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Front populaire ou front populiste-bourgeois : Quel front pour le peuple-classe ? C Delarue

samedi 2 octobre 2010, par Amitié entre les peuples

Front populaire ou front populiste-bourgeois : Quel front pour le peuple-classe ?

Front unique ouvrier, front populaire, alliance populiste-bourgeoise.

Une majorité de français a installé à la Présidence et au gouvernement une clique qui privatise la République, qui détourne la démocratie. Mais le vent tourne. La couche d’appui du sarkozysme s’effrite y compris au sein de la droite. Il y a cependant plus « crise de légitimité » que « crise de régime » car l’alternative n’est pas encore là pour jeter aux orties la nouvelle peste brune qui s’affirme au sommet de l’Etat . La contestation grandissante d’un « président des riches » (1), d’un césar des financiers, d’un Bonaparte des grands bourgeois devrait certes permettre de construire une alternative . Mais cela ne va pas de soi. En effet, qui se propose à gauche de construire l’unité du peuple-classe ? A travers quelle convergences, quelles alliances ?

Classiquement l’histoire du mouvement ouvrier oppose le front populaire et le front unique ouvrier. Le premier a été défendu par le PCF contre le capital monopoliste alors que le second est le produit du mouvement trotskyste. Nous proposons contre le sarkozysme et le MEDEF de reformater le front populaire en évitant le solo de la classe ouvrière et à l’autre extrême l’alliance populiste-bourgeoise.

I - Reformater le front populaire.

a) Il faut distinguer le front populaire de sa dérive populiste avec le capital

Le front populaire peut dériver et à dérivé dans l’histoire vers un populisme au sens d’une alliance de classe entre une fraction de la bourgeoisie et la classe ouvrière ou du prolétariat (2). Mais il est faut d’assimiler front populaire et alliance de classe pour un programme social-démocrate et keynésien, pour « un capitalisme social ». L’histoire du front populaire de 1936 (3) montre qu’il convient d’être particulièrement vigilant sur les alliances entres organisations politiques. Il faut savoir jusqu’où aller en terme d’unité. Sachant qu’en pratique quand on va vers l’unité à droite, ou perd l’unité à gauche. Si le front ne perd que des groupuscules sectaires d’extrême-gauche il n’y a pas nécessairement dégénérescence du front populaire en alliance de classe avec le capital .

b) Le volet pédagogique du front populaire

Il s’agit de le concevoir comme un outil de constitution du peuple-classe à partir d’un programme anticapitaliste contraire par définition aux intérêts de la classe dominante. Outre l’aspect stratégique et tactique il a donc un aspect pédagogique à condition de pointer les risques de populisme ie d’alliance de classe avec la bourgeoisie.

Le front populaire se rapproche du front unique ouvrier dans le sens ou l’un et l’autre organisent une alliance de classes AU SEIN du peuple-classe contre la classe dominante . C’est un point important en général oublié du fait de la focalisation sur la trahison de classe ultérieure de ces fronts. C’est un aspect qui marque pourtant une différence avec les alliances populistes-bourgeoise ou nationales.

II - Ce qui distingue front populaire et FUO est ailleurs.

a) Le contenu des alliances sera différent et la dynamique globale aussi .

S’agissant des alliances intra-peuple-classe. Pour le premier il s’agit d’abord de s’assurer le soutien des couches moyennes salariées ou indépendantes quitte à taire les revendications des ouvriers et employés. Pour le second - le FUO - les revendications des ouvriers et employés de bases sont premières mais elles s’insèrent dans un ensemble plus large destiné aux couches moyennes comme la défense des services publics, la défense de la sécurité sociale.

S’agissant de la dynamique d’ensemble, le FUO se comprend dans le cadre d’une démarche révolutionnaire transitoire au sein de laquelle le mouvement de masse monte à la conquête du pouvoir dans les entreprises et dans l’Etat en usant de la grève générale. Le vote démocratique est simplement là pour valider un puissant mouvement qui renverse l’ordre existant. D’abord « la rue », ensuite « les urnes ». Le front populaire tend lui à mettre le mouvement de masse derrière le programme commun des organisations politiques. Il hésite constamment entre la référence entre un programme maximum - la référence au socialisme par exemple - et un programme minimum susceptible d’attirer les couches moyennes.

Le front populaire n’est donc pas ce qu’en dise les groupuscules trotskystes arc-boutés sur les écrits de L Trotsky (comme la LTF)

b) Ne pas oublier les deux travers du FUO

La conception du FUO telle qu’enseignée jadis dans la LCR incite à se départir de deux défauts courants : l’ouvrièrisme d’un côté et le populisme de l’autre. Marx disait de l’ouvriérisme : « Le solo du prolétariat risque de se transformer en chant funèbre ». Les ouvriers de l’industrie sont minoritaires. Même si on y ajoute les employés de base, les chômeurs et précaires cela reste sociologiquement insuffisant. A l’opposé le populisme entendu comme alliance avec la petite-bourgeoisie constitue un risque de dérive pour le FUO. Le populisme admet des alliances organisationnellesde la gauche politique avec la droite modérée. Il le fait avec des noms divers - « front de classes » (lesquelles ?), « cartel laïc », « front uni de résistance contre l’oppression ». A chaque fois ces fronts interclassistes mettent in fine le prolétariat à la remorque des intérêts de la classe dominante.

c) Tactique et stratégie : Que faire avec le PS ou les écologistes « roses » ?

Ne rien faire avec la droite est acquis. Avec le PS des alliances sont possibles dans les villes tenues par des équipes de la « gauche interne » du PS. Il apparait fort dangereux de s’engager durablement avec l’appareil national qu’il soit pro DSK, pro Ségolène Royal ou pro Martine Aubry. « Frapper ensemble côte à côte mais séparément » reste alors le seul fil à plomb.

Chez les écologistes il y a aussi des verts droitiers, des verts « roses » et des verts « rouges ». C’est donc en fonction des profils que des accords sont possibles. En tout état de cause, quand la rue est revendicative l’heure n’est pas aux froids accords d’appareils, du moins pas de ceux qui visent à étouffer ou instrumentaliser le mouvement de masse. La tactique du Front unique est de proposer à ces partis de travailler ensemble dans des combats spécifiques,
pour des objectifs partiels.

Christian DELARUE

1) lire l’ouvrage des PINÇON-CHARLOT

2) « Classes populaires » ? : Recherche prolétaires et peuple-classe désespérément.

http://amitie-entre-les-peuples.org/spip.php?article964

3) lire ici Jacques Kergoat

4) Référence ici au cahier rouge spécial FUO de Jean-Marie Freyssat (1976)

Mais on peut consulter aussi :

Démarche transitoire, Front unique, gouvernement ouvrier François SABADO

http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article527

Front unique et hégémonie

http://www.lcr-lagauche.be/cm/index.php?view=article&id=768:front-unique-et-hegemonie&option=com_content&Itemid=53