Contribution au débat sur l’addiction à la consommation. C Delarue
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ATTAC : Contribution au débat sur l’addiction à la consommation.
Cette contribution ne vaut que comme piste pour le débat. Elle s’explique, pour partie, par le fait que je ne me retrouve pas totalement dans la définition des « alter-culturels » (Worms) dans la mesure ou j’estime qu’une dose de paraitre est absolument essentiel aux rapports humains. Cela peut étonné d’autant plus que j’ai longtemps apprécié Eric Fromm notamment producteur de « Etre ou avoir ». Je défends plutôt l’idée d’équilibration.
De plus il faut se garder d’une option totalitaire, qui vise à tout interdire. Il importe de dégager des espaces de liberté entre des excès contraires, trop de laxisme d’un côté, trop d’interdits de l’autre.
Sur les modalités de pression sociale, je ne suis pas pour passer du « çà » du tout est permis et sans entrave (désublimation répressive) au « surmoi » de la « simplicité volontaire » généralisée et imposée à autrui. (sublimation contrainte). Cela mérite d’être explicité.
Au nom de la sobriété j’ai entendu des jeunes tancer des jeunes filles pour les rares bijoux portés ! Comme quoi il n’y a pas que les islamistes sexo-séparatistes à promouvoir un modèle bien rigoriste de l’apparence humaine qui s’adresse surtout aux femmes. Les islamistes sexo-séparatistes ont quand même la particularité par rapport aux autres musulmans de vouloir enfermer totalement leur femme ce qui est une barbarie nettement différente et plus grave que les simples pressions en faveur d’un mode de présentation de soi.
Cette critique amicale et bienveillante du texte de Thierry Brugvin ne porte donc pas que sur son texte stricto-sensu mais aussi sur certaines pratiques qui peuvent s’en réclamer.
Ref : Les causes psychosociologiques de l’addiction dans une société capitaliste.
http://www.france.attac.org/spip.php?article11535
Pour moi, il s’agit d’une forme « soft », plus individuellement et socialement acceptable et bien différente de l’addiction à la drogue, au tabac ou à l’alcool. Elle se rapproche de l’addiction au sport ou à la sexualité ou aux jeux vidéos considérées aussi en général comme doux. Avec ces formes, ce n’est que passé un certain niveau que les inconvénients surgissent en bousculant gravement les liens familiaux ou sociaux .
L’addiction à la consommation entraine un risque de dilapidation des ressources de l’individu. Par ailleurs les choix de consommation sont souvent mauvais, les achats utiles sont délaissés au profit d’achats futiles.
L’addiction à la consommation peut être passagère et positive. Se faire quelque cadeaux après une séparation amoureuse est considéré comme une reconstitution narcissique positive. C’est lorsque le fait de surconsommation s’installe vraiment dans la durée - ce qui caractérise l’addiction - que le problème surgit.
Il est vain d’en appeler à la sobriété volontaire et son aspect retour d’un surmoi austère et anti-jouissance si l’on ne va pas aux causes de l’addiction. Ces causes mettent certes en conjonction une insécurité intérieure avec une offre commerciale abondante. Il y a donc au premier regard une cause individuelle et une cause socio-économique. Mais c’est la première cause qui est la plus déterminante, la seconde n’est que facilitante. Et il ne suffit pas de pointer des insécurités intérieures pour qu’elles disparaissent . Certaines, pathologiques, sont soignables, difficilement souvent. D’autres font parties du substrat animal de l’humanité qui évolue avec elle. A suivre Darwin revisité par P Tort on pourrait penser que les politiques de solidarité et de reconnaissances mutuelles favorisent la diminution des peurs et l’épanouissement des individus.
Cette observation sur la cause socio-économique simplement facilitante ne vaut, il faut le dire, que par le fait que les riches possédant un fort besoin d’accumuler et de posséder des biens ne se retrouve pas en soin. Leur addiction est remarquée que lorsqu’il y a dilapidation grave de la fortune personnelle et non en fonction d’un jugement sur le niveau de possessivité atteint. Les riches qui ne possèdent pas un fort besoin d’accumuler dispose néanmoins d’un budget de « relations sociales » qui se ramène à ce que Veblen Thorstein (1970) appelait la « consommation ostentatoire ». Mais il s’agit là que de pratiques ordinaires de la communauté. Appartenir à la classe dominante oblige en quelque sorte à des pratiques communautaristes de ce genre.
Le problème est que le modèle de la consommation ostentatoire se diffuse dans la société chez les couches sociales aisées quoique non riches. Ici, effectivement, il faut avec Thierry Brugvin (texte cité plus haut ) accuser un déterminant social qui est « le capitalisme libéral qui valorise la réussite individuelle, le mérite, la compétition entre les individus » car « cela renforce le culte de l’égo, la recherche de pouvoir, le besoin de reconnaissance ». Mais cette tendance, l’auteur le note, existait déjà avant chez les humains avant l’avènement du capitalisme libéral.
A ce stade nous serions plus enclin à préconiser l’équilibration que la paresse totale ou l’austérité complète. Sous couvert de simplicité volontaire certains adeptes de la décroissance sont passé de l’activisme au travail à l’apologie de la paresse. L’ouvrage « Le droit à la paresse » de Paul Lafargue fait un retour notoire dans les rayons des librairies. Or pour nous le « ne rien faire » est source de consommation addictive. On voit chez les individus marginaux et à petits budgets de véritables crises de consommation ostentatoire de fringue de luxe . Il s’agit souvent de jeunes. Mais c’est du côté de l’arrière plan des angoisses que se trouve la réponse. Ces individus se font d’ailleurs soigner pour leur névrose ou psychose.
Autant nous sommes contre le travaillisme du « travailler plus pour gagner plus » autant nous sommes contre le « ne rien faire » ou le travailler 2 heures par semaine. Il y a une voie intermédiaire à favoriser qui consiste à faire baisser massivement le temps de travail à 30 heures de celles et ceux qui travaillent déjà et à ouvrir des postes à ceux qui ne travaillent pas. Nous sommes pour que tout un chacun(e) puisse participer à la production de l’existence sociale à sa mesure et puisse en vivre décemment.
Christian DELARUE
28 oct 2010
On ne saurait s’en tenir à ces remarques. Il faut lire aussi en contrepoint sur ce thème :
ESTIME DE SOI, RECONNAISSANCE, EMANCIPATION - (AMOUR ET TRAVAIL . ET LE RESTE ?)
http://www.attac.org/fr/blogs/delarue-christian/5-05-2010/estime-de-soi-reconnaissance-emancipation
Sobriété pour les très riches de tous les pays. C Delarue
http://amitie-entre-les-peuples.org/spip.php?article717
La « PROLOPHOBIE » d’Hervé Kempf (ATTAC - C. Delarue)
http://www.mediapart.fr/club/blog/jean-rex/281010/la-prolophobie-dherve-kempf-attac-c-delarue