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« Gouvernement du peuple, par le peuple, pour le peuple » : Revendication des « indignés » (II)

vendredi 17 juin 2011, par Amitié entre les peuples

« Gouvernement du peuple, par le peuple, pour le peuple » : Revendication des « indignés » (II)

Les « indignés » rassemblés, contre le pouvoir de la finance et la démocratie confisquée !

Rappel : Le I de « Gouvernement du peuple, par le peuple, pour le peuple »déployait la signification de la formule et les enjeux démocratiques. (sur ce site).

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Les indignés appartiennent aux différents peuples-classes de plusieurs pays de l’Union européenne. Sauf exception, ce ne sont donc pas des bourgeois, ni des gros dirigeants de groupes bancaires et financiers, ni des membres de l’oligarchie.

Les « indignés » dressent le constat que les gouvernements (et la plupart des élus) accompagnent voire devancent le travail de prédation de la finance contre les peuples-classe au lieu de le contrer. Ils démantèlent les dispositifs sociaux qui bénéficiaient principalement aux peuples-classe. L’Etat social, au-delà des droits universels, devrait être la chose du peuple-classe et non celle du capital.

L’altermondialisme a du renouveler la critique de la démocratie pour la rendre opérationnelle contre le pouvoir de la finances, des banques et de l’oligarchie. Ce pouvoir est si puissant et si prédateur qu’il opère transversalement, donc dans chaque pays, une forte ponction des richesses sur le monde du travail au profit des gros rentiers et qu’il fragilise et appauvrit une large fraction du peuple-classe. Il ’épargne qu’une minorité de cadres qui doit servir d’appui à la la bourgeoisie, seule classe dominante au plan objectif et subjectif. Une autre démocratie est nécessaire qui doit accompagner un mouvement de constitution de droits sociaux, de services publics pour la mise en oeuvre et d’une autre fiscalité pour soutenir l’ensemble.

I - Altermondialisme et alterdémocratie.

L’idée d’alterdémocratie issue de l’altermondialisme reprend pour partie la double critique marxiste de la démocratie réellement existante. S’y ajoute l’idée du nécessaire combat altemondialiste contre le pouvoir de la finance et des banques. Celui-ci est transversal à chaque pays. La finance casse les politiques publiques, sociales, fiscales, écologiques et démocratiques. Elle favorise la constitution d’une oligarchie riche qui méprise les peuples-classe de chaque pays.

L’altermondialisme tente aussi de penser la démocratisation du monde puisque nombre de questions se posent à cette échelle. L’acteur de cette démocratie-là est incertain : le citoyen en un sens élargi, au-delà de la souveraineté démocratique nationale ? La multitude ? Les peuples ? Les nations ? Les modalités sont aussi incertaines. Il est utopique de penser qu’un Conseil d’administration du monde sera désigné démocratiquement par les habitants du monde. Mais l’idée d’une affectation de droits sociaux sous la pression des mouvements sociaux et syndicaux est plausible. La démocratisation au niveau continental est réalisable. L’horizon semble assez bouché actuellement s’agissant de l’Europe du fait des institutions non démocratiques de l’Union européenne.

II - Ne pas laisser Marx à la « critique rongeuse des souris » !

Un peu, pas tout ! Marx et Lénine refusent de parler de démocratie en général. Les dénominations peuvent certes varier pour caractériser les démocraties réellement existantes en Occident. Cela se comprend. On la dira formelle si l’on s’attache aux procédures, on la dira délégataire pour critiquer la démocratie représentative, on la verra bourgeoise ou à dominante bourgeoise pour montrer le poids structurel de la classe dominante. Elle a été explicitement censitaire donc celle des possédants. Les féministes ajoutaient « et mâle » car longtemps sans femmes citoyennes et donc sans élues. Son caractère « national » rapporté au droit du sang a pu être très exclusif. Etc.

Sous l’effet de la démocratisation relative des institutions, les caractérisations vont évoluer avec le temps à l’image d’autres aspects de la réalité sociale comme par exemple le droit du travail : certains parleront du droit ouvrier du travail d’autres d’un droit capitaliste. Le mouvement ouvrier est à l’origine de très nombreuses conquêtes politiques pour démocratiser les institutions, ce qui a fait bouger le vocabulaire. Certains parleront de démocratie libérale d’autres continueront de la dire à dominante bourgeoise. Tant que l’Etat est sous commande capitaliste (même avec un « Etat social ») et surtout séparé de la société civile la démocratie restera marquée du sceau de l’insuffisance ou du déni. Cette démocratie améliorée au fil du temps reste néanmoins rabougrie continue d’exclure les résidents étrangers extracommunautaires (non européens) pourtant durablement installés sur le territoire.

Pour les marxistes, la véritable démocratie est socialiste. Elle est issue de la révolution socialiste qui crée dans la société civile les « conseils ouvriers » et le « pouvoir des Soviets » à l’image de « la commune » de 1871. L’articulation des conseils et le lien avec un « conseil suprême » donnera lieu à critique des anarchistes. Le stalinisme et toutes les formes de sociétés crypto-staliniennes du XX ème siècle sont issus d’une non démocratisation de l’appareil d’ Etat et d’une lourde bureaucratisation étatique, l’Etat étant devenu tout à la fois l’affaire du parti unique et d’une administration le tout transformée en caste privilégiée.

III - Une modernité qui rende au peuple-classe ses prérogatives accaparées par une minorité de grands possédants.

Sous cet angle de justice sociale, l’alterdémocratie critique de la démocratie libérale et hyper-délégataire se présente comme un avatar de démocratie socialiste. Qu’en est-il au juste ? Les marxistes contemporains évoquent la nécessité de démocratiser l’Etat puis de le socialiser ou de socialiser directement la politique (Salesse) . Il y a plusieurs façons de concevoir la démocratie socialiste qui donne le pouvoir au peuple-classe hommes et femmes et élimine la bourgeoisie comme classe dominante. Tous ne veulent pas de la planification démocratique par exemple ce qui permet de passer plus aisément à une démocratie de conseils. Tous n’abandonnent pas le Parlement pour les Conseils : cf Kautsky.

Pourquoi parler d’alterdémocratie ? Comme il y a une indétermination sur le contenu et les formes de la démocratie socialiste les altermondialistes usent de la formule « alterdémocratie » ou « autre démocratie » ou « démocratie réellement participative » . Au-delà du nom, il s’agit bien d’une forme de démocratie plus qualitative dans le rapport démocratique aux citoyens et plus étendue dans son champ d’application qui ne se réduit pas au champ politique stricto sensu de la démocratie libérale.

Christian DELARUE

Alter (ATTAC Fce)