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Civiliser le capitalisme par un alter-capitalisme social et environnemental ? Christian Delarue

lundi 8 août 2022, par Amitié entre les peuples

Civilisation ou barbarie

Civiliser le capitalisme par un alter-capitalisme social et environnemental ?

DEMOCRATIE RABOUGRIE, PHILOSOPHIE EMBARQUEE, SYNDICALISME NECESSAIRE, AUTRE DEMOCRATIE AUSSI

La tendance longue de ces 40 dernières années de néolibéralisme a été de libérer les forces du capital des entraves posées jadis par les luttes sociales pour brider ses nuisances . La « thathchérisation du monde » de la fin des années 70 (1) produit un « ensauvagement du monde ».

Civiliser le capitalisme par un "alter-capitalisme » moins libéral et plus social et environnemental, tel était le projet du Parti socialiste (PS) avant 1983. Depuis cette date les politiques d’austérité contre le peuple social des 90% se sont succédées.

 Une démocratie très limitée pendant plus de 35 ans.

La démocratie dite représentative, dans son fonctionnement historique propre à la période post-1981, est restée durablement coincée entre forces conservatrices de droite et forces de gauche réformatrices intra-systémique. C’est tout nouveau qu’en 2022, le PS des Eléphants du néolibéralisme et de l’ordolibéralisme (celui de Hollande et autres) se trouvent soudainement minoritaires face à la dynamique de la NUPES plus offensive sans être pour autant d’extrême-gauche.

Dans ce contexte de presque 40 ans on peut voir que toutes les réformes entreprises depuis 1983 ont quasiment toutes voulues préserver la logique systémique du capitalisme - à savoir le « sacro-saint profit » d’abord - en ne lui imposant que de très faibles « limites de civilisation » de type social ou environnemental et ce afin de le rendre moins barbare, moins dur contre les travailleurs et travailleuses en souffrance, ou contre les habitants des logements étroits et considérés comme des "passoires thermiques ».
Le PS, de Mitterrand à Hollande, malgré la portée réduite de ses réformes, toutes intra-systèmiques, y compris la plus forte d’entre elles, à savoir la loi sur les 35 heures hebdomadaires, s’est constamment heurté à la droite de l’argent, de la propriété, de la liberté patronale et ce tant au niveau national, qu’européen et mondial.

Le PS a aussi trouvé, selon les époques, avec la CFDT un syndicalisme de négociation pour valider ces dispositifs : la CSG fut présenté comme une avancée et non un recul par exemple.

On se souvient que son congrès de 1991 avait placé le capitalisme hors de l’histoire et qu’il « bornait désormais leur horizon  » ! Hollande, plus tard, en 2007, avait osé lui fustiger la finance comme son ennemi mais c’était pour mieux sauver, de façon illusoire, une économie capitaliste non financiarisée quoique toujours très exploiteuse de la force de travail ! En fait rien ne fut entrepris contre la finance prédatrice : pas de séparation entre banques de dépôt et banques d’affaires, pas de constitution d’un pôle public bancaire avec des nationalisations et socialisations, etc, etc (lire CADTM, ATTAC et BASTA sur ces sujets)

 André Comte-Sponville philosophe sauveteur du capitalisme

On se souvient aussi qu’un philosophe s’est employé, à sa façon, à dénier au capitalisme toute barbarie, toute immoralité. André Comte-Sponville avait voulu sauver le capitalisme dans son ouvrage « Le capitalisme est-il moral ? »(Albin Michel 2004). En conclusion il l’avait déclaré a-moral sur la base que le système productif relève de l’économie et que la morale n’a rien à faire avec l’économie. Ne mélangeons des ordres bien distincts disait-il.

Mais l’économie n’est pas « naturelle" (1) car activité humaine inscrite dans l’histoire et le social . Et le capitalisme c’est plus que l’économie. L’économie - si on pose provisoirement qu’il y en a qu’une - n’a donc pas à être fétichisée, c’est à dire à être placée comme un dieu-fétiche surplombant, au-dessus des humains et de la société et tout particulièrement au-dessus des travailleurs et travailleuses mais aussi au-dessus des consommateurs réduits à n’être que des clients : on peut donc vouloir transformer son fonctionnement sur plusieurs aspects tant dans la production que dans l’échange marchand.

Et on le voit fort bien avec l’économie des services publics qui produisent directement de la valeur d’usage pour des usagers et non des clients (nécessairement solvables), et ce sans passer par la case « profit" car ils sont tendus eux par et vers l’intérêt général. Le service public vise - aussi - la satisfaction des besoins sociaux au-delà de la demande solvable.
Le problème est que l’économie des services publics est phagocytée par l’économie capitaliste qui impose sa logique hors de son champs. C’est que le capitalisme n’est pas - on l’a dit - qu’économie mais aussi est un système qui n’a pas de frontière. Il tend à s’étendre partout. Il tend en interne (dans l’entreprise, dans la sphère productive) à naturaliser un fonctionnement de surtravail (travailler plus serait normal) et en externe (dans la sphère de circulation marchande) à produire des inégalités car son fonctionnement génère pénurie pour les uns et accumulation pour les autres

Déjà, à la sphère de la production s’ajoute nécessairement la sphère de la circulation marchande ou le profit se réalise face à une demande nécessairement solvable. On oublie souvent que la sphère de circulation est nécessaire à la définition du processus économique capitaliste. Si l’extorsion de la plus-value s’origine dans la sphère de la production (par l’exploitation de la force de travail) elle se réalise comme profit dans la sphère de circulation marchande en trouvant des clients acquéreurs solvables, quitte à user du crédit.

Quid alors des clients non solvables ? Faute d’Etat social - dont on connait les limites et les attaques contre les services publics et la sécurité sociale - ces clients non solvables sont laissés au caritatif et finalement à la mort. Souvenez-vous de la proclamation toute spencérienne de Laurence Parisot présidente du MEDEF : « La vie, la santé, l’amour sont précaires, pourquoi le travail échapperait-il à cette loi ? ». Ni stabilité, ni solidarité que la loi de la jungle !
Le capitalisme fait pleinement sien la formule hobbesienne "L’homme est un loup pour l’homme’. La solidarité institutionnelle n’existe pas. A la rigueur du caritatif !

 De l’Etat aux syndicats

Quel est le rôle de l’Etat dans ce cadre ? Comment croire que « sa main gauche » (Bourdieu) va agir spontanément autrement que pour des actions très limitées au profit des secteurs les plus impactés par l’offensive capitaliste néolibérale ? L’Etat ne sert plus l’intérêt général via les services publics qu’en se soumettant d’abord aux diktats des classes dominantes au plan national et aux principes de l’Union européenne, aux canons de Maastricht (1992-1993) au plan plus élargi (2). Ce qui constitue une dégénérescence de l’intérêt général et derrière lui de la satisfaction des besoins sociaux du peuple-classe.

C’est là que l’on perçoit l’utilité du syndicalisme confédéré (de classe et de masse) dans toute son étendue : le syndicat du travail agit ou doit agir, aussi bien au coeur des rapports sociaux, dans la structure de production, privée ou publique (pas que privée), qu’au stade de la « circulation marchande » c’est à dire hors de l’entreprise, au plan de la consommation. A ce titre, on devrait mieux connaitre INDECOSA-CGT. Autre aspect du syndicalisme contemporain : il s’agit pour lui de poursuivre la défense des interêts matériels et moraux des salariés non actifs devenus retraités, tant au plan des revenus (pensions faibles), de la santé, de l’accès aux services publics, du maintien de la sécurité sociale, etc

 Et l’alter-démocratie entendue comme « Democratie complète »

Etendre le champ , approfondir le processus de démocratisation (atelier UEMS Nantes)
ALTERDEMOCRATIE : Faire advenir le-la « travailleur-se citoyen-ne » d’en-bas.

sur blog attac commission democratie outils

https://blogs.attac.org/commission-democratie/outils-de-la-democratie/article/la-democratie-economique-vers-la-democratie-complete-l-alterdemocratie

Christian Delarue
Syndicaliste CGT Finances UFR (CEN) et ATTAC Com Démo

1) L’approche standard (de l’économie) a souhaité rompre avec une représentation du fonctionnement de l’économie ancrée dans l’histoire et la société, afin de pouvoir découvrir et démontrer l’existence de « lois » économiques « naturelles ».

https://www.causecommune-larevue.fr/l_economie_dominante_au_service_de_la_classe_dominante

2) Sur Maastricht 1992-93

https://www.cadtm.org/1992-93-Gouvernance-maastrichienne-et-force-de-oligarchie-financiere-quelle