hommes.

Et malgré les progrès de la médecine, la plupart des femmes dans les semi-colonies n’ont aucun contrôle sur leur propre fécondité. En Afrique et en Asie, un million de femmes meurent chaque année en couches.

Etant donné ces conditions d’oppression, il n’est guère étonnant que les femmes des colonies et des semi-colonies aient participé par milliers aux luttes contre l’impérialisme. Au Vietnam, au Nicaragua, aux Philippines, en Angola et au Mozambique, des femmes ont pris les armes pour participer aux luttes courageuses contre les régimes soutenus et lourdement armés par l’impérialisme, voire contre les impérialistes eux-mêmes.

Mais, à maintes reprises, les intérêts des femmes travailleuses et paysannes ont été trahis, soit par les directions nationalistes petites-bourgeoisies qui, une fois au pouvoir, ont cherché un nouvel accord avec l’impérialisme, soit par les dirigeants staliniens dont le pouvoir bureaucratique reproduit beaucoup des pires traits de la vie familiale sous le capitalisme.

Dans certain cas, comme en Iran, le rôle subalterne traditionnellement joué par les femmes eut pour conséquence qu’après la révolution contre le Shah, celles-ci furent victimes d’une terrible contre-révolution menée par les mollahs.

Dans d’autres cas, les femmes ont connu des acquis réels, notamment en matière d’alphabétisation, de santé, et, parfois, de droits démocratiques. Mais sans le renversement du capitalisme ou des dirigeants staliniens dans les Etats ouvriers dégénérés de naissance qui furent le produit de certaines luttes anti-impérialistes, tous les acquis des femmes seront temporaires, bloqués, éliminés ou rendus inefficaces par l’exploitation continue de l’impérialisme, les exigences du FMI ou les besoins de la bureaucratie parasitaire qui domine les économies planifiées.

En Afghanistan, la volonté du parti stalinien dirigeant de sacrifier le programme d’alphabétisation des femmes comme partie intégrante de l’accord qu’il avait passé avec les rebelles islamiques réactionnaires, n’est qu’un exemple de la trahison dont est capable le stalinisme.

Le nationalisme petit-bourgeois a trahi de la même façon, et en fera autant à l’avenir. Seul le programme de la révolution permanente, dans lequel les droits démocratiques réels et une solution progressiste à la question agraire sont inséparablement liés à l’avènement du pouvoir ouvrier et du socialisme, peut offrir aux femmes la perspective d’une solution réelle à leur combat contre l’oppression.

L’esclavage, le racisme et l’oppression des femmes

La première période coloniale fut caractérisée par des enlèvements massifs d’Africains de l’Ouest, et leur mise en esclavage par les marchands européens et les propriétaires de plantations aux Amériques. Des familles, voire des communautés entières, furent déchirées.

La force de travail et la capacité reproductrice furent entièrement contrôlées et exploitées par les esclavagistes. Les femmes esclaves se virent refuser toute liberté de choix dans les relations sexuelles et personnelles, et, en tant que propriété des esclavagistes, furent systématiquement violées et vilipendées par ceux-ci.

Les esclaves femmes étaient presque entièrement responsables de l’éducation de leurs enfants mais n’avaient aucun contrôle sur leur avenir. Il n’est pas surprenant que les femmes noires furent à l’avant-garde de la lutte contre l’esclavage aux Etats-Unis.

L’esclavage a laissé son empreinte sur les sociétés qu’il a affectées. En particulier, il a contribué au développement du racisme et ainsi au triple fardeau d’oppression dont souffrent les femmes noires de la classe ouvrière en Amérique du Nord, en Amérique Latine, aux Antilles et en Europe.

Le système du travail imposé sur les colonies n’a pas produit de tels extrêmes de subordination et d’oppression, mais il a imposé de nouveaux fardeaux aux femmes qui, du fait que les impérialistes exigeaient des hommes leur force de travail, se sont trouvées seules responsables de la famille.

Au XXe siècle, l’effet dévastateur de l’impérialisme sur les économies des pays semi-coloniaux a créé une force de travail migrante à l’échelle planétaire. Les femmes qui se trouvent dans cette catégorie souffrent de formes spécifiques de discrimination et du poids terrible de l’oppression dans les pays “d’accueil”.

Le racisme institutionnalisé, et les manifestations plus générales du racisme qui prennent la forme du chauvinisme, empêchent la grande majorité de ces femmes de bénéficier des acquis que les femmes des pays impérialistes ont arraché à la démocratie bourgeoise. Dans la plupart des cas, le racisme oblige ces femmes à se retirer au sein des communautés immigrées.

Là où, pour des raisons culturelles ou idéologiques, l’idéologie patriarcale domine ces communautés, les femmes peuvent être confrontées à d’autres obstacles qui les empêchent de jouir de leurs pleins droits démocratiques, de participer au mouvement ouvrier ou de lutter contre leur propre oppression.

Elles sont donc dans l’incapacité de soulever la question de l’oppression des femmes au sein des organisations du mouvement ouvrier. Les lois sur l’immigration renforcent la position subordonnée des immigrées qui, dans le cadre du mariage, sont qualifiées de personnes dépendantes d’un homme. Le poids de cette oppression et de cette subordination rendent également doublement difficile le combat de ces femmes contre l’oppression au sein de leurs propres communautés et familles.

Un autre effet des contrôles de l’immigration dans les pays impérialistes est de maintenir des milliers de femmes séparées de leur mari. De cette façon, ni le pays d’origine, ni le pays où le mari travaille, ne prend en charge leur bien-être.

Le poids de l’oppression, lié au racisme au sein du mouvement ouvrier et le refus des mouvements de femmes existants de lutter de façon conséquente pour l’intérêt des femmes noires, créent les conditions dans lesquelles se développe le soutien aux stratégies des séparatistes et des nationalistes noir. Ces stratégies proposent la séparation des combats des femmes noires de ceux de tous les travailleurs noirs, et du prolétariat tout entier.

http://www.cinquiemeinternationale.org/femmes/liberation/LdF9,imperialisme.html


Voir en ligne : Source : cinquiemeinternationale.org