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Bourgeoisie, peuple-classe, peuple-nation - C Delarue

samedi 29 novembre 2008, par Amitié entre les peuples

Bourgeoisie, peuple-classe, peuple-nation.

Parler de bourgeoisie nationale par rapport au peuple-classe permet de recentrer le regard sur la structure de classe de la société. Ce qu’une certaine lecture, notemment celle faisant appel à Gramsci et à la notion de bloc hégémonique (1) - qui possède aussi sa pertinence dans certains champs d’analyse - tendrait à effacer à tort .

 Le cercle étroit de la bourgeoisie.

Adopter une définition stricte de la bourgeoisie permet de relativement se dégager de certaines compréhensions élargies de cette classe, voire idéologico-polémiques sur « les bourgeois » (ou petit-bourgeois) comme par exemple être bourgeois sans être capitaliste simplement comme acteur de la perpétuation de « l’ordre bourgeois ». Cette compréhension là peut en effet élargir excessivement la classe dominante bourgeoise .

Pour éviter pareil extension, très floue au demeurant, il ne manque pas d’analystes qui recentre la définition sur un usage plus « scientifique » du mot bourgeois . Ce qui n’empêche pas d’ignorer la complexité d’une classe dominante . Ainsi, Claude Serfati utilise le terme de bourgeois pour réunir les propriétaires capitalistes (petits ou grands) attachés à la sauvegarde de la propriété des moyens de production et le premier cercle d’appui constitué des très hauts cadres d’entreprise. Il y a donc bien un noyau dur bourgeois auquel s’ajoute une sorte de « bourgeoisie de fonction ».

L’accord s’est réalisé chez les participants à l’ouvrage « Bourgoisie : état d’une classe dominante » (Syllepse) pour ne pas abuser de cet élargissement en « descendant » trop dans l’encadrement . Comme . Suzanne De Brunhoff souligne que les salariés à « stock-options » sont une infime minorité. La classe bourgeoise dominante est une classe sociologiquement étroite mais politiquement puissante, notamment via les gouvernements étatiques et les instances de gouvernances les plus diverses.

 Quid des cadres supérieurs ?

Les cadres de niveau supérieur aux techniciens ne sont pas des membres de la bourgeoisie mais du peuple-classe. Ils ont néanmoins une position particulière dans le salariat, notamment en terme de commandement (2), de capacité de pouvoir d’achat et de reconnaissance sociale, qui les rapproche de certaines professions libérales et qui les distingue des techniciens et à fortiori des employés et ouvriers mais ils restent des travailleurs salariés. Ils doivent vendre à un capitaliste (ou à l’Etat) leur force de travail pour vivre. Ils font parti de « ceux d’en bas » quoique dans les couches moyenne-supérieures.

Leur capacité d’épargne peuvent faire qu’ils soient à la fois salarié et actionnaire de leur entreprise ; ce qui peut générer une certaine schizophrénie du fait qu’ils peuvent vouloir deux choses contradictoires : l’augmentation du profit et l’augmentation des salaires. Les syndicalistes savent que ce ne sont pas ces couches sociales que l’on retrouve dans les luttes pour inverser la tendance à l’augmentation de la part du profit par rapport à la masse salariale.

Politiquement, ce sont des couches sociales au sein du salariat les plus sensibles au discours d’une élite gestionnaire d’un ordre social existant « plus juste » ; mais ils peuvent très bien effectuer un léger déplacement et voter pour un programme social-démocrate fondé sur une politique néo-keynésienne. Ce qui n’est pas rien en terme de bloc social constitué contre les libéraux (ultra-libéraux et sociaux-libéraux).

 Le curseur est nécessaire mais sa position exacte peut faire débat.

J’ai mis le curseur de séparation bourgeoisie / peuple-classe sur bourgeoisie nationale mais j’aurais pu descendre le curseur en excluant la bourgeoisie infra-nationale qu’elle soit marchande, industrielle ou financière. Il y a là matière à débat. L’essentiel est de réhabiliter une structuration de classe qui intègre au noyau dur de la grande masse des travailleurs salariés avec les travailleurs résidents non nationaux, les paysans et autres indépendants mais qui exclue la bourgeoisie interne et non pas seulement la bourgeoisie externe voire la seule bourgeoisie des USA vue comme bourgeoisie mondiale.

Si l’on veut mettre le rapport de domination entre l’ensemble des résidents ou plus exactement des citoyens face à une domination extérieur, c’est tout à fait possible mais il sera alors plus honnête et rigoureux de parler de peuple-nation.

Christian Delarue
CA ATTAC

Notes ajoutées postérieurement :

1) Pour une application récente de Gramsci, mon commentaire : Quel sujet et quel trajet vers le néo-socialisme selon Thomas Coutrot ?Note sur une intervention au séminaire d’Utopia de Thomas COUTROT intitulée « Comment sortir du capitalisme ? Vers un socialisme civil. » par Christian Delarue

http://amitie-entre-les-peuples.org/spip.php?article474

2) Dans « Le peuple-classe, ses ennemis et ses contradictions internes » il était déjà pointé l’existence d’un rapport d’encadrement et de commandement au sein du peuple-classe.

http://amitie-entre-les-peuples.org/spip.php?article453

« Le rapport d’encadrement et de commandement »

Le petit patronat produisant pour un marché local - que je place au sein du peuple-classe - comme l’encadrement salariés supérieur sont dans un rapport social secondaire d’exploitation beaucoup plus perceptible par les travailleurs salariés.

Dans les petites entreprises employant peu de travailleurs produisant pour un marché local le patron peut se montrer dur en terme d’exploitation des salariés. Mais, en fonction du l’objet du conflit les patrons de ces petites entreprises peuvent à la fois être du côté de l’exploitation et du côté de l’émancipation. Plus le conflit est extérieur à l’entreprise et plus le petit patron apparaitra comme faisant parti du peuple-classe. Il en va de même pour les artisans (au sens historique du terme différent du droit commrcial) qui ne sont pas des capitalistes mais des indépendants.

Au titre des contradictions secondaires il faut aussi faire place à l’encadrement supérieur dans les grandes unités de production de biens ou de services, tant dans le public que dans le privé. Ils sont en le marteau et l’enclume, tantôt partie soumise du peuple donc soumis comme le reste du salariat aux dictats de la finance et des politiques néolibérales, tantôt en position de classe d’appui de la bourgeoisie contre les travailleurs salariés privés ou public.

Pour se dégager de l’emprise de soumission du salariat au capital il y a d’abord la reconnaissance des conflits de classe dans l’entreprise et la société civile qui devrait déboucher sur le développement d’un réel code du travail protecteur accompagné d’un service public de contrôle suffisamment développé (je renvoie aux arguments du camarade Filoche sur ce sujet) . Il y aussi la reconnaissance du fait syndical mais aussi du syndicalisme interprofessionnel. Pour réellement sortir le salariat de la soumission du capital il faut abolir le capital comme rapport social et envisager clairement le passage au socialisme, un néo-socialisme pas celui du stakhanovisme soviétique. La démocratisation dans l’entreprise n’est pas une utopie pour qui envisage d’aller vers le socialisme. Il en va de même de la démocratisation hors du politique strictement entendue par élargissement de l’intervention citoyenne dans les grands choix de production à des niveaux territoriaux conséquents.
Fin citation

Le peuple-classe, une catégorie intermédiaire - C Delarue
Texte ouvrant sur différents autres textes sur le sujet.

http://amitie-entre-les-peuples.org/spip.php?article463

« Qu’est-il advenu de la classe capitaliste ? » par Alain BHIR et Jean-Marie HEINRICH
Extrait issu de « La néo-social-démocratie ou le capitalisme autogéré » p 89 Ed L e Sycomore 1979 par Christian Delarue

http://bellaciao.org/fr/spip.php ?article28356