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Déclaration finale du symposium organisé par le CETIM du 7 au 9 décembre 2007 à Genève

samedi 21 juin 2008, par Amitié entre les peuples

Appel pour une autre coopération internationale

par CETIM

Nous, les associations, organisations, partis et mouvements sociaux soussignés, réunis à l’occasion du symposium intitulé « Coopération internationale, développement, aide au développement... de quoi parle-t-on au juste ? », décembre 2007, Genève,

Constatons :
 que les politiques de libéralisation commerciale et de privatisation imposées au cours des dernières décennies ont creusé toujours plus fortement les inégalités, à l’intérieur de chaque pays et entre les pays, touchant en premier les femmes et les enfants ;
 que malgré les possibilités offertes par les avancées prodigieuses des connaissances scientifiques et des progrès techniques, le fléau de la faim ne cesse de croître dans le monde et que les paysan-ne-s en sont paradoxalement les premières victimes ;
 que la « mondialisation » telle qu’elle a été comprise et pratiquée par les pouvoirs dominants n’a pas tenu les promesses vantées par ses promoteurs ; Sommes convaincus que les quelques engagements pris lors des sommets de l’ONU tenus à New York en 2000 et 2005, quelles que soient les appréciations portées sur eux, ne suffiront pas à changer fondamentalement une orientation marquée vers une forme d’apartheid mondial ;

Constatons également que ces politiques, et le mode de production et de consommation qu’elles soutiennent, ont déjà conduit à des dégradations écologiques irréversibles et que, si elles sont poursuivies, mèneront l’humanité, notamment ses couches les plus vulnérables, à des désastres d’une ampleur incommensurable ; Craignons que le soudaine prise de conscience de la crise écologique, hélas bien tardive ne soit pas capable d’affronter le véritable problème qui est celui du modèle de « croissance économique » dominant et ne serve qu’à ouvrir au contraire de nouveaux champs aux profits. A cet égard, l’exemple des agrocarburants, dont la culture a déjà fait beaucoup de mal aux exploitations vivrières et à l’agriculture paysanne ou encore l’expansion des « bourses de CO2 », octroyant le droit de polluer contre argent sous couvert de « transfert » de technologie montrant les limites de certaines « solutions » ;

Constatons :
 que le fardeau de la dette – sans parler de la dette écologique – globalement remboursée et bien souvent indue, continue à écraser la plupart des peuples du Tiers Monde ; que les mesures cosmétiques adoptées à l’égard des pays pauvres les plus endettés sont très insuffisantes, souvent non suivies d’effets mais assorties par contre de conditionnalités qui contreviennent aux principes d’autodétermination et d’égalité des peuples et nations ;
 que les politiques fiscales de plusieurs pays au Nord comme au Sud, sapent les capacités de développement des plus pauvres et que la seule politique fiscale internationale réellement en vigueur est celle de la sous-enchère fiscale ;

Considérons également :
 que le droit de propriété intellectuelle – ce droit humain visant à ce que soit moralement reconnu à son auteur, individuel ou collectif, le mérite d’une invention ou création –, a été complètement dévoyé de ses objectifs à des fins commerciales, en privatisant des savoirs collectifs et monopolisant les connaissances et techniques ;
 que les politiques migratoires discriminatoires encouragent un drainage des cerveaux des pays pauvres vers les nations industrielles et « développées », au détriment des intérêts de nations en « développement » et au mépris des efforts qu’elles ont consentis ; Constatons enfin que, en violation d’un droit international chèrement acquis au travers de guerres mondiales meurtrières, l’unilatéralisme de grandes puissances et la convoitise de grandes sociétés transnationales engendrent ou attisent des conflits armés un peu partout dans le Sud, provoquant des victimes sans nombre, déplaçant des populations, détruisant des infrastructures et ruinant en peu de temps tous les efforts de développement accomplis et les résultats obtenus souvent de longue haleine.

APPEL POUR UNE AUTRE COOPÉRATION INTERNATIONALE

Nous, associations, organisations, partis et mouvements sociaux soussignés, préoccupés par l’évolution actuelle de la mondialisation, appelons à faire pression sur nos gouvernements respectifs et sur le forum interétatique que constitue l’ONU pour que les Etats :
 soutiennent l’exigence de souveraineté alimentaire des peuples et appuient le concept d’agriculture paysanne et de proximité ;
 appuient la réalisation d’audits nationaux et internationaux sur la dette du Tiers Monde pour que son règlement, visant à son annulation, soit fondé sur les principes d’équité et de justice ;
 combattent la course destructrice à la sous-enchère fiscale, luttent résolument contre les formes de paradis fiscaux et judiciaires, contre la compétition fiscale, font pression pour lever le secret bancaire là où il se trouve et rapatrient les biens mal acquis ;
 mettent les progrès des connaissances, sciences et techniques, qui sont des oeuvres avant tout collectives, au service de l’humanité toute entière et considèrent comme prioritaire la défense des biens communs de l’humanité ;
 promeuvent une politique visant à l’émancipation des femmes et une politique de la jeunesse, fondée sur l’esprit de solidarité planétaire et internationale ;
 ratifient prestement la Convention des Nations Unies sur la protection des droits des travailleurs migrants et des membres de leur famille entrée en vigueur en juillet 2003 ;
 accordent, dans leur politique nationale comme internationale, conformément à la Déclaration de Vienne qu’ils ont approuvée à l’unanimité, la primauté à la réalisation des droits humains pour tous et toutes, dont les droits économiques, sociaux et culturels et ce avant toute considération d’ordre commercial, de conquête de marchés et de puissance ;
 considèrent le droit au développement comme un droit humain indissociables de tous les autres droits humains, civils et politiques, économiques, sociaux et culturels, impliquant la pleine réalisation de chacun et de la totalité d’entre eux ;
 reprennent et fassent leur la définition du « développement » telle que formulée par la Déclaration sur le droit au développement, soit un processus global, économique, social, culturel et politique, qui vise à améliorer sans cesse le bien-être de l’ensemble de la population et de tous les individus ;
 placent l’être humain et les peuples au centre du développement ;
 réaffirment la nécessité de respecter de façon absolue, dans les relations internationales, le principe d’égalité des nations et des peuples et leur souveraineté inaliénable sur leurs ressources et richesses naturelles et veillent à ce qu’elles ne soient pas exploitées ou consommées au détriment d’autres nations et peuples ;
 s’abstiennent, à l’échelle internationale, de soutenir toute politique dont les résultats pourraient s’avérer contraires à ces objectifs abandonnant une logique de compétition au profit de celle de coopération internationale ;
 promeuvent une démocratie participative, une solidarité internationale effective, renoncent aux exportations d’armes et militent pour un désarment généralisé au service de l’amélioration du bien-être de tous et toutes, sur des bases égalitaires.
 atteignent (pour les pays au PIB élevé) sans délai le plancher minimum de 0.7% du PIB consacré à l’aide publique au développement, tout en veillant à adopter des politiques nationales économiques cohérentes et en prenant en compte le fait que l’aide au développement n’est qu’un mécanisme de changement parmi d’autres ;
 s’inspirent d’initiatives économiques alternatives comme l’ALBA ou la Banque du Sud. Si elles poursuivent leurs finalités déclarées d’autonomie financière et de coopération fondée sur la solidarité et la complémentarité, elles sont à saluer. * Appel lancé dans le cadre du symposium du CETIM intitulé « Coopération internationale, développement, aide au développement... de quoi parle-t-on au juste ? », les 7-9 décembre 2007, Genève. Voir les vidéos des conférences sur www.cetim.ch Pour cela, nous appelons également les Etats à mettre enfin en oeuvre la Déclaration sur le droit au développement telle qu’elle fut adoptée le 6 décembre 1986, par l’Assemblée générale des Nations Unies à une écrasante majorité d’Etats, représentant plus de 85% de la population mondiale, à cesser d’opposer à son endroit des arguties juridiques dilatoires et à en reconnaître la justesse et la pertinence des principes et concepts fondamentaux. Fruit des efforts de près de 30 ans des pays du Sud fraîchement décolonisés et du Mouvement des non-alignés, cette Déclaration s’offre comme une source d’inspiration plus actuelle que jamais si l’on veut éviter que le monde ne s’enfonce encore davantage dans des impasses irréversibles. Nous appelons enfin toutes les citoyennes et tous les citoyens, les individus, les associations, mouvements et partis épris de justice mondiale et de progrès et international, à se mobiliser, à s’organiser et à agir sur le terrain, dans la rue comme par les urnes et dans les institutions, pour réaliser ces objectifs.

LES ORGANISATIONS SIGNATAIRES (AU 15 JUIN 2008) : Asociación Nueva Utopia, Suisse Association internationale des techniciens, experts et chercheurs (AITEC), France Association pour la transaction des transactions et pour l’aide aux citoyens (ATTAC), Suisse Association Survie, France Centrale sanitaire Suisse romande (CSSR), Suisse Centre Europe – Tiers Monde (CETIM), Suisse Comité pour l’annulation de la dette du Tiers Monde (CADTM), Belgique Comité pour l’annulation de la dette du Tiers Monde (CADTM), Suisse Commission Tiers Monde de l’Eglise catholique (COTMEC), Suisse Développement et Civilisations – Lebret-Irfed, France Enfants du Malawi, France Food First Information and Action Network (FIAN), Suisse Forum africain des alternatives, Sénégal Forum du Tiers Monde (FTM), Sénégal France Libertés Fondation Danielle Mitterrand, France MediCuba, Suisse Mouvement pour la coopération internationale (MCI), Suisse

Organisation initiatrice de l’appel : CETIM (Centre Europe – Tiers Monde), 6 rue JC Amat, 1201 Genève, Suisse, cetim bluewin.ch, www.cetim.ch