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Emergence d’un « centre » néosolidariste en France en mai 2012 ? C Delarue

lundi 7 mai 2012, par Amitié entre les peuples

EMERGENCE D’UN « CENTRE » NEO-SOLIDARISTE EN FRANCE EN MAI 2012 ?

Qu’il y ait toujours un fort affrontement droite-gauche en France, ne
signifie pas qu’il n’y ait pas une zone floue au « centre » ou les
conceptions du monde sont proches. Cela permet d’ailleurs les
collaborations en plus des alternances. Cela freine aussi le passage de l’alternance à l’alternative.

I - La constitution de ce centre se manifeste aujourd’hui d’un côté centre gauche par le poids d’un PS dégagé de ses références marxistes et du côté centre droit par la position de Bayrou. Le fait que Bayrou du MODEM ait annoncé qu’il voterait F Hollande est un geste qui montre bien une proximité idéologique avec une « gauche molle » (mot doux de socialistes), une gauche d’accompagnement social du libéralisme et ce malgré les divergences qui perdurent. Bayrou et son courant « droite modérée » a en effet refusé de soutenir Sarkozy et sa double dérive d’une part vers un nationalisme xénophobe et d’autre part vers un ultra-libéralisme destructeur de cohésion sociale et trop favorable aux très riches. C’est un geste significatif .

La droite classique est issue de la vieille « démocratie chrétienne »,
celle d’abord porteuse de l’acceptation de la démocratie chez les
chrétiens qui la refusaient, puis de la doctrine sociale de l’Eglise au
cours du XX ème siècle. De là vient son volet social qui la distingue de la droite libérale façon Madelin au profit d’un rapprochement du PS. En fait c’est le PS qui s’est rapproché de la droite sociale et non l’inverse comme on pourrait le penser aujourd’hui.

Cette droite humaniste s’est, sauf rares exceptions, opposée au FN comme aux gauches marxistes, social-démocrates, stalinienne, trotskyste. Mais elle a toujours préféré s’allier avec la droite libérale plutôt qu’avec un PS débarrassé de ses références de transformation sociale (depuis 1991 au moins). En ce début du mois de mai 2012, elle vient de lâcher bruyamment N Sarkozy qui bafouait trop ses valeurs au profit d’un nationalisme agressif, anti-humaniste, tout en séduction des électeurs du FN.

Cette droite-là est proche du solidarisme d’un Léon Bourgeois, tout
comme d’ailleurs certains socialistes peuvent l’être du fait de leur
abandon du marxisme. Cette proximité n’est pas de l’ordre de l’adhésion stricte à un corps de doctrine venu d’un Léon Bourgeois (1851-1925), d’un Célestin Bouglé (1870-1940) ou d’autres penseurs solidaristes (1) pas plus d’ailleurs qu’il y aurait une référence forte aujourd’hui au sein de la composante chrétienne à un courant thomiste façon Jacques Maritain (décédé en 1973) ou Etienne Gilson (décédé en 1978) ou à une droite chrétienne d’inspiration augustinienne façon Maurice Blondel (décédé en 1949) ou Etienne Borne (décédé en 1993). Cette proximité est d’abord l’effet d’un positionnement politique en évolution qui tient compte des rapports de force du champ politique et social.

II - Dans cette perspective plus large, plus près du réel, on observe, non plus un « centre » politique tranquillement gestionnaire de la paix sociale par des accommodements « raisonnables » en tout genre notamment entre le travail et le capital, mais la bonne vielle lutte des classes entre les grands possédants au sommet de la société (le 1% plus la couche d’appui idéologique et technique ce qui fait les 4 à 5% d’en-haut) contre le peuple-classe, soit les 95% de la population.

Et ce peuple-classe a été fortement défendu par certains « corps intermédiaires » de la société civile que sont les syndicats de travailleurs salariés pour le volet social et pour le volet projet politique émancipateur par les gauches de gauche et notamment le Front de gauche et les extrêmes-gauches NPA - LO plus les écologistes EELV. Ces gauches et ces écologistes sont dans l’ensemble moins des appareils gestionnaires de l’existant (surtout pour NPA et LO) que des outils pour le combat politique émancipateur. Le système républicain actuel les incite à se former en machine de soutien des élus mais leur fonction est avant tout de porter un projet d’alternative sociale, démocratique et écologique et non simplement d’alternance.

Il faut compter aussi avec les mouvements sociaux issus de la société civile comme ATTAC association altermondialiste encore bien implantée qui dispense un fort potentiel de critique sociale contre la finance et la politique accaparée par l’oligarchie. Il s’agit d’une triple critique démocratique, sociale et écologiste tant au plan local, que national, continental et mondial.

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Ce 7 mai il va falloir couper le fil idéologique et stratégique qui rabat le peuple-classe vers le peuple-nation, les citoyens vers les « compatriotes ». Et la riposte aux attaques de l’oligarchie financière sera le premier test. En effet, pour rassembler les résidents de ce pays, il faudra d’une part s’attaquer à la finance et répartir le travail et les richesses, d’autre part donner le droit de vote aux résidents extracommunautaires durablement installés sur le territoire national, et enfin enclencher une dynamique d’alterdéveloppement plus écologique. Et bien d’autres choses encore.

Christian DELARUE

L’ajout du néo devant solidariste vient de l’intégration au corpus
solidariste classique de tout ce qui relève aujourd’hui de l’ESS, c’est
à dire l’économie sociale et solidaire. Cela se combine à un retour à
Keynes européanisé pour certaines politiques économiques de régulation qui espèrent pouvoir stabiliser un « capitalisme vert à visage humain ».

L’ensemble est fondé sur le travaillisme au sens large du terme.
Ce terme évoque aussi, plus strictement, un rapport entre parti et syndicat et donc en contrecoup un type de syndicalisme.

Lire « Néo-solidarisme »centriste«  : Keynes, Durkheim, Bourgeois, Bouglé ! » C Delarue

http://amitie-entre-les-peuples.org/spip.php?article765