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Blessures de la reconnaissance, envie et ressentiment dans le monde universitaire - Ph Corcuff (extrait)

mardi 9 mai 2017, par Amitié entre les peuples

Blessures de la reconnaissance, envie et ressentiment dans le monde universitaire - Ph Corcuff

(extrait d’un long texte sur son blog Mediapart)

Comme je l’ai déjà dit, la thèse de Laurence Viry sur « le monde vécu des universitaires » pointe une série de problèmes associés dans cet univers professionnel (5) qu’elle qualifie de « phénomènes socio-psychiques transversaux » (chapitre 11) : « souffrance psychique et social » (p.14), « relations de suspicion » et « déconsidération envers ses propres collègues » (p. 83), « le besoin de reconnaissance » et « l’envie » (p. 293), « l’envie peut devenir obsédante et ronger l’enseignant » (p. 293), « climat de compétition » (p.297), « la recherche incessante et insatiable de signes de reconnaissance » (p. 301), « une certaine rancœur » (p. 302), « la peur de manquer de visibilité (p. 307), « blessure narcissique » (p. 308), « jalousie envers les pairs » et « mépris » (p. 308), « et même de haine » (p. 309), « un ressentiment pouvant alors renforcer son envie de détruire l’autre » (p. 323). Le cas du ton pris par la recension de Jérôme Lamy n’est donc pas extraordinaire pour Laurence Viry : « j’ai souvent entendu des propos envieux teintés de haine envers des collègues ayant un meilleur statut ou une meilleure visibilité, une plus grande notoriété » (p. 324).

Affiner la description et l’interprétation de ces tendances pourrait faire son miel de la constitution d’un idéal-type du ressentiment à partir de l’analyse de Gilles Deleuze inspirée par Nietzsche. Des extraits de Gilles Deleuze sont, de ce point de vue, utiles à une telle confection :

« L’homme du ressentiment est par lui-même un être douloureux : la sclérose ou le durcissement de sa conscience, la rapidité avec laquelle toute excitation se fige et se glace en lui, le poids des traces qui l’envahissent sont autant de souffrances cruelles. Et plus profondément la mémoire des traces est haineuse en elle-même par elle-même. […] Le plus frappant dans l’homme du ressentiment n’est pas sa méchanceté, mais […] sa capacité dépréciative. […] Nous devinons ce que veut la créature du ressentiment : elle veut que les autres soient méchants, elle a besoin que les autres soient méchants pour pouvoir se sentir bonne. Tu es méchant, donc je suis bon » (21).

Cela éclaire nombre de comportements observés en milieu académique sur une trentaine d’années, dont le compte-rendu de Jérôme Lamy.

lire l’article (nettement plus long) :

Guide de survie existentielle en milieu académique : de la police du ressentiment | Le Club de Mediapart

https://blogs.mediapart.fr/philippe-corcuff/blog/180417/guide-de-survie-existentielle-en-milieu-academique-de-la-police-du-ressentiment